Elle ramena ses jambes sur son torse et se balança sur son tabouret en bois, en fixant sa toile blanche de ses grands yeux cernés.
— (J'ai pas fermé l'œil de la nuit, je n'en peux plus...)
Elle se gratta ses fissures écarlates jusqu'au sang, avant de siffler de douleur et de quitter sa pièce artistique. Elle remarqua que son lit était déjà fait et que ses raisins l'attendaient sur sa table ronde quand elle pénétra dans sa cuisine.
— (Mais ayant médité presque la moitié de la nuit, j'ai noté une petite amélioration. Je ne perçois plus le moindre bruit venant du Paradis Animalier, et je n'ai pas fait de cauchemars.)
— Miaou !
La sorcière grinça des dents et se crispant et toisa sa chatte du regard un instant, avant de se détendre en soupirant.
— Oui mon amour je vais te donner à manger, la rassura-t-elle en matérialisant son paquet de croquettes.
Elle lui versa dans son assiette et conjura son spectre pour disparaître sous son rideau étoilé, pour y réapparaître dans sa tenue de sorcière.
— On n'oublie pas le chapeau et c'est parti, soupira-t-elle avec appréhension. Je reviens Stella !
Elle décrocha une grappe de raisin et attrapa son couvre-chef posé sur son porte-chapeau, et quitta sa maison.
_____________________________________________
— Voilà donc c'est pour ça que vous avez vu des sorcières déambuler dans les rues il y a trois jours, conclut Lycair avec nonchalance.
Un silence de mort résonna dans la pièce et les mâchoires de ses élèves se décrochèrent.
— Mais comment autant de choses peuvent se passer en si peu de temps ?! S'exclama Olmar ahurit.
— Va savoir, lui répondit-elle en haussant les épaules. Alors aujourd'hui on va-
— Certainement pas, l'interrompit Heiric en peaufinant son patron.
Tous reportèrent leur attention sur leur camarade aux cheveux verts et l'enseignante haussa un sourcil en s'adossant contre son bureau.
— De quoi non ? Tu ne veux pas travailler ? S'enquit-elle en ricanant.
— Ce que je ne veux pas, c'est que VOUS travaillez, Lycair, articula-t-il en la pointant avec son aguille. Vous devriez vous reposer.
La courtière pouffa de rire et frotta ses yeux engourdis avant de s'asseoir sur son bureau.
— C'est gentil de t'en faire pour moi mais je vais bien, mentit-elle en souriant faiblement. Je t'assure, je ne suis pas fatiguée.
— Mais vous vous êtes vu ? S'exclama Elerinna angoissée. Vous avez des cernes marqués, vous n'avez plus aucune force dans les bras et vous titubez quand vous marchez. Vous dormez même debout ! S'esclaffa-t-elle outrée.
Ses autres élèves hochèrent la tête pour affirmer ses propos et l'enseignante éclata de rire jusqu'à en avoir les larmes aux yeux.
— Non mais je rêve, constata-t-elle épuisée. Je me fais sermonner par mes propres élèves.
Elle se leva et matérialisa son paquet de cartes pour s'amuser avec l'une d'entre elles en passant dans les rangs.
— Et qu'est-ce que vous vous voulez que je fasse ? Leur demanda-t-elle en faisant un mélange américain. Quand les cours finissent je dois participer aux reconstructions et il faut que je trouve un moyen d'aider Hucral.
— Qui va vous envoyer balader si elle vous voit dans cet état, la coupa Olmar en incrustant une broche à sa tenue. Oui vous pouvez me regarder comme ça, vous savez aussi bien que moi que c'est vrai. Elle va vous renvoyer chez vous ou vous forcer à dormir.
L'annihilatrice céleste rouspéta et fit disparaître ses cartes pour mettre ses mains dans ses poches.
— Bon vous savez quoi, puisque vous n'allez pas me lâcher et qu'on a bien avancé dans vos projets, déclara-t-elle en renonçant à leur résister. On va pratiquer jusqu'au déjeuner, puis je vous libère pour que j'aille aider aux travaux au moins une bonne demi-heure avant que je ne rentre à la maison pour dormir. Ça vous convient ? Leur demanda-t-elle en les regardant blaser.
