Loading...
Link copied
Loading...
Loading...
Mark all as read
You have no notification
Original
Fanfiction
Trending tags

Log In

or
@
Hikana
Share the book

CHAPITRE QUATORZE

JAGGER

Trois mois se sont Ă©coulĂ©s depuis que j’ai goĂ»tĂ© aux lĂšvres de Sun. Douces et si envoĂ»tantes. Je lui ai demandĂ© d’oublier cette soirĂ©e, mais c’est moi qui n’arrive pas Ă  me dĂ©tacher d’elle. C’est plus fort que moi ! À chaque fois que je lutte, je finis par craquer, et en pleine nuit, je la rejoins, juste pour la sentir contre moi.

La musique poussĂ©e Ă  son paroxysme, les hurlements des Ă©lĂšves saturent le calme de la maison. Clopes et joints coincĂ©s entre les lĂšvres, la fumĂ©e s’élĂšve lentement, mĂȘlant l’odeur Ăącre du tabac Ă  celle, plus terreuse et Ă©picĂ©e, de l’herbe. Dans ce mĂ©lange Ă©touffant, ça pue la sueur, l’alcool renversĂ©, le parfum trop chargĂ© et un truc cramĂ© qu’on n’a pas vraiment envie d’identifier. Les pom-pom girls attirent tous les regards, surtout quand elles montent sur les tables pour se trĂ©mousser. Les Ă©tudiants, invitĂ©s Ă  une soirĂ©e organisĂ©e par l’un de mes coĂ©quipiers du hockey, se dĂ©chaĂźnent et vident Ă  tour de rĂŽle les gobelets d’alcool posĂ©s sur la table basse et les canettes sur les plans de travail.

Mark, le dĂ©fenseur des Warriors, se marre comme un roi pendant qu’une nuĂ©e de nanas se tassent sur lui, les yeux brillants d’espoir Ă  l’idĂ©e de se faire secouer par les quelques coups de reins qu’il daignera leur filer dans son plumard.

Bethany, collĂ©e Ă  Caleb, affiche clairement que c’est son mec et que personne n’a intĂ©rĂȘt Ă  y toucher.

AffalĂ© sur le canapĂ©, les yeux rivĂ©s Ă  l’écran de mon tĂ©lĂ©phone, je vois deux nanas s’embrasser sur le canapĂ© d’en face. Comme coupĂ© du monde, je suis absorbĂ© par ce qu’il se passe sur les rĂ©seaux, mĂȘme en plein milieu de cette derniĂšre fĂȘte avant les vacances d’hiver.

Je porte mon gobelet Ă  mes lĂšvres et vide ma biĂšre d’une traite. Une nana que j’ai sautĂ©e la semaine derniĂšre, alors que j’étais bien trop bourrĂ©, vient s’installer Ă  cĂŽtĂ© de moi sur le divan.

— Je vois que le capitaine des Warriors reste sage aujourd’hui, lance Lana.

— Je me suis dĂ©jĂ  vidĂ© avec une gonzesse, dis-je comme si cela pouvait me faire oublier les lĂšvres de la blonde.

Ce n’est pas la fĂȘte ni les nanas qui me dĂ©rangent, ce sont les photos que Sun a postĂ©es sur son compte Instagram.

Aussi belle qu’une vraie mannequin, je vois dĂ©filer les commentaires d’hommes, surtout des pervers, qui rĂȘveraient de l’avoir dans leur lit. Et savoir qu’Adam l’accompagne Ă  la foire, au lieu d’ĂȘtre avec nous, ça me gave qu’il soit avec elle.

Je sais bien qu’elle est une Stars, et que son Ă©quipe, pourtant mĂ©diocre, progresse Ă  une folle allure. Si elle n’a pas Ă©tĂ© invitĂ©e ici, comme Ă  la plupart des soirĂ©es oĂč je suis allĂ©, c’est parce qu’on continue de lui coller cette histoire de vol d’examen. Et malgrĂ© cela, ça ne semble mĂȘme pas la dĂ©ranger.

