Loading...
Link copied
Loading...
Loading...
Mark all as read
You have no notification
Original
Fanfiction
Trending tags

Log In

or
@
Myfanwi
Share the book

Chapitre 13 : Un pas de trop - Partie 1

Sans se figea à l'entrée de Snowdin, nerveux. Jusqu'à il y a peu, il pensait connaître la ville sur le bout des doigts, mais toutes ses certitudes semblaient avoir pris leur indépendance. Quelle idée il avait eu de dire à Grillby qu'il viendrait ce matin. Il prit une grande inspiration et fit quelques pas dans la neige. Il avait préféré se téléporter loin afin d'assurer ses arrières et éviter les problèmes, mais le bar avait l'air si loin qu'il regrettait déjà sa décision.

Son regard se porta en premier lieu sur l'énorme tas de débris qui fut un jour sa maison. Le rez-de-chaussée était plus ou moins intact, mais tout ce qui se trouvait dessus s'était effondré à l'intérieur. La puissance de l'explosion se ressentait dans les alentours. Plusieurs arbres avaient été soufflés et gisaient au sol, brisés en deux. Le « chenil » de son frère avait aussi été démoli entièrement. Il n'en restait que les grilles censées retenir les prisonniers à l'intérieur, toujours debout par miracle. Il ressentit un drôle de pincement en regardant ce désastre.

Cette maison, il l'avait payée à la sueur de son front. Pendant longtemps, son frère et lui avaient vécu dans la rue. Sans avait enchaîné de nombreux boulots pour se permettre de payer le loyer. Il y avait moins cher du côté de Nouvelle Maison, surpeuplée, mais Sans avait insisté pour s'installer ici afin de permettre à Papyrus de réaliser son rêve d'entrer dans la garde royale, ce qui passait forcément par Undyne. Il ne restait plus rien, à l'exception d'un vieux tupperware de spaghettis qui traînait dans la neige. Le squelette soupira. Il savait que la reine trouverait une solution, peut-être même les fonds pour rebâtir, mais cela prendrait des semaines.

Sans contourna les débris pour atteindre l'arrière de la maison. Des escaliers, peu cachés à présent, descendaient vers le sous-sol. Il sortit la clé de sa poche et entra. La lueur familière de l'imposante machine qui s'y trouvait l'accueillit. Hormis une grande fissure au plafond, rien n'avait bougé ici. Par mesure de sécurité, il récupéra cependant tous les papiers qui se trouvaient dans le bureau. La dernière chose dont il avait envie étaient que ses recherches tombent entre de mauvaises mains. Il enfourna tout dans le sac qu'il avait emporté avec lui et quitta la pièce. Il prit quelques minutes pour fouiller les décombres et récupéra en plus une couverture humide et quelques vêtements qui avaient été propulsés en dehors de l'habitation, ceux qui n'étaient pas troués ou brûlés en tout cas.

Alors qu'il revenait dans la rue principale, il s'aperçut qu'il était observé plus loin, devant la librairie. Plusieurs monstres discutaient à voix basse. Sans passa prudemment devant eux. Hormis un regard noir qui lui arracha un frisson, ils ne firent rien, à son grand soulagement. À grandes foulées, il poursuivit sa route vers l'échoppe de Grillby.

Il marqua le pas devant l'état de la façade. Les vitres, brisées, avaient été remplacées par des sacs plastiques. La porte était couverte d'insultes qu'on avait essayé de frotter sans succès et plusieurs lettres de l'enseigne avaient disparues sous les jets de cailloux. Sans eut un pincement au cœur. Grillby n'avait rien fait pour mériter ça. Ce n'était pas juste de lui faire payer ses propres décisions.

Malgré la chaleur, ce fut un silence glacial qui l'accueillit. Les sentinelles n'étaient pas là, hormis Dogaressa, qui somnolait sur sa table, le bras bandé. Les autres habitués des lieux le saluèrent mollement, mais le cœur n'y était pas. Seul le tenant des lieux esquissa un sourire chaleureux et l'invita à s'asseoir à sa place habituelle devant le comptoir. Sans s'avança. Il donna une petite tape amicale dans le dos de Dogaressa, qui lui rendit son sourire, puis s'installa sur un des tabourets devant le bar. Grillby se retourna, puis posa une assiette avec un hamburger et une bouteille de ketchup devant lui.

— Cadeau de la maison, dit le tenancier avec un air malicieux. Tu es en retard, je peux le remettre un peu à chauffer s'il est froid.

— Il est très bien comme ça. Et puis...