Ils lui décochèrent un petit sourire machiavélique et satisfait avant de hocher la tête et de retourner à leurs travaux.
— (Même si je feins d'être agacée par leurs reproches et leurs remarques, en réalité ça me touche qu'ils s'inquiètent autant pour moi. J'ai vraiment de la chance.)
_____________________________________________
Elle fit apparaître son katana et frappa le clou de toutes ses forces sous le regard ahuri du roi.
— Hucral vous savez qu'on a des marteaux, lui rappela-t-il tandis qu'elle tapa plus fort.
— Sans blague, rétorqua-t-elle avec sarcasme. Désolée Majesté mais vos "marteaux" sont aussi solides que les hochets qu'on donne aux bébés.
Depuis bientôt 6 h 30 que la sorcière frappa des clous et des poutres en bois avec son sabre et ses poings. Elle s'était d'abord rendue à la Terre des Fées pour restaurer la magie de la forêt des murmures, avant de reconstruire les habitations avec son arc du temps. La divinatrice en avait aussi profité pour refabriquer les médicaments pour sa sœur, avant de s'entraîner avec Othara, qui avait retrouvé sa magie après la mort Krysia.
Elle avait ensuite passé le déjeuner en compagnie des vampires et des humains en se goinfrant de spécialités locales et de vin à l'hibiscus pour essayer d'oublier les bruits qui heurtèrent son esprit meurtri. La faux du silence s'était rendue au Cimetière des Interdit pour vérifier si elle sentait toujours la présence d'âmes, avant d'attaquer les réparations avec son arc du temps. Cependant, la Tribu des Elfes fut le seul endroit où elle ne pouvait se servit de ses sorts trop extravagants. Elle coinça un autre clou entre ses lèvres gercées et recula pour s'assurer que ses poutres furent droites.
— Merci beaucoup, la remercia une femme rousse en s'extasiant devant son travail propre.
L'apothicaire se retint de pleurer de nerfs à l'entente des sons qui la transpercent et donna un dernier coup, avant de faire disparaître son arme.
— Il n'y a pas de quoi, ricana-t-elle avec un faible sourire. Ça me fait plaisir d'aider.
Elle quitta la demeure de la veuve en emboîtant le pas au roi des elfes, qui les mena aux tours.
— Je vous prie de m'excuser Hucral, l'implora-t-il en s'arrêtant devant la tour de cuivre. Vous n'avez pas pu utiliser votre magie du temps pour aider mes sujets.
— Ne vous préoccupez pas pour si peu Majesté, le consola-t-elle en conjurant son spectre. Je sais que les sorcières sont mal vues à cause de Krysia, et ça ne s'est pas arrangé avec sa réapparition et la résurrection de ses consœurs. Mais au moins, j'ai pu mettre mes compétences de maçonne à l'épreuve.
Elle répara les fissures qu'avait engendré Lycair lors de son ascension, sous le regard inquiet du roi.
— Comment vous sentez-vous aujourd'hui ? Vous êtes toujours en colère ? S'enquit-il avec appréhension.
— Oui mais mon plan euthymique m'a un peu canalisé cette fureur, et je n'entends plus bruits de l'océan et du Paradis Animalier. Cependant les autres sons sont amplifiés et je vous avoue que je commence à m'énerver et à perdre patience, articula-t-elle froidement.
Il s'apprêta à la consoler quand la sorcière sentit l'âme de Lycair quitter la tour d'argent. Tandis que la couturière marcha lentement dans ses pensées, elle courut en puisant dans ses dernières forces quand elle aperçut au loin la chevelure écarlate de sa petite amie.
— Hucral !
Elle se jeta dans ses bras inquiète, avant de voir la divinatrice se crisper et grincer des dents.
— Oh pardon, s'excusa-t-elle en murmurant. J'avais oublié.
— Ce n'est pas grave tout va bien, la rassura-t-elle en l'embrassant furtivement. Pardonnez-moi Majesté mais je vais m'arrêter là pour aujourd'hui, je suis épuisée.
— Je comprends totalement Hucral, je vous suis reconnaissant pour votre présence, la remercia-t-il en s'inclinant.
