- Tu veux que je prenne le relais?
- T'inquiète... Je peux encore le porter quelque temps. Je suis plus endurant que toi, et je n'ai pas besoin de boire autant, ni de manger autant... Donc garde ton souffle.
Des voix inconnues qui ne lui semblaient pas si inconnues résonnaient dans sa tête, sans qu'il puisse pour autant mettre un sens sur les phrases prononcées, ni de noms sur les deux voix qu'il venait d'entendre. Était-ce vraiment une langue qu'il connaissait? Sa tête le lançait, et malgré l'inconfort, il parvint à ouvrir les paupières. Il poussa un faible gémissement lorsque le Soleil rencontra ses pupilles encore fragilisées par l'obscurité morbide du cachot dans lequel il avait passé la nuit. Ce ne fut que lorsque le balancement s'arrêta soudainement qu'il en prit réellement conscience. On posa ses fesses sur un sol granuleux et chaud, presque trop chaud. Il avait la bouche pâteusement sèche et il ressentait une soif extrême, ses yeux se posant sur l'étendue jaune qui s'étendait devant lui. Ils étaient en plein milieu du désert. Un goulot trouva soudain ses lèvres craquelées et douloureuses. Il avait l'impression qu'elles allaient se déchirer s'il les bougeait. Un liquide frais prit possession de sa bouche, contrastant drastiquement avec leur environnement. Il avala l'eau encore fraîche malgré la chaleur sans poser de questions, profitant bien trop de cette fraîcheur dans l'étau insupportable et aride du Soleil qui brillait au-dessus d'eux, hors d'atteinte. L'eau venait de lui être enlevée alors qu'il en avait encore besoin, sa gorge était encore douloureuse du manque. Il protesta en rouvrant les yeux, il croisa alors les regards inquiets d'Orion et Artae.
- Hé, ça va? me demanda le premier.
Sa peau brune foncée lui permettait de supporter la chaleur mieux que la plupart des Ailés, et bien mieux que les Humains. Artae devait souffrir un peu. C'est ce que pensait Éris.
- Laisse lui le temps de se remettre un peu! protesta l'ancien soldat.
Le Chef déchu se rendit compte que l'Humain avait déserté l'armée pour le sauver, et travaillait avec un ancien esclave, un Elfe, pour l'aider, lui, le méchant de l'histoire.
- Oh c'est bon! C'est pas toi le Chef, ici, que je sache!
- Toi non plus alors tu la ferme!
- Économisez votre énergie, parce que si j'ai bien compris la situation, on va en avoir besoin...
Le regard d'Éris s'était porté sur l'horizon. Sous ses fesses, le sable semblait brûler, comme en fusion, et le piquait désagréablement, comme du verre enfoncé dans son derrière. Le Soleil tapait tellement fort que sa peau le brûlait. Orion tendit sa main au prince déchu et l'aida à se relever.
- Ici, je décide, c'est ça? Pourquoi on est dans le putain de désert?
- Parce que c'est là qu'on ne se fera pas poursuivre? Les Humains ne sont pas fan du désert. Ça les tue... Je sais de quoi je parle. déclara Artae, couvert d'une fine couche de sueur qui brillait au Soleil.
Éris hocha la tête. Il savait de quoi il parlait et Éris aussi. Ils avaient perdu mainte camarades ici au cours des années et des missions. Preuve que la place des Humains n'est pas ici... Il soupira. Les trois avaient un capuchon sur leur tête pour protéger leurs yeux un maximum, mais ça se voyait qu'ils étaient partis dans la précipitation. Artae n'avait qu'un t-shirt sur lui et des chaussons pour la nuit, avec une fine semelle qui devait à peine protéger ses pieds de la fournaise environnante. Orion portait des vêtements un tantinet plus adaptés, mais ses habits étaient en lambeaux.
- Bon, on y va? Où, en fait?