Grillby leva les yeux au ciel quand Sans versa la moitié de sa bouteille de ketchup sur le pain, avant de boire cul sec ce qui restait dans le contenant. Il ricana devant l'air désespéré du tenancier. Au moins, il se sentait mieux. Le bar de Grillby le faisait se sentir comme hors du temps. Le monde bougeait tout autour de lui, mais rien ne changeait jamais ici. Il s'agissait d'une des raisons pour lesquelles Sans était tant attaché à ce lieu.

— Tu as l'air plus en forme qu'hier. Mieux dormi ?

— Oui, avoua Sans d'une petite voix. Je ne sais pas si les tensions ont vraiment été apaisées hier soir, mais je me sens un peu plus prêt à faire face à ce qui arrive. Les choses se tassent.

— Je l'espère. Tu ne mérites pas ce qui arrive. Et j'espère que tu as conscience que tu n'es pas seul dans cette galère. Si tu as besoin de parler, je suis là. Ne... Ne garde pas tout pour toi, Sans. Je sais que tu as une sale habitude de mentir pour garder la face, mais des jours compliqués s'annoncent et plus que jamais, nous avons besoin de compter les uns sur les autres. D'accord ?

Sans détourna le regard et ne répondit pas, ce que Grillby prit heureusement pour un « D'accord. ». Après ça, la discussion dévia sur des sujets plus légers : la fille de Grillby, Papyrus, le travail. Le squelette retrouva presque le sourire, ravi que sa vie retrouve enfin un semblant de normalité. Malheureusement, cet instant était condamné à se finir abruptement.

Le son de la cloche précéda l'ouverture de la porte. Plusieurs monstres entrèrent dans un silence pesant. Ce n'était pas les habitués de Snowdin, et Sans comprit de suite qu'ils ne venaient pas pour boire un verre. Sans continua de manger en silence et de les ignorer, dans l'espoir que cela suffise à le rendre invisible à leurs yeux. Il pouvait voir que Grillby était tendu, mais il refusait de se retourner. Il savait déjà pourquoi ils étaient là. Les monstres s'installèrent au comptoir sur les tabourets, de chaque côté de Sans. Le squelette aurait aimé disparaître.

— Qu'est-ce que je vous sers ? demanda Grillby d'un ton froid.

— Je ne sais pas, répondit un des monstres. Pourquoi pas le squelette, là, sur un plateau ?

Les autres éclatèrent de rire, et l'un d'eux donna une pichenette sur le crâne de Sans. Le squelette sursauta. Grillby sourit avec mépris.

— Si vous ne commandez rien, merci de quitter le restaurant. La salle est réservée à la clientèle.

— D'accord, on s'en va.

Du coin de l'œil, Sans vit le monstre à sa droite faire un signe de tête, puis il se releva. Il crut son calvaire terminé quand sa vision s'obscurcit brusquement. Surpris, le squelette fut violemment tiré en arrière, un sac sur la tête, et traîné sur le sol. Paralysé par la peur et sous le choc, il ne parvint pas à se téléporter. Il entendait Grillby crier, tout comme Dogaressa. On le relâcha brusquement. Dans le brouhaha, Sans sentit des boules de chaleur passer au-dessus de lui. Terrifié, il se recroquevilla sur lui-même, les mains sur la tête, et attendit que la tempête passe, le cœur battant à tout rompre. Un coup de pied lui comprima le torse et il sentit son unique point de vie dégringoler à toute vitesse. Un autre coup et il était fini. Il l'espérait, presque. Un autre coup et il aurait enfin la paix.

— Et que je ne vous revois plus ici ! hurla Grillby.

La porte claqua, faisant vibrer les murs de l'auberge. Sans sentit une main douce se poser sur son bras. Ce n'était pas Grillby, il pouvait l'entendre marcher à côté de lui, au téléphone.

— Votre Majesté ? C'est Grillby. Sans vient de se faire agresser dans mon établissement par quatre monstres. Ils sont en fuite. J'ai leur description et des témoins, si Undyne peut passer. Oui... Oui, il a l'air d'aller bien. Physiquement en tout cas. Mais avec son unique point de vie, l'avis du docteur Alphys serait bienvenue. Très bien. On vous attend.

Dogaressa tira lentement le sac de la tête de Sans. Le squelette ne bougea pas, les bras cachant toujours ses orbites.

— Sans, tu m'entends ? demanda-t-elle gentiment. C'est terminé, ils sont partis.

— Quelle bande de sauvages ! grogna un des clients. Snowdin, c'est plus ce que c'était.

— Que tout le monde garde son calme, demanda Grillby. La garde royale arrive. Si vous pouviez rester encore quelques instants, le temps qu'on puisse prendre vos témoignages, ce serait gentil.

