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Hikana
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CHAPITRE QUINZE

SUN

Les bras crispĂ©s sur les barres d'appui, la tĂȘte penchĂ©e au-dessus de la cuvette, je souffle plusieurs fois pour ne pas vomir Ă  cause du mal de l’air.

Ce n’est pas la premiùre fois que je prends l’avion, mais aujourd’hui, j’ai l’impression que mon estomac fait des loopings.

Andrew a prĂ©fĂ©rĂ© sortir le jet privĂ©, histoire d’éviter que les paparazzis s’en donnent Ă  cƓur joie de faire des gros titres sur les couvertures des magazines. « La nouvelle petite amie embarque dans un avion avec le multimilliardaire ? », « Quelle relation entretient-il avec cette mystĂ©rieuse femme ? »

La voix rauque d’Andrew rĂ©sonne jusqu’aux toilettes.

— Je te l’avais dit de pas t’empiffrer de nougat et de goĂ»ter du champagne. T’étonne pas d’ĂȘtre malade !

— Ça va, j’ai compris, Andrew !

Andrew ricane derriùre la porte pendant qu’une toux m’arrache la gorge.

— Jagger va Ă©changer de place, tu prendras le siĂšge cotĂ© hublot.

À l’instant oĂč la crise se calme, je sors de la cabine et file prendre la place que Jagger m’a laissĂ©e.

Le coude calĂ© sur le rebord de la fenĂȘtre arrondie, la paume contre ma joue, je scrute l’horizon. Curieuse de ce qu’il se passe en dehors du Gulfstream lancĂ© Ă  folle allure.

Je fixe les derniĂšres traĂźnĂ©es de nuages avant qu’elles ne disparaissent, chassĂ©es par le lever du soleil. À onze mille mĂštres d’altitude, je vois les villes et les habitations, aussi minuscules que des fourmis. Aucun nuage ne tache la voĂ»te Ă©clatante. Le soleil, Ă  l’aube, Ă©claire doucement ce ciel d’une teinte bleu ocĂ©an. De lĂ -haut, je distingue que nous traversons l’ocĂ©an Atlantique, qui s’étend Ă  perte de vue. Quelques bateaux de pĂȘche, petits points blancs, glissent sur les eaux calmes et dessinent des vagues, des sillons Ă  travers cet espace azurĂ© infini.

Prise encore d’un haut de cƓur, je me redresse dans mon siùge.

— Jagger, je peux avoir le coca s’il te plaüt ?

Lors des vomissements, la seule boisson qui arrive à retenir ses spasmes, c’est bien le soda gazeux.

— Tu vas encore ĂȘtre malade, Sun !

Il n’a pas tort, ce n’est pas comme si je me suis levĂ©e aprĂšs une bonne cuite. Ce n’est sĂ»rement pas le mĂȘme effet pour lutter contre la nausĂ©e.

Soudain, je pose ma tĂȘte sur son Ă©paule, attrape sans comprendre pourquoi. Ma main serre brutalement ses doigts pour tenir face Ă  cette turbulence.

Lorsque l’avion commence Ă  descendre pour atterrir sur un point prĂ©cis, je ressens une pression sur mon corps, surtout au niveau des oreilles qui se bouchent et une boule s’insinuant au cƓur de mon ventre.

Au moment oĂč mon corps cĂšde Ă  la pression, ma tĂȘte vient se caler un peu plus contre le cou de Jagger.

— C’est pas que je veux pas, Sun, mais tu peux poser ta main ailleurs qu’ici, lĂąche-t-il d’un coup, irritĂ©.

Sans le faire exprÚs, j'ai posé ma main gauche sur son torse.

— Quand mĂȘme, me dit pas que je t’ai fait mal ? le provoquĂ©-je.

Un rire taquin s’orne sur la bouche de Jagger et s’élance dans mon conduit auditif :

— T’es vraiment pas faite pour comprendre un homme, toi !

Je roule des yeux au ciel, exaspérée. Une humeur espiÚgle envahit brutalement mon esprit.

— Oh si, j’ai bien compris que t’avais un souci, mais ça, c’est pas mon problùme ! Ne pas savoir se contrîler, c’est juste le signe d’une impuissance.

Il faut quelques secondes à Jagger pour répliquer. Sa main se cale au niveau de ma clavicule et ma gorge.

— Joue pas trop sur ce terrain Sun. AprĂšs on va dire que je suis un vrai connard, me dit-il en descendant lĂ©gĂšrement ses doigts vers mon dĂ©colletĂ©.