- À la planque de l'armée inHumaine peut-être? Ce serait le plus sage. Si on va à la capitale Corbellique, ils la mettront à sac bien avant qu'on y arrive, et aucune chance de trouver de l'aide... De plus, ils tueront la famille royale pour prendre le trône. Si on tente de se cacher où que ce soit, ils finiront par nous trouver. Le gars dont tu m'as parlé, Éris, pourra peut-être nous aider? suggéra Orion.
Éris se mordit la lèvre inférieure.
- C'est vrai, mais rien n'est sûr. Et puis, ces Humains. qu'ils essayent de toucher à ma famille, et ils verront qui je suis... murmurai-je.
Artae fronça les sourcils.
- C'est vrai ça. T'es qui, en fait?
- Éris Wyten, charmé de vous rencontrer, Seigneur Artae... Premier fils de la reine des Corbels et d'un Ophis. À votre service... récita Éris, en s'inclinant devant l'Humain dans un geste exagéré. Ma mère est morte, je n'ai aucune nouvelle de mon père, j'ai une petite sœur et un demi-petit frère. Je suis considéré comme mort par tout le monde, sauf Nawim, qui était mon amoureux, mais qui ne veut plus me voir sous peine de me tuer pour de vrai et une femelle que je ne connais pas, mais son nom est Cahira.
Il se redressa et sourit, vaguement amusé par la réaction de ses compagnons.
- T'ES UN PRINCE?? ET L'HÉRITIER DU TRÔNE PAR DESSUS TOUT???? ET TON PLAN SERAIT D'ALLER VOIR CE NAWIM POUR SE FAIRE TOUS EXÉCUTER??? MAIS T'ES TARÉ MA PAROLE!!
- Oui, peut-être, mais arrête de hurler, on risque de se faire entendre... dit-il d'un ton sarcastique. Qui sait qui peut nous entendre en plein milieu du désert.
À qui le dis tu...
Les trois compagnons se retournèrent en sursautant. Éris se figea soudain, ses yeux remontant le long d'une grande silhouette, n'en croyant pas ses yeux.
- Heu... Je peux savoir qui tu es?
Tu te moques de moi, petit Corbel aux cheveux blancs? demanda la voix rauque et lente de l'animal dans sa tête.
Dans leurs têtes, à voir celles que tiraient Artae et Orion.
- Je n'oserais.
- Comète, c'est ce à quoi je pense?
Qui, serait plus approprié, tu ne penses pas? On ne demande pas quoi des Corbels ou des Ophis, j'imagine... Un peu de respect, Humain aux cheveux bruns...
La créature, bien plus grande qu'eux, devant avoisiner les trois mètres au garrot et quatre et demi du haut de sa tête, dévisagea Éris.
C'est toi le Chef de ta bande?
- Tu déduis bien.
Vous êtes perdus?
- Et toi donc...
Il sembla sourire, dévoilant ses crocs dans une mimique amusée.
Ne sais-tu pas que les Hypodons ne se perdent jamais?
- J'en ai effectivement entendu parlé.
Un rire guttural sorti de son large gosier.
Je t'aime bien, toi...
Éris lui rendit son sourire, même s'il n'était pas vraiment sincère, et en profita pour le détailler. Il était extrêmement grand, haut perché sur ses pattes avant de félin et ses pattes arrières d'oiseau. Il avait un corps fin, du dessous de sa tête, jusqu'au bout de sa longue queue étaient parsemés de grandes écailles bleues foncées. Juste au-dessus, des écailles plus petites s'alignaient parfaitement avec les grandes. Ces écailles étaient d'un bleu foncé plus clair. Sa tête était gris clair tout comme ses cornes et oreilles, le sorte de bec blanc qui constituait ses naseaux couvrait le devant de sa gueule et formait une corne sur le dessus. Sur son front, une écaille de forme rectangulaire grise trônait. Sous ses yeux bleus, il avait une marque constituée d'écailles rondes et bleu clair. Son corps était constitué d'une myriade de petites écailles noires, de la tête au bout de la queue. Ses cornes étaient moyennement longues et partaient vers l'arrière. Il avait une crinière bleu très clair, qui semblait luire doucement. La première partie de cette crinière partait de la fin de son museau à son garrot. Elle recommençait ensuite à la fin de son dos jusqu'au bout de sa queue. Cette crinière semblait luire malgré la présence plus qu'insupportable du Soleil. Il avait quatre cornes, deux sur le haut de la tête, et deux au coin de sa mâchoire, juste en dessous de ses oreilles. Ses antérieurs étaient gris, et montaient jusqu'aux épaules, et à l'arrière, des piques en sortaient. Ses pattes arrières, elles, n'avaient rien en particulier sinon de très longs doigts. elles étaient grises foncées et très musclées. Sa gueule était plutôt souriante, et il avait l'air amical, bien que ses crocs l'étaient beaucoup moins. Il agita une oreille.
