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LylliaBrume
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Chapitre 11

Kay ajusta la position de sa main dans mon dos.
Ses doigts pressaient légèrement, pas pour me forcer, mais pour me guider.

Je sentis son autre main frôler la mienne, sans la prendre tout de suite.
Il me laissa le temps. Le choix.

Et moi… je le fis.

Je posai ma paume contre la sienne, doucement, comme si mon corps voulait dire d’accord, j’essaie.

La musique s’éleva. Une mélodie de piano douce, lente, comme une respiration à l’envers.

Nous commençâmes à bouger. Lentement.
Nos pas s’alignaient.
Kay ne me précédait pas, il m’écoutait. Il dansait avec moi, pas contre moi.

Sa main glissa de mon dos à ma hanche.
Je sentis ses doigts effleurer le tissu fin de ma tenue, et malgré moi, je frissonnai.

— Ça va ? souffla-t-il, sans s’arrêter.

Je hochai la tête.
Mais au fond, ce n’était pas que ça allait. C’était autre chose.

Je me sentais… perdue.
Pas de peur cette fois.
Mais de trouble.

Il se plaça derrière moi, nos mouvements devenant presque unis. Je sentais son souffle contre ma nuque, sa main droite glissant le long de mon bras pour enrouler la mienne dans une rotation lente.

Et puis… il se plaça devant.

Nos regards se croisèrent.
Et là, pendant une fraction de seconde, je perdis l’équilibre. Pas mon corps.
Mais ma concentration.

Son regard était trop franc.
Trop intense.
Pas un regard de partenaire de danse. Un regard de quelqu’un qui voit au-delà.

J’oubliai presque le mouvement suivant. Kay s’adapta, rattrapant ma main au vol, comme s’il savait que j’allais dérailler à cet instant.

— Respire, murmura-t-il. Je suis là.

Et c’est là que tout changea.

Il se pencha légèrement, passa sa main sous ma cuisse gauche, sa paume parfaitement posée sous mon genou.

— On va tenter le porté, chuchota-t-il.

Je relevai la tête, surprise.
— Maintenant ?
— T’as dit qu’on essayait.

Je sentis mes jambes se tendre, mes bras s’ouvrir doucement alors qu’il me guidait en hauteur.

Mon ventre se contracta, pas par peur, mais parce que pendant une demi-seconde, j’étais au-dessus du sol.
Dans ses bras.
Tenue.
Portée.

Le monde bascula.
L’air se fit plus léger.
Tout était plus flou, mais plus vrai.

Et quand je redescendis lentement, ses mains me guidant avec une précision infinie, je posai le pied au sol dans un silence parfait.

Ma respiration était irrégulière.
Pas à cause de l’effort.
Mais parce que quelque chose en moi venait de craquer.

Je reculai d’un pas, les joues brûlantes.
Il me regardait toujours. Silencieusement. Intensément.

Ses yeux noisette semblaient chercher quelque chose en moi, ou peut-être y lire ce que moi-même je n’arrivais pas à comprendre.

Mon souffle était court. Mon cœur battait trop vite.

Ses mains étaient encore posées sur mes hanches.
Et à cet instant, je ne savais plus si c’était le contact, le regard ou l’émotion du porté qui me faisait tout oublier du reste du monde.

La musique s’arrêta, juste sur notre dernier pas, comme si elle savait elle aussi qu’elle ne pouvait aller plus loin.

Derrière nous, Madame Farnier et Monsieur Ravel s’étaient levés, leurs applaudissements résonnant dans le studio vide. Sincères. Enveloppants.

Mais moi… j’étais encore figée.
Ses mains n’avaient pas bougé.
Je pouvais les sentir, fermes mais légères, ancrées dans ce qu’on venait de créer.

Kay murmura, dans un souffle presque imperceptible, sa voix chaude contre mon oreille :

Tu vois ? Tu as réussi.

Je déglutis, incapable de répondre.

— Je te l’ai dit, reprit-il. Je ne suis pas Julien. Fais-moi confiance.
Je ne te lâcherai pas.
On doit réussir cette danse. Ensemble.