— Sun te plaüt ? me questionne Lana.

— N’importe quoi. Je suis juste intriguĂ© de ce qu’elle fait avec mon frĂšre, c’est tout.

— Ouais, c’est ça. T’es intriguĂ© Ă  vingt-trois heures en train de mater ses stories Insta.

Je lĂšve les yeux au ciel, mais mon pouce continue de faire dĂ©filer l’écran. La lumiĂšre sombre du tĂ©lĂ©phone Ă©claire Ă  peine mon visage, juste assez pour trahir ce demi-sourire que je tente d’étouffer.

— Elle poste tout le temps, je suis tombĂ© dessus par hasard, rĂ©pliquĂ©-je.

— Ah ouais ? Et t’es restĂ© bloquĂ© dessus par hasard aussi ? Parce que lĂ , t’as dĂ©jĂ  regardĂ© la mĂȘme vidĂ©o quatre fois, ricane Lana.

Je soupire, puis me laisse tomber contre le dossier du canapé.

— Fous-moi la paix, ça vaudrait mieux !

— Trùs bien ! Mais fait attention qu’un autre homme ne te la vole pas, comme Adam.

SecouĂ© par la rĂ©vĂ©lation, je jette une Ɠillade Ă  Lana, incrĂ©dule.

— Adam ?

Elle se lÚve et pose une main sur mon épaule.

— Ouais, t’as dĂ©jĂ  vu un meilleur ami mater le corps et le cul de sa pote ?

*

* *

Je trace sur la route principale avec la caisse que j’ai piquĂ©e Ă  mon pote, j’appuie sur l’accĂ©lĂ©rateur pour que le turbo hurle Ă  plein rĂ©gime. Je suis prĂȘt Ă  finir en garde Ă  vue si ça me permet de la croiser ne serait-ce qu’un instant. Comment ai-je pu me tirer Ă  Londres ?

Quand j’arrive comme une flĂšche sur le parking en gravier de la fĂȘte foraine, je balance mon plus beau dĂ©rapage, digne d’un film d’action. La caisse crisse, la poussiĂšre et les cailloux volent, et pendant une seconde, j’ai l’impression d’ĂȘtre dans un putain de blockbuster. Je coupe le contact, scrute les allĂ©es illuminĂ©es puis me fond dans la foule, dans l'espoir de voir Sun.

Les odeurs de churros et de barbe Ă  papa me montent aux narines, un contraste brutal avec l’adrĂ©naline qui continue de pulser dans mes veines. Les gens crient sur les manĂšges Ă  sensation, les lumiĂšres clignotent dans tous les sens. Je marche d’un pas rapide et esquive les groupes d’amis qui se prennent en selfie et les mĂŽmes qui courent partout.

Alors que je contourne un stand d’artisan nougatier, j’aperçois Adam et Sun, en train de piocher dans les sucreries offertes en dĂ©gustation, celles qu’on pose devant les articles pour donner envie aux gens d’acheter.

— Combien coĂ»te le bloc de nougat au caramel ?

— Six cent cinquante dollars.

Je vois direct la moue de Sun, ce petit froncement de sourcils qui trahit la frustration. Elle fixe la grosse meule de nougat, les lĂšvres pincĂ©es, les bras croisĂ©s, incapable de dĂ©tourner le regard. Elle hĂ©site, tiraillĂ©e entre envie et abandon. Je n’ai plus le choix ! Je m’avance vers elle et pose un bras sur ses Ă©paules. Adam se demande ce que je fous ici.

— Tu veux autre chose, princesse ? Je suis d'humeur à te dire oui à tout.

Sun s’évente discrĂštement du bout des doigts.

— Franchement, tu as bu combien de verres, toi ? me demande Sun.

— Juste assez pour laisser en plan les autres et te rejoindre, lui rĂ©ponds-je en effleurant sa lĂšvre infĂ©rieure de mon index.