Quels sont vos noms, Corbels et Humain?
- Éris.
- Artae.
- Orion. Mais je ne suis pas un Corbel.
Ah, un Elfe. Je vois. Eh bien, Éris, Artae et Orion, soyez les bienvenus dans mon territoire... Je me nomme Hyo.
Éris fronça les sourcils en s'avançant au devant de la bête.
- Ton territoire?
Corbel Éris, tu crois que c'est pourquoi que personne ne nous a jamais trouvé? Que tout le monde à beau essayer de nous chercher, en particulier les Humains? Nous sommes des légendes vivantes, alors que tout le monde nous croit morts.
- Ah, parce qu'il y en a d'autres?
Hyo ricana.
Évidemment, Humain Artae. Ce n'est pas parce que tu te balades seul que tu l'es...
- Alors pourquoi nous avoir approchés?
Son regard bleu ciel se fixa dans celui d'Éris, qui était bien plus pâle que celui de l'énorme créature.
Vous semblez avoir besoin d'un peu d'aide, non? Je suis là pour vous en amener... Je n'ai jamais vu de Corbel en compagnie d'un Elfe et d'un Humain. Je me suis dis que ça en vaudrait la peine de vous aider...
Le prince fit mine de réfléchir avant de se tourner vers ses compatriotes.
- Depuis combien de temps m'avez-vous sorti de ma cellule?
- Une journée et une nuit.
Il pesta et frotta son nez en fermant les yeux.
- S'ils nous cherchent, ils viendront forcément ici. Un esclave qui s'est échappé, un soldat qui a déserté et l'ancien Chef Corbel des Armés Humaines? Jamais ils ne nous lâcheront la grappe.
Intéressant... murmura la voix d'Hyo dans leurs esprits. Si je vous aide, que puis-je avoir en contrepartie?
Le Corbel se tourna vers l'Hypodon. Il avait mis sa tête au même niveau que la sienne.
- Demande toujours?
Les Humains nous saoulent... Laissez nous participer à votre guerre. On veut les chasser de nos terres et reprendre nos droits... Nous sommes terrés depuis bien trop longtemps. Il est temps pour nous de regagner nos territoires d'origines. Le sable du désert ne convient pas à tout le monde, et ça me pose un grand problème.
Je souris légèrement.
- Ça me va.
Sa patte avant droite se tendit vers le petit groupe. Éris posa son poigt fermé dessus en le regardant droit dans les yeux.
- Comment comptes-tu nous aider?
Avec des amis, bien sûr...
Il émit un bruit guttural et s'ébroua soudain. Du sable sortirent deux têtes.
Hyo? Tu nous a appelés?
Venez, j'ai à vous présenter quelques petits intrus sur notre territoire.
Les deux Hypodons sortirent du sable en s'ébrouant.
Et bien et bien... Qu'avons-nous là... dit l'Hypodon rouge.
Ils sont à manger?? demanda le vert, qui paraissait surexcité.
Rêve toujours, Dho.
T'es pas drôle, Hyo.
Il l'est jamais de toute façon... Qui êtes-vous? Je m'appelle Eir.