Je fermai brièvement les yeux.
Ses mots étaient simples. Mais dans sa voix, il y avait une promesse.
Pas celle d’un garçon qui parle pour séduire.
Mais celle d’un partenaire. Un vrai.

Il me fit un petit sourire taquin, celui qui me faisait toujours lever les yeux au ciel… sauf que cette fois, mon cœur s’était un peu serré, au lieu de protester.

Puis il s’éloigna doucement, rejoignant les professeurs qui nous attendaient au fond de la salle, leurs carnets encore à la main.

Monsieur Ravel s’exclama, les bras écartés, visiblement enthousiaste :

— C’était incroyable ! Non, vraiment… je ne m’attendais pas à une telle évolution aussi vite. Vous avez offert une performance sincère, habitée. Ce n’est plus juste une technique. C’est devenu une émotion partagée.

Je restai immobile un instant, mes bras retombés le long du corps, encore un peu étourdie.
Une chaleur douce s’était logée dans ma poitrine… et refusait d’en sortir.

Kay, lui, semblait tout aussi surpris de l’enthousiasme du chorégraphe, mais il resta humble, se contentant d’un “merci” un peu discret.

Ravel se tourna vers moi avec un sourire complice.

— Elina, tu as un potentiel immense, mais parfois trop enfermé dans la rigueur. Et toi, Kay, tu l’équilibres, tu l’ouvres.
C’est ça qu’on cherche. Une fusion.

Puis il croisa les bras.

— Pour vous récompenser, je vous libère pour le reste de l’après-midi.

Un silence étonné passa.
Mais il n’avait pas fini.

— Enfin… pas totalement, dit-il en souriant. Kay, j’aimerais que tu montres à Elina quelques bases de hip-hop.

Je clignai des yeux, surprise.

— Hein ? Moi ?

Il hocha la tête, enthousiaste.

— Tu as un sens du rythme naturel, Elina. Et Kay, toi… tu es le meilleur élève du Conservatoire de danse urbaine de Paris.
Si Madame Farnier t’a accueilli ici, ce n’est pas seulement pour te faire apprendre notre rigueur, mais aussi pour nous faire découvrir ce que toi tu maîtrises.

Je restai interdite, un peu figée.

Danser en classique, je savais faire.
Mais… hip-hop ?
Avec Kay, en plus ?

— Je compte sur toi, ajouta Monsieur Ravel.
— Montre-lui ce que tu vaux, Kay. Et Elina… sois curieuse.

Kay hocha la tête avec un petit sourire.

— Ça marche. T’es prête, ballerine ?

Je levai les yeux vers lui.
Un peu perdue.
Un peu nerveuse.

Mais quelque chose en moi répondit avant ma bouche.
Quelque chose de plus libre. De plus ouvert.

Montre-moi. Prouve-moi que tu es le meilleur élève du conservatoire de danse urbaine.

Je regrettai presque mes mots aussitôt dits.
Pas parce que je ne les pensais pas.
Mais parce qu’il les accueillit avec ce petit sourire en coin, celui qui disait "Tu vas le regretter, ballerine."

— Comme tu veux, princesse.

Il se recula d’un pas, puis retira son sweat d’un geste fluide, révélant un débardeur noir simple qui laissait voir ses bras fins et puissants. Il s’étira un peu les épaules, roula la tête d’un côté à l’autre… et changea.

Vraiment.

Il n’était plus le même garçon que celui qui m’avait porté quelques minutes plus tôt.
Son corps bougeait autrement.
Plus ancré. Plus rapide. Plus libre.

Il alluma une enceinte portative dans son sac — je ne savais même pas qu’il en avait une — et lança une musique au rythme plus sec, plus percussif. Une ligne de basse entêtante. Des claps. Quelques sons électroniques.

Puis il se mit à danser.

Pas pour moi.
Pas pour impressionner.
Juste… parce qu’il avait ça en lui.

Ses mouvements étaient puissants mais souples.
Rythmés, précis, mais imprévisibles. Il alternait des gestes très saccadés avec des ondulations contrôlées. Il jouait avec l’espace, avec les temps, avec le silence entre les notes.

Et moi… je restais figée.

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