— D’accord, promets-moi juste d’arrĂȘter de faire le mec hyper intentionnĂ© car t’es trop bizarre quand t’es comme ça, lance-t-elle.

Aussitît, je jette une Ɠillade à mon frùre jumeau qui me prend à part, avant que je ne file le code et la carte bancaire à Sun.

— T’as venu Ă  Princeton c’était pour rejoindre Bethany ou pour Sun ?

Je me fige un instant, surpris par la question. Mon regard se plante dans celui d’Adam qui a les yeux marron foncĂ©, alors que moi, ils sont plus clairs que les siens.

— Au dĂ©but c’était pour Bethany, rĂ©ponds-je.

Adam finit la phrase que je n’ai pas osĂ© dire.

— Mais en revoyant Sun, ce jour-là, t’as su que ça allait changer ?

— Je te prĂ©viens, balancĂ©-je Ă  Adam, Ă©vite de la mater ni mĂȘme de la toucher.

Suite Ă  mes propos, Adam part dans un fou rire, incontrĂŽlable.

— Pourquoi j’irais mater ma meilleure amie ? C’est qui qui t’a racontĂ© ces conneries ? Sache que, me murmure-t-il, j’ai dĂ©jĂ  des vues sur une meuf, je vais pas te la voler, ta petite Sun.

Je roule des yeux, frustrĂ©, mais un sourire finit par m’échapper.

— Quelle salope, cette Lana !

Adam arque un sourcil, mi-amusé, mi-surpris et me tape dans le dos.

— Lana aime se taper des mecs, mais elle a le don aussi pour jouer cupidon.

Lana savait trĂšs bien que si Sun ne m’avait pas attirĂ©, je ne me serais jamais donnĂ© la peine de venir jusqu’à cette foire.

Quand je repose enfin les yeux sur Sun, elle esquisse un sourire, un peu troublée, le sac dans une main. Je le prends, ainsi que ma carte.

— Merci, Jagger.

— De rien, dis demain...

Je n'ai pas le temps de terminer ma phrase que Sun me coupe dans mon élan.

— Oui, j’ai passĂ© la soirĂ©e avec Adam car demain je pars Ă  Londres avec mon pĂšre.

— Et les Stars, tu les as oubliĂ©s ?

— J’oublierai jamais mon Ă©quipe. On va juste devoir faire les entraĂźnements en visio. Puis on a un nouveau coach, Brett. Il faisait partie des anciens, un vrai mec du terrain et il est gĂ©nial.

D’un coup, je me sens rassurĂ©. Mais en mĂȘme temps, l’idĂ©e qu’elle rencontre ma famille me stresse. J’espĂšre qu’ils ne seront pas trop durs. On parle d’une famille aisĂ©e, avec des rĂšgles strictes, rien Ă  voir avec les parents que Sun a connus.

— Fais attention Ă  ma grand-mĂšre, lui dis-je. Elle est trĂšs pointilleuse dans tous les domaines et elle a Ă©tĂ© Ă©levĂ©e Ă  la dure. Ne la contredis pas, sinon elle risque de te haĂŻr.

— Je dirais que ça vient de toi, pour voir lequel de nous deux, elle va haïr.

— Tu n’oserais pas me faire ça ?

Un rictus ne peut s’empĂȘcher d’étirer ses lĂšvres charnues.

— Je vais pas gĂȘner, puisque tu es lourd. Je comprends pas ce que tu veux de moi.

Je ne peux pas la mettre en danger à cause de mon statut. J’ai l’impression de ressembler à Andrew et Agathe.

— Rien, je profite de ma rivale comme autrefois. Ça faisait longtemps que je l’avais pas revue.

Le pire, c’est que je mens comme un pro. Qu’elle continue de jouer l’innocente pendant que moi, je savoure chaque moment, avant de disparaĂźtre pour de bon, quand viendra le moment de prendre ma place Ă  la tĂȘte de l’empire des Sullivan.

Comment this paragraph

Comment

No comment yet