La femelle rouge était bien plus petite qu'Hyo et Dho, mais ce dernier était plus petit que l'Hypodon bleu. Eir avait des yeux rouges foncés, sa marque était rouge sang, et de forme différente de celle d'Hyo. Sa crinière était rouge pâle, sa tête grise claire, ses pattes avant grise et les pattes arrière plus foncées. Ses grandes écailles étaient rouge foncé, ses moyennes écailles rouge sang et ses petites écailles noires. Elle était belle et avait un charme que nul ne pouvait ignorer. Dho était vert, avec la même répartition des couleurs.
Donc, on a un Corbel, un Elfe et un Humain...
- Belle déduction, Dho... marmonna Orion.
- Bon, pouvez-vous nous aider ou pas? Sinon on s'en va, on a assez de chemin à faire comme ça...
Bien sûr, bien sûr... Où voulez-vous aller?
- Si vous savez où se trouve la planque de l'armée inHumaine, on a pour but de se faire tuer par d'anciens amis à moi...
Évidemment qu'on sait, Corbel blanc!
- C'est Éris, Hypodon rouge.
La femelle gloussa.
Lui, je l'aime bien. Dommage qu'il doive se faire tuer par ses anciens amis.
Il a l'air de croquer sous la dent... Dis Hyo, t'es sûr je peux pas goûter?
Son museau vert étant un peu trop près d'Éris à son goût, Il sortit ses ailes, et son aile droite vint lui mettre un claque sur le museau.
- Dégage de là, pot de gélatine verte. Je ne suis pas ton dîner.
Ce dernier grogna en montrant ses crocs, tout sauf content.
Ça suffit. Corbel Éris, je suis désolé, mais ce n'est pas possible pour le moment. Mon clan est en pleine crise, et je ne peux m'autoriser à rester trop longtemps loin des miens. Nous pouvons vous déposer dans le territoire Ophis. Il ne vous chercheront pas, là-bas. Le plus facile pour nous, ce serait les falaises.
- Ok, d'accord. accepta Éris après avoir regardé ses compagnons.
Parfait alors. On viendra vous chercher lorsque le problème sera passé, ça vous va?
- C'est parfait, merci beaucoup. Nous n'avons pas beaucoup d'autres choix de toute manière...
C'est vrai. rit l'Hypodon bleu, vaguement amusé. Dho, prends l'Humain. Je prends leur petit Chef Corbel. Eir tu prends l'Elfe. Et je ne veux entendre personne se plaindre.
Le grand Hypodon se coucha au sol et invita le jeune Corbel à monter. Les deux autres firent de même. Éris s'approcha et monta le plus délicatement possible sur le dos d'Hyo.
Corbel Éris, est-il possible que tu ranges tes ailes? Elles risquent de déranger lors de la Marche.
- La Marche?
Il sourit.
Tu verras bien assez tôt...
Il rangea donc ses ailes. Il allait bientôt revoir Nawim. Tout excité à cette pensée, il laissa un sourire sincère s'installer sur ses lèvres, mais le doute s'installa dans son esprit. Et si... et si Nawim le rejetait encore? Serait-il capable de se relever face à la douleur? De l'oublier? Et comment réagira-t-il en voyant Éris débarquer à nouveau? La peur prit sa place dans son ventre doucement mais sûrement alors que les Hypodons se préparaient à partir. Cette boule au ventre ne risquait pas de le quitter, puisqu'il ne savait pas exactement combien de temps ils devraient attendre que les Hypodons reviennent les chercher...
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Nous regardions les Hypodons disparaître au loin. Ils marchaient sur l'air. Ils avaient le don de solidifier l'air sous leurs pattes pour y trouver appui et voler sans avoir besoin d'ailes.
- Bon. dit Éris en se tournant vers ses camarades. On doit trouver de quoi faire de l'argent. C'est-à-dire, on va travailler. Mais d'abord, Artae doit se nourrir. Et boire. Moi je peux tenir encore un peu.
- Moi aussi. dit Orion. Il doit y avoir une ville près d'ici.
Artae hocha la tête.
- Merci de penser à moi. Je suis Humain, après tout.
- Et je suis un prince déchu, ancien Chef des armées Humaines.