Je pouffe de rire, me lùve d’un seul coup pour rejoindre mon pùre mais avant de partir, je fais volteface.

— En espĂ©rant que je ne croise pas dans les couloirs.

DĂšs le premier jour de colocation avec le Londonien, nous avons dĂ» partager le mĂȘme toit. Jagger a vite pris l’habitude de dormir avec moi. Je crois qu’il aura du mal Ă  fermer l’Ɠil quand nous arriverons dans la maison de sa famille.

En quittant l’aĂ©roport, nous montons dans la voiture jaune oĂč le chauffeur nous attendait pour rejoindre la maison des Sullivan.

AprĂšs avoir pris le taxi, la bagnole jaune s’arrĂȘte devant un grand portail et Jagger et Andrew descendent.

Bagage Ă  la main, je sors hors de la caisse. Le paysage, normalement plongĂ© dans le froid, est Ă©crasĂ© par une chaleur Ă©touffante. Aujourd’hui, il fait chaud alors que j’ai mis ma doudoune sur le dos. Je l’enlĂšve au risque de mourir de chaud puis mes prunelles dĂ©taillent scrupuleusement le domicile des Sullivan.

Bien loin de ma position, une grande Ă©tendue de jardin s’étire jusqu’aux sapins, au fin fond des bois, situĂ©s Ă  plus d’un kilomĂštre. Des statues taillĂ©es et sculptĂ©es dans le buis sont disposĂ©es par centaines sur l’immense pelouse verte. Une grande allĂ©e bĂ©tonnĂ©e fend la verdure, oĂč la brise fraĂźche souffle en vagues sur les brins d’herbe, qui virevoltent face au vent agitĂ©.

Une fontaine, dont l’eau a Ă©tĂ© coupĂ©e depuis longtemps, trĂŽne silencieusement au centre de la cour. Trois voitures de luxe sont garĂ©es autour d’elle et des domestiques, des valises Ă  bout de bras, montent le double escalier impĂ©rial qui conduit Ă  l’entrĂ©e de la demeure.

Je tourne la tĂȘte sur ma droite et remarque une petite fille assise dans un fauteuil roulant. Elle fixe la piscine creusĂ©e, les mains serrĂ©es l’une contre l’autre. Rien qu’à son visage d’ange, elle me semble triste.

Les deux hommes décident de discuter avec le personnel, contrairement à moi, qui laisse ma valise sur les graviers et rejoins la petite fille. Elle a de longs cheveux noirs, le teint pùle avec une mine angélique plaqué sur son visage.

— Bonjour ! dis-je soudainement, faisant sursauter la petite fille dans son fauteuil.

— Ah bonjour mademoiselle, je m’appelle Beryn ! DĂ©solĂ©e, j’étais en train de penser Ă  quelque chose, s’excuse-t-elle en plantant son regard dans le mien. Vous ĂȘtes Sun, la fille d’Andrew, n’est-ce pas ?

— Oui parfaitement.

Lorsque je lui rĂ©ponds, Beryn s’excite comme une puce.

— Vous ĂȘtes exactement comme il me l’avait dĂ©crite ! s’exclame-t-elle avec un enthousiasme dĂ©bordant.

Ses yeux brillent d’un mĂ©lange d’admiration et de curiositĂ©. Elle serre mes mains de toutes ses forces.

— C’est fou, j’ai tellement entendu parler de vous et je pense que vous ĂȘtes largement plus mieux que la copine de mon grand frĂšre, Jagger !

Elle doit faire référence à Bethany. Elle vivait ici avec Jagger

Je reste un peu surprise, mais son énergie est contagieuse.

— Vraiment ? lĂąchĂ©-je.

— Si je vous le dis c’est que c’est vrai, mademoiselle !

Entendre Beryn me vouvoyer, malgré sa spontanéité presque enfantine, me fait sourire un peu plus.

— Tu peux me tutoyer, tu sais.

Beryn écarquille les yeux.

— Ah oui ? Alors tu veux que je te fasse visiter ? Je connais tout ici, mĂȘme les coins secrets !

— Beryn, tu devrais laisser Sun respirer ! s’écrie Jagger.

Suite à la réflexion de Jagger, Beryn se montre irritée par sa venue puis braque son regard vers le ciel, agacée.

— Toi, ta copine est trĂšs mal Ă©levĂ©e, elle me disait jamais bonjour. Par contre, Sun est trĂšs polie, au moins ! Tu devrais trouver une femme comme Sun.