Alors qu'il retourna au palais, Lycair entrelaça leurs doigts et la regarda de ses grands yeux.
— Ne me dis pas que tu as déjà tout réparé ? S'enquit-elle en jetant un coup d'œil au continent tout en marchant.
— Non pas du tout. J'ai seulement aidé Tania et les vampires en retapant quelques maisons et une partie de l'école de magie. Ah oui et les fissures de la tour de cuivre, ajouta-t-elle en lui donnant un coup de coude taquin.
Elles traversèrent le pont magique et se baladèrent en profitant du paysage tout neuf de la Nation des vampires.
— D'ailleurs, ce vin à l'hibiscus est un pur délice, lui confia-t-elle déjà nostalgique de son goût. Ça te dit qu'on aille boire un verre ce soir ? Peut-être que l'alcool pourra m'apaiser, qui sait.
Quand elles atteignirent le continent de la sorcière, elles continuèrent leur chemin avant que la faux du silence ne s'étende dans l'herbe fraîche qui berça son lac.
— Mhm excellente idée, approuva Lycair en humant les fleurs jaunes. J'avoue que j'ai oublié son parfum.
Hucral lui décocha un petit sourire timide et entrelaça leurs doigts, avant de fredonner sa mélodie habituelle en regardant le ciel bleu. Le vent frais balaya les fleurs et caressa leur visage, apaisant la sorcière qui ferma les yeux avant de soupirer. Lycair tourna la tête vers elle et la regarda en sentant une vague de bonheur envahir son estomac, avant que sa petite amie ne réouvre les yeux. Sans un mot, elle lui sourit de toutes ses dents et les téléporta chez Lycair, dans sa chambre.
— Tu dors à la maison ce soir ? Lui proposa la sorcière en caressant Athéna.
— Avec plaisir ! Je prends mes affaires et tu nous y renvoies !
Quand elle rassembla ses affaires et son pyjama, elle les ramena dans sa demeure à l'entrée de la salle de bain.
— Bon le temps que tu poses tout je vais à la douche ? S'enquit-elle en ouvrant la porte.
— Attends je viens avec toi, l'informa-t-elle en souriant.
Tandis que l'elfe referma la porte en la dévorant des yeux, la divinatrice lui tourna le dos en enlevant son corset, avant de retirer sa jupe et de faire glisser ses collants le long de ses jambes.
— Au lieu de me mater déshabille-toi et viens, la taquina-t-elle en entrant dans la douche. Sinon j'y vais sans toi.
— Pff, si on peut même plus regarder tranquille, rouspéta-t-elle d'un sourire en coin.
Alors que l'eau s'écoula sur leur corps, un cri de douleur se fit entendre dans la pièce.
— Aïe Lycair tu as fait tomber la brosse sur mon pied ! Lui reprocha-t-elle.
— Si tu arrêtais de prendre toute la place aussi ! Rétorqua-t-elle en attrapant la bouteille.
— Ces cheveux à la noix ! S'exaspéra-t-elle en brossant sa crinière écarlate.
— Tu m'as donné un coup de coude dans les cotes Hucral ! J'aurais dû aller dans la baignoire !
Quand elles sortirent de la douche, elles se regardèrent désespérées en se mettant leur serviette, avant de soupirer.
— Il faudra songer à faire des travaux, maugréa Lycair en la suivant dans sa chambre, histoire qu'on est un peu plus de place.
La sorcière ricana pour acquiescer et fit défiler ses cintres en rêvant, ne sachant pas quoi porter.
— Je mets quoi ?
Elle se retourna pour avoir son avis quand la protectrice de la mémoire la plaqua contre sa commode, en la regardant intensément. Quand elle effleura sa poitrine avec ses doigts, la divinatrice écarquilla les yeux avant de gigoter dans tous les sens.
— Arrête ça chatouille ! S'esclaffa-t-elle en étouffant son rire.
— Je rêve ou Hucral Naught est craintive ? S'étonna-t-elle avec une lueur de malice dans le regard.
Elle reprit ses chatouilles et sa petite amie partie à rire en essayant de s'échapper en se jetant sur son lit simple.