- Et moi un Elfe.
- Au point où on en est, ça n'a pas vraiment d'importance, je t'avoue.
- On est le trio le plus bizarre que je n'ai jamais vu...
Orion rit doucement.
- C'est vrai. On devrait bouger. Éris, on fait quoi? Tu vas te déguiser ou pas?
- Oui. Toi et moi, on va prétendre être des Elfes au service d'Artae. Je vous le rappelle, mais le Royaume Ophisiaque est entièrement sous le joug des Humains.
Artae hocha la tête.
- Je n'ai pas vraiment de vêtements adaptés.
- On entre dans un magasin, tu dis que tu as été violemment attaqué, que tous tes biens ont été volés, et on t'offrira de quoi t'habiller, boire et manger.
- Éris n'a pas tort, l'Humain, ici, tout le monde supporte les Humains.
- Ok, on fait comme ça, alors. Par contre, Comète, tes tâches... Personne n'a ça. Tu sais les effacer?
- Bien sûr, merci. J'avais oublié.
Il procéda à couvrir les tâches plus foncées qui couvraient sa peau, de la même exacte couleur que celles de Mira.
- Allons-y.
Artae se mit en tête de la petite troupe, et Éris et Orion suivirent l'Humains, les ailes du prince bien rangées. Il en avait également profité pour se créer les mêmes cicatrices qu'Orion portait sur le dos. Ils marchèrent environ une heure et demie à travers des champs, croisant des Elfes y travaillant, surveillés par leurs Humains, et parfois leurs Ophis. Artae les saluait à chaque fois, tandis que les deux autres gardaient la tête soigneusement baissée. Personne ne parlait, mais à chaque fois qu'ils se retrouvaient seuls, Éris et Orion relevaient la tête pour profiter du paysage, qui était magnifique. Des champs de toutes sortes, de toutes les couleurs s'étendaient sous leurs yeux. Les terres Ophis leurs étaient, à tous, encore inconnues jusqu'à ce jour. Ils croisèrent des Humains à dos d'Hérals, qui leur donnèrent un peu d'eau, ce qui permit à Artae de se sentir mieux. Ils lui donnèrent également des morceaux de viande séchée pour continuer le voyage, ainsi qu'une gourde d'eau, puisque ces soldats avaient, par chance, une de rechange. Ils leur indiquèrent le chemin pour la ville la plus proche, qui passait par la forêt, où ils pourraient chasser du gibier si besoin. Il y avait aussi une rivière qui passait au travers. Artae remercia les Humains qui les trois amis poursuivirent leur chemin, bifurquant dans la forêt. Il faisait chaud, et des nuages commençaient à s'installer, rendant l'air lourd. Ces nuages, noirs, promettaient de l'orage. Aller sous des arbres n'étaient peut-être pas la meilleure des bonnes idées, mais Artae commençait à sérieusement fatiguer, et avait besoin de se remplir l'estomac autrement qu'avec quelques pauvres morceaux de viande séchée. Ils ne firent qu'entendre le bruit du tonnerre et ils sentirent la pluie s'installer en même temps que les Lunes, les trois mâles se retrouvèrent vite trempés, malgré la protection que leur offrait les arbres. Malgré la drache et l'obscurité, ils ne s'arrêtèrent pas de marcher. Toute forme de vie animale s'était réfugiée de la pluie et de l'orage, laissant l'estomac d'Artae presque vide. Ils purent remplir leur gourde et faire une petite pause avant de repartir. Ce ne fut que tard dans la nuit, les étoiles étaient levée depuis quelques heures déjà, qu'ils aperçurent les lumières de la ville, au beau milieu de la forêt. Artae tombait presque de fatigue, et Éris rentra dans la première auberge qu'ils trouvèrent.
- Bonjour... dit-il en se dirigeant vers le comptoir.
Un mâle Humain, assez fin et âgé le dévisagea.
- Es-tu seul, Elfe?
- Non. Mon Maître est dehors. Nous sommes trois en tout. Nous cherchons des chambres, un repas, et un travail pour pouvoir vous payer.