Je vois bien que Beryn n’a jamais portĂ© Bethany dans son cƓur.

*

* *

Brusquement, les rayons du soleil m’éblouissent et m’arrachent une plainte inarticulĂ©e. Les paupiĂšres closes, je me dĂ©tourne des filets de lumiĂšres. MalgrĂ© moi, je grogne, tire mĂ©ticuleusement la couette puis m’enfouis sous les draps.

— Debout, mademoiselle ! braille une petite voix. Il est l’heure !

Un soupir s’exhale de mes lĂšvres, je me redresse rapidement du lit. Je rĂ©flĂ©chis Ă  ce que j’ai fait la veille et tombe nez-Ă -nez avec la petite sƓur de Jagger.
Quelque chose m’interpelle soudainement.
— Bonjour, Beryn. Dis-moi, hier, qu’est-ce que j’ai fait ?
Je me souviens juste d’avoir rencontrĂ© la famille Sullivan, puis Kendrick, leur majordome, m’a fait visiter les lieux avec Beryn. Je suis allĂ©e dans ma chambre pour me changer, puis
 trou noir.

— On t’attendait pour dĂ©jeuner hier midi, mais je constate que le voyage t’a Ă©puisĂ©e puisque tu as dormi pratiquement toute une journĂ©e. Andrew m’a dit que, pendant le vol, tu n’avais pas dormi et que tu avais Ă©tĂ© malade.

Me suis-je vraiment Ă©croulĂ©e dans ce lit aprĂšs m’ĂȘtre changĂ©e ?

AussitĂŽt, je me relĂšve Ă  la hĂąte et coule un regard au fond de la piĂšce. Pas mal, la dĂ©co digne d’une princesse !

Le papier peint aux tons pastel orangĂ© habille les murs. Un bocal de fleurs repose sur le bureau blanc laquĂ©, en face du lit. Quelques armoires et commodes occupent l’espace. La chambre, au style contemporain, paraĂźt Ă  moitiĂ© vide. Des planches d'Ă©tagĂšres longent les murs, fixĂ©es solidement, oĂč des babioles et des bouquins sont parfaitement alignĂ©s. Au centre de la piĂšce, le baldaquin d’une teinte pĂȘche trĂŽne sur la moquette en velours blanc.

Beryn se bidonne, baisse aussitĂŽt les yeux sur ses jambes et serre nerveusement le bout de sa robe entre ses doigts.

— Il faut se dĂ©pĂȘcher, Sun. Ma mĂšre ne serait pas contente, si je tarde de trop pour prendre le petit-dĂ©jeuner.

Je lĂąche un long soupir. Je me lĂšve du plumard et balance les couvertures au pied du lit.

Je m’approche de ma valise, prends quelques fringues, puis embarque ma trousse de toilette.

Du bout du doigt, Beryn dĂ©signe la porte Ă  cĂŽtĂ© du pot d’Hortensia et indique que la salle de bain se trouve lĂ -bas. Je m’y rends afin de me prĂ©parer.

La douche rapide finie et aprĂšs avoir enfilĂ© mes vĂȘtements, j’ondule les pointes de ma tignasse blonde, applique une derniĂšre couche de mascara sur mes longs cils, puis prends le temps d’analyser mon reflet dans le miroir. Ça fera l’affaire ! Je sors et constate que Beryn n’a pas bougĂ© d’un millimĂštre, elle est toujours Ă  la mĂȘme place.

— Pourrais-tu prĂ©venir quelqu’un et demander de l’aide ? Ma roue a crevé  et je n’ai pas mon tĂ©lĂ©phone pour appeler ma maman ou mon grand-pĂšre.

J’acquiesce et me dirige vers le couloir, mais il n’y a aucun chat à l’horizon.

— Je vais essayer de trouver quelqu’un qui peut venir au plus vite, lui dis-je avant de quitter la chambre. Comme Ă  mon habitude, je me lance dans l’exploration des lieux, tentant de marquer des repĂšres. C’est encore plus grand que la villa oĂč j’habite !

Je tourne au coin du couloir quand un jeune homme Ă  la peau basanĂ©e fait un bond en me voyant. Le vase floral en porcelaine qu’il tenait entre les mains termine sa course sur le sol carrelĂ©, explosant en mille morceaux. Il jette un coup d’Ɠil dans ma direction avant de se gratter la tĂȘte, dĂ©pitĂ©.

— Je suis dans la merde, on va me virer !

— Mais qu’est-ce qu’il s’est passĂ© ici ?

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