— Je te tiens Hucral ! Prôna-t-elle en dirigeant ses doigts sur sa taille.
— Non au secours ! Hurla-t-elle en se tordant de rire. Un jour je me vengerai Lycair Howl je peux te le garantir !
Quand la protectrice de la mémoire arrêta son supplice en étant satisfaite, elle s'aperçut qu'elle se trouva à califourchon sur la divinatrice, qui n'avait que sa serviette autour de son corps séduisant. Épuisée après avoir tant ri, le souffle de la faux du silence se saccada en voyant leur position qui la fit frissonner.
— (Par l'origine, elle est si belle vue d'ici. J'en oublie les bruits autour de moi.)
— (La dernière fois qu'on s'est embrassée, c'était avant la bataille. Ses lèvres me manquent tellement.)
La tension entre elles grimpa et Lycair commença à sentir le plaisir l'envahir quand Hucral posa ses mains froides sur ses hanches pour l'admirer d'un désir obsessionnel.
— Tu pourrais mettre ta chemise marron qui te sert à la taille, lui suggéra-t-elle en soupirant d'extase face à ce simple toucher.
— Celle avec les manches longues en dentelles ? S'enquit-elle sensuellement.
L'elfe hocha la tête et la divinatrice se redressa pour caresser ses cuisses ardentes de ses doigts soyeux, qui firent tourner la tête de la chasseuse.
— Avec ton pantalon noir et... tes escarpins rouges..., lui conseilla-t-elle en se mordant la lèvre inférieure en s'éloignant.
— À vos ordres ma reine.
Elle attrapa sa chemise et noua sa serviette autour de sa taille, en regardant Lycair qui fixa ses seins sans s'en cacher.
— C'est trop mignon, la complimenta-t-elle d'un sourire amusé. Le droit est plus grand que le gauche.
La sorcière ricana et laissa sa chemise décolletée avant de lui tourner le dos pour faire tomber sa serviette sur le sol. L'enseignante arqua un sourcil et croisa ses bras brûlants tandis que sa petite amie se racla la gorge en se retenant de rire.
— Je suis un peu pudique, imita-t-elle d'une voix aiguë en se mordant le bout de son doigt.
— Oh je sais, c'est Umel ! Devina-t-elle en claquant ses doigts de son regard élargit.
— Oui !
Elles éclatèrent de rire avant de retourner dans la salle de bain pour qu'Hucral crunche ses ondulations avec du gel coiffant. Sans aucune discrétion, l'annihilatrice céleste la regarda se parfumer et réaliser son liner inversé, qui l'obséda jour et nuit.
— J'adore quand tu me dévores du regard comme ça, s'extasia-t-elle en mettant un gloss nude.
— Tu aimeras encore plus quand je vais te dévorer tout court, laissa-t-elle sous-entendre d'un sourire satisfait.
La sorcière rougit avant d'attraper le menton de sa partenaire, qui sursauta face à leur proximité.
— Ah oui ? Dans ce cas j'attends ce moment avec impatience, lui susurra-t-elle sensuellement en lui embrassant son cou une fraction de seconde.
Prise à son propre piège, c'est finalement l'enseignante qui devint rouge écrevisse en ayant encore la sensation des lèvres d'Hucral sur sa peau. Elle cligna plusieurs fois des yeux et se dirigea dans la chambre pour se changer, avant de revenir pour se mettre face à la sorcière.
— Tu en penses quoi ? Lui demanda-t-elle en tournant sur elle-même.
La couturière porta un bustier blanc à bretelles qui lui arriva à la taille, orné de broderies et de finitions en dentelles dorée sur les bordures et le centre de son haut. Son pantalon lavande satiné, assorti à ses escarpins bleu nuit, posséda une ceinture de la même matière nouée sur le côté, avec des broderies blanches au bas. La faux du silence se mordit sa lèvre inférieure et refréna son envie de l'embrasser quand elle la scruta en train de définir ses cheveux blonds avec une crème coiffante.
— J'adore quand tu me dévores du regard comme ça, répéta-t-elle d'un sourire satisfait en la coinçant contre son comptoir.