- Très bien. Si vous trouvez du travail d'ici demain, je vous laisserai rester ici aussi longtemps que vous aurez besoin.
- Merci beaucoup.
Éris inclina la tête et ressortit pour prévenir les autres. Ils rentrèrent à trois, et le gérant regarda Orion. Artae s'approcha du frêle mâle avec un sourire.
- Merci de nous accueillir à une telle heure.
- J'ai entendu dire que vous cherchiez du travail.
- C'est juste. acquiesça l'ancien soldat.
- Alors j'ai une proposition pour l'Elfe à la peau noir. dit-il en montrant Orion du doigt. Nous avons besoin d'aide pour couper du bois et porter des choses lourdes. Il a l'air bien bâti. Quant à votre autre Elfe, peut-être pourrait-il aller en cuisine?
- Orion, Éris, ça vous va? leur demanda Artae.
- Oui, aucun problème. répondit Orion.
- Heu... Je suis désolé. dit Éris, gardant la tête baissée. Je ne sais pas cuisiner. Mais je peux vous aider à faire la vaisselle, et nettoyer en général.
- Ça vous irait? demanda Artae.
- Oui, c'est bien aussi, pas d'inquiétude. sourit le mâle aux cheveux grisonnants.
- Pour vous, mon ami, il faudra aller chercher en ville, si vous voulez faire un peu d'argent.
- Merci beaucoup de nous recevoir.
- Aucun problème. Vous voulez deux ou trois chambres?
- Trois, si ce n'est pas trop demander.
- Mais non, aucun souci, vraiment. les rassura le gérant avec un sourire. Ça ne me dérange pas. Peu de personnes viennent ici, ces temps-ci, tout le monde préfère se rendre à la plage.
- Merci encore. dit Artae en saisissant les clés.
- Il est tard, ou très tôt, plutôt, allez donc vous reposer. Le petit déjeuner sera servi de sept heures à neuf heures. Les horaires de travail sont de neuf jusqu'à ce qu'il n'y ait plus rien à faire.
Ils hochèrent la tête et montèrent dans leurs chambres respectives. Éris salua les deux autres et déverrouilla la porte de sa chambre, entrant. C'était assez petit, mais bien assez grand pour y dormir. Il y avait un lit simple déjà fait et une salle de bain avec des toilettes. Éris se débarassa de ses vêtements, les mettant dans un bac à linge sale, il profitera de la journée de demain pour les laver. Il demanderait également à Artae d'aller acheter des vêtements plus corrects. Il se retrouva donc en caleçon à la propreté douteuse, mais il fera avec. Il alla fermer les volets de la chambre et ferma la porte à clé, laissant la clé dans la serrure. Il se glissa ensuite entre les draps et s'endormit presque instantanément.
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Travailler dans le nettoyage n'était pas, en soit, un travail difficile. Le patron était gentil avec les deux Elfes, et la nourriture préparée par deux autres Elfes étaient bonne. Artae avait trouvé un travail dans une boulangerie non loin, et gagnait pas mal d'argent malgré tout. Tous avaient renouvelé leurs habits, achetant deux pantalons, quelques hauts et des caleçons. Il avait aussi acheté à chacun un sac pour la facilité. Et ils attendaient. Tous étaient bien occupés, mais le temps pouvait se sentir long, malgré tout. La ville était magnifique, ce n'était pas la ville qui vivait dans la forêt, c'est la forêt elle-même qui vivait dans la ville. Il n'y avait pas de rues tracées, les gens devaient zigzaguer entre les arbres, et les maisons, les boutiques, étaient construites autour de la forêt. Aucun arbre n'avait été touché, et le bois que devait couper Orion venait d'une autre ville qui avait construit une forêt pour l'exploiter, replantant un arbre pour chaque d'abattu. Cette ville avait quelque chose de féerique, et Éris s'y sentait bien. Il en venait presque à oublier qu'il était dans le territoire ennemi, et qu'il était activement recherché pour être probablement exécuté par sa propre armée.