Sans n'entendait que du bruit. Le souffle court, il refusait de se remettre debout. Il entendit vaguement Grillby demander de ne pas le toucher pour l'instant, au cas où il avait quelque chose de cassé. Dogaressa retira son manteau et le posa sur ses épaules. Elle souleva sa tête avec précaution et la posa sur ses genoux. Et elle parla. Elle lui parla de tout et de n'importe quoi, de son frère, de Toriel, de Grillby, de souvenirs du passé et de bâtons après lesquels Papyrus courait. Sa voix calme et bienveillante le calma peu à peu, mais il se tendit de nouveau quand la porte s'ouvrit et qu'une voix qu'il avait tout sauf envie d'entendre à ce moment retentit.

— J'ai fait aussi vite que j'ai pu, lâcha Undyne dans un souffle.

— T-Tu peux me poser maintenant.

— Oh oui ! Il y a d'autres blessés à part Sans ?

— Non, tout le monde va bien. En revanche, j'ai touché un des agresseurs à l'épaule, dit Grillby. J'ai... J'ai été obligé d'attaquer, ils allaient traîner Sans dehors.

— D'accord, ça nous aidera à le retrouver. Al', tu t'occupes de Sans ? Je vais m'installer à une table et prendre les dépositions. Dogamy, Lesser, surveillez la porte. Je ne veux aucun curieux dans le coin. La reine et Papyrus arrivent dans une quinzaine de minutes.

Alphys s'accroupit à côté de Sans et de Dogaressa, qui continuait de lui parler à voix basse. La femme lézard toucha légèrement le bras de Sans, le squelette sursauta et le recula hors de sa portée.

— Il a p-parlé depuis l'attaque ? demanda Alphys.

— Non. Je pense qu'il est conscient, mais il ne répond pas.

— Il d-doit être en état de c-choc. Il est blessé quelque part ?

— Je ne sais pas, je n'ai pas osé le toucher.

— D'accord. S-Sans ? Tu m'entends ? Je v-vais ouvrir ton gilet. Ne t'inquiète p-pas.

Plus facile à dire qu'à faire. Alphys repoussa lentement son bras. Sans ne réagit pas plus, alors elle se dépêcha d'ouvrir son gilet et de soulever son T-shirt. Les deux femmes émirent un souffle qui lui indiqua que quelque chose n'allait clairement pas.

— Je ne p-peux pas r-réparer ça ici. Il faut l'évacuer à N-Nouvelle Maison. Je vais le s-stabiliser et ensuite on l'emmène.

— Il doit souffrir le martyr.

— Je ne crois pas. Il est en é-état de choc, il ne s-sent sans doute rien pour l'instant. Et j'espère q-que ça restera comme ça jusqu'à Nouvelle M-Maison parce qu'il faut qu'il reste c-conscient. Undyne ? Il me f-faut une civière en u-urgence et un matelas g-gonflable.

— J'envoie un message à Papyrus pour qu'il les récupère au magasin de madame Pompon.

Alphys tira le bras de Sans vers elle. Le squelette suivit son mouvement des yeux. Elle posa une main sur sa poitrine, et lentement fit glisser son âme hors de son torse. Comme elle le craignit, Sans ne réagit pas non plus malgré l'offense qu'elle venait de commettre en faisant sortir son âme sans demander la permission.

— Maintiens-lui les b-bras, demanda Alphys à Dogaressa. Il est peut-être en é-état de choc, mais il r-risque de sentir ça.

Sans sentit son âme battre plus fort lorsqu'elle approcha une énorme aiguille de son organe vital. Ses instincts de survie se manifestèrent enfin et il rua soudainement, avant de se rendre compte qu'il était entravé de ses mouvements. Il paniqua, supplia, mais Alphys enfonça malgré tout l'aiguille. Le squelette poussa un hurlement déchirant, qui fit sursauter Undyne et Grillby. Soudainement, ce fut comme si toutes les sensations qu'il avait refoulées depuis le début de l'attaque lui revenaient. Il sentit une douleur lancinante à sa poitrine, mais Dogaressa le maintenait fermement au sol pour l'empêcher de toucher.

Vulnérable et paniqué, le squelette fit la seule chose qu'il savait faire : fuir. Sa magie se déclencha de manière incontrôlée, et malgré les cris d'alertes d'Alphys et Dogaressa, il se téléporta.

Il ne comprit que ce n'était pas une si bonne idée que lorsque son corps tout entier s'enfonça dans la neige et que le froid et l'humidité transpercèrent son gilet resté ouvert. Sans tomba sur le dos et gémit de douleur, les mains serrant ses côtes. Il se sentait épuisé, vidé de son énergie. Il avait mal. Il décida d'abandonner, comme toujours, et ses yeux se fermèrent d'eux-mêmes.

Comment this paragraph

Comment

No comment yet