Elle colla sa poitrine contre la sienne et la joaillière haleta avant de sentir sa température corporelle monter face à ce contact qui la fit frissonner. Leurs lèvres se frôlèrent avant que celles de Lycair ne descendent dans son cou, lâchant un soupir d'extase à Hucral.
— C'est ma dose hebdomadaire contre le stress ? Marmonna-t-elle en rejetant la tête en arrière.
— Tout juste ma sorcière, lui confirma-t-elle en l'embrassant une dernière fois avant de s'éloigner. Ça ne va pas être trop dur pour toi tout ce bruit ?
La divinatrice les téléporta devant l'entrée du bar, qui afficha toujours cette même affiche, avant d'entrelacer leurs doigts.
— Nous allons voir ça, répliqua-t-elle avec un sourire en coin.
La clochette retentit et elles s'installèrent sur les grands tabourets du comptoir, ou Lycair tapota ses ongles lavande en amandes. Voyant que le barman était toujours le même qui l'avait servi il y a déjà plus de trois millénaires, un grand sourire se dessina sur son visage, rappelant à la sorcière que ce lieu servait de repaire pour sa rébellion d'autrefois.
— Mam'selle Hucral ça m'fait plaisir d'vous r'voir ! L'accueilli-t-il de vive voix. Et j'vois qu'vous avez ramené quelqu'un pardi ! Alors, qu'est-ce que j'vous serre ce soir ?
— Du vin à l'hibiscus s'il vous plaît ! S'exclamèrent-elles à l'unisson.
— J'vous donne ça de suite !
Tandis qu'il remplit leurs verres en sifflotant, Hucral sentit des paires d'yeux se braquer sur elles, ce qui la préoccupa. Elle inscrit discrètement une rune sous le comptoir et remercia le barman d'un sourire sincère et chaleureux.
— Santé, trinquèrent-elles en se regardant passionnément.
La sorcière savoura ce nectar qui la transporta dans une autre dimension, sans pour autant se défaire de ce poids sur ses épaules.
— (Lycair tu va peut-être me trouver paranoïaque à cause de mon état, mais je n'arrive pas à me défaire de ceux au coin du bar qui nous fixent.)
— (Je les sens aussi ne t'en fais pas. Par contre comment on peut parler par télépathie ? Je croyais que les effets du rituel s'étaient dissipés ?)
— (C'est le cas, c'est pour ça que j'ai dessiné une rune en douce. Je te rappelle que mon rituel sert à renforcer mes pouvoirs, parce que d'ordinaire je n'aurais pas pu communiquer aussi loin de toi quand on se battait.)
La table de cinq se leva pour se diriger vers le couple qui sirota leurs verres en entrelaçant leur main sur le comptoir, les ignorant délibérément.
— Hucral, ça fait du bien de vous revoir, l'accosta un humain aux cheveux noirs.
— Le plaisir est partagé, répondit-elle élégamment d'un faible sourire en croisant ses jambes avant de prendre une autre gorgée.
— Je vois que vous avez de la compagnie ce soir, remarqua-t-il en jetant une œillade à l'elfe qui les ignora toujours. Je n'aurais jamais cru que vous remplaceriez la princesse Lycair aussi facilement.
Le brouhaha qui anima le bar se tut et le barman posa son verre encore sale, pour regarder son client du coin de l'œil sans oser bouger.
— Êtes-vous venue pour simplement discuter ou pour me déranger ? Lui demanda-t-elle froidement en posant son verre sur le comptoir. Parce que je ne suis pas sûre que vous voulez que je me mette en colère.
— (Surtout qu'elle est déjà suffisamment crispée depuis qu'elle est revenue du néant, et que ça va être à moi de gérer sa crise.)
Voyant que le barman lui resservit du vin qu'elle bue d'une traite, l'humain reporta son attention sur la couturière qui croisa enfin leur regard.
— Puis-je vous demander votre nom ? S'enquit-il sous le regard meurtrier de la sorcière aux cheveux écarlates.
— Non désolé, refusa-t-elle poliment en prenant une gorgée. Maintenant si vous voulez bien m'excuser, j'aimerais profiter d'une soirée tranquille avec ma femme.
L'homme écarquilla les yeux et bafouilla des excuses incompréhensibles avant de les laisser tranquilles.
— Un autre verre ma reine ? Lui demanda le barman tout bas.
Le couple le fixa ahurit et l'elfe se pencha sur le comptoir pour se rapprocher de lui.
— Comment vous savez ? S'alarma-t-elle sous le même timbre de voix.
— Hucral est non seulement une cliente agréable mais aussi une sorcière qu'on connait très bien, lui confia-t-il en ricanant. Si elle rev'nait ici avec quelqu'un, ça s'rait forcément avec votre réincarnation.
Ses joues s'empourprèrent et le barman partit dans la réserve, avant de revenir avec une bouteille à la main pour les resservir.
— Avant que vous n'posiez la question, certains d'entre nous aspirent toujours à la loi et espèrent qu'vous remontiez sur le trône pour diriger le royaume, l'informa-t-il préoccupé. Mais-
— Hors de question, intervint Hucral en fronçant les sourcils.
Voyant que son verre commença à se fissurer au fur et à mesure qu'elle le serra, elle soupira pour se calmer et l'éloigna d'elle.
— Même si elle était un vampire autrefois, aujourd'hui c'est une elfe libre, ce qui fait elle n'a plus rien à voir avec les règles qui bâtissaient ce royaume, prôna-t-elle fermement en serrant son poing sur le comptoir. Donc ils peuvent continuer à hic espérer... (J'ai envie de faire apparaître mon sabre et de faire la peau à tous ceux qui pensent la même chose, ça me démange. Mais elle m'a appelé ma femme, je peux mourir en paix.)
Le barman ria à gorge déployée tandis que la joaillière sentit les effets de l'alcool monter, en commençant à avoir la tête qui tourne et les joues roses.
— Vous en faite pas mam'selle Hucral, tout l'monde sait qu'ça sert à rien d'espérer. Et puis vous méritez de vivre tranquillement après tout c'qui s'est passé, déclara-t-il en s'adressant à Lycair avec un grand sourire. Surtout qu'vous êtes enfin réunis toutes les deux !
— De toute hic manière, hoqueta-t-elle en ayant de plus en plus chaud, si vous êtes pas content hic, je vous tue tous. Parce que hic Parce que personne- WAOUHH, maugréa-t-elle en s'attrapant la tête, il est super fort ce hic cet alcool. D'habitude je tiens bien mais là... hic.
Saoule, la sorcière fixa sa petite amie de ses pupilles dilatées, avant d'écarquiller les yeux.
— Pourquoi tu me regardes comme ça ? S'enquit-elle confuse.
— Par l'origine qu'est-ce que t'es belle~ hic, la complimenta-t-elle en la regardant amoureusement. En plus tu m'as appelé ma femme. Comment je peux sortir avec un canon pareil hic sérieux...
L'enseignante rougit sans pouvoir retenir le grand sourire timide qui se dessina sur son visage, avant de soupirer en ricanant.
— Et si on rentrait à la maison ? Lui proposa-t-elle en passant son bras autour de son cou. Tu es un peu ivre Hucral. (Surtout que la dernière fois qu'elle était comme ça, elle s'était déhanchée avec les danseuses de mon bar d'antan. Mais je ne me rappelais pas qu'elle avait l'alcool amoureux, c'est mignon.)
— Oh tu hic trouves ? Articula-t-elle en étouffant son rire presque incontrôlable. Bon d'accord, si tu le dis mon amour~ SALUT BRANDER ON S'REVOIE hic BIENTÔT MEC ! Le remercia-t-elle en agitant son bras avec un grand sourire.
Alors qu'elles quittèrent le bar et se dirigèrent vers le pont pour prendre l'air frais, la faux du silence ricana avant de marmonner quelque chose d'incompréhensible et de repartir à rire.
— Lycair~, l'interpella-t-elle en titubant malgré son soutien. Tu m'aimerais toujours même si j'étais un ver de terre ?
— Hucral, je t'aime alors que tu m'as tué dans ma première vie, lui rappela-t-elle blasée et amusée à la fois. Je pense que la question ne se pose même pas.
— Ehehe... ah ouais c'est vrai~