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6

Chapitre 6 - Et ?

SERAPHINA, 21ans

— Tu te rappelles comment on s’est rencontrés ?


Noah me pose la question en balançant une chips dans sa bouche avec la nonchalance d’un chat qui vient de casser un vase et s’en fout royalement.

Je lève les yeux du carnet que je gribouille depuis dix minutes sans écrire une phrase potable.

— Si je me rappelais, t’imagines bien que tu serais le dernier à qui je le dirais.

— Charmant. Mais faux. Tu meurs d’envie de connaître les détails. Tu sais pourquoi ? Parce que c’est moi.

Il me fait un clin d’œil dramatique. J’ai envie de lui jeter mon carnet à la tête.

— Ok, vas-y, raconte. Mais si tu embellis, je te coupe la langue.

Il lève les mains, théâtral.

— Promis. Honnêteté totale. Zéro filtre. Même si j’aurais préféré qu’on se rencontre dans une fête glam où je dansais sur du Harry Styles…

— Focus, Noah.

— Bon. Hôpital. Deux chambres côte à côte. Moi, j’étais là parce que mon père m’avait “involontairement” lancé un club de golf dans le torse.

Je fronce les sourcils.

— Attends… quoi ?

— Ouais. Longue histoire. Mauvais réflexe parental. Mais bref, j’étais vivant, t’inquiète. Et y avait cette fille à côté… qui criait dans son sommeil.

Je me fige.

— Tu t’en souviens ?

— C’est comme ça que j’ai su que t’existais. Ta voix. Tu disais des trucs incohérents, parfois même dans une langue bizarre.

— Sérieux ?

Il hoche la tête. Son ton s’adoucit.

— Et puis un jour, t’as arrêté. Et t’es restée silencieuse. Genre... figée. Comme un ordi qui bug.

J’ai un flash. Une lumière blanche. Le plafond de la chambre. Le bip de la machine.

Je murmure :

— Et t’as frappé contre le mur.

— Trois petits coups. Comme ça.
(Il mime les coups contre une surface invisible.)
— Et t’as répondu. Trois petits coups aussi. Et j’ai su que t’étais réveillée.

Quelque chose se serre en moi. Je me rappelle pas tout. Mais je sens que c’est vrai.

— Après, j’ai négocié avec une infirmière pour qu’elle laisse la porte de ma chambre entrouverte. Et j’ai attendu. T’as fini par passer la tête. L’air mi-curieuse, mi-dégoûtée. Comme si t’étais tombée sur un documentaire animalier sur moi.

Je ris malgré moi. Il sourit, fier de son effet.

— Et là j’ai dit : “T’as une sale tête.”
(Il m’imite, exagérant la voix grave.)
— Et moi j’ai répondu : “Merci, j’aime faire peur aux enfants.”

— C’est totalement moi, ça.

— Ouais, sauf que t’avais la voix toute cassée. Et les yeux vides.
(Il baisse un peu la voix.)
— J’ai tout de suite su que t’étais pas juste une “patiente”.

Silence. Et puis, doucement, je reprends :

— Il y avait… quelqu’un d’autre, non ?
Ma propre voix me surprend.

Noah penche un peu la tête.

— Genre… un médecin ?

— Non. Quelqu’un d’autre. Un garçon. J’ai… j’ai pas de souvenir clair. Juste… je crois qu’il était là. Au tout début. Avant que je parle. Avant même que je me réveille vraiment.

Un regard. Une présence. Des yeux sombres. Un froid. Une chaleur. Une peur.

— Peut-être un rêve, Sera.

— Peut-être pas.

Je passe ma main sur mon poignet. Comme une pulsation oubliée. Une mémoire sous la peau.

— Il disait rien. Mais j’ai senti que je le connaissais.

Noah fronce les sourcils.

— T’as jamais parlé de ça avant.

— Je crois que je viens de m’en souvenir.

Un silence s’installe. Pas pesant. Mais chargé.

Et dans ma tête, une voix qui n’a pas encore de nom.
Des yeux trop réels pour être rêvés.
Un frisson. Une vérité qui dort encore.

Azriel.

Je serre les doigts autour de la tasse de thé que Noah m’a forcée à boire. “Ça va t’ancrer, parole de grand-mère coréenne,” avait-il dit.

— T’es sûre que c’était pas juste moi, ton mystérieux inconnu de chambre d’hôpital ? Parce que franchement, j’ai le profil : beau, mystérieux, grande bouche et un taux de glucose inquiétant.

— Non.
Ma réponse est immédiate. Froide. Tranchante.
Je le regarde.
— C’était pas toi.
Et je ne sais pas pourquoi, mais j’en suis absolument certaine.

Il lève les mains, dramatique.

— Aïe. Mon ego.

Je lui lance un coussin. Il l’évite comme s’il avait anticipé depuis sa naissance.

— Sérieusement, tu crois pas que ton cerveau t’a juste joué un tour ? Genre, entre le coma, l’amnésie, les médocs, et les murs blancs déprimants de l’hosto…

— Je sens que je l’ai connu. C’est pas logique. Mais c’est là.
Je touche mes tempes.
— Comme un souvenir collé sous une couche de brouillard. Un truc qui attend que je me retourne.

Noah se tait. Pour une fois.
Puis, avec un sérieux qu’il a rarement :

— Tu crois que c’est quelqu’un d’important ?

Je hausse les épaules.
J’aimerais dire non. Que je suis au-dessus de ces souvenirs flous. Que ça m’atteint pas.

Mais la vérité ?
C’est qu’il me manque. Ce garçon dont je connais même pas le nom.
Il me manque, et je sais même pas pourquoi.

— Peut-être.
Je murmure ça. Pas pour lui. Pour moi.

Noah se redresse, sourcil levé.

— Et si tu le revoyais maintenant, là, aujourd’hui, tu ferais quoi ?

Je le fixe.

Et une seule image traverse mon esprit.

Des yeux sombres.
Une silhouette appuyée contre un mur.
Une voix grave. Un silence qui dit plus que mille mots.

Je le vois.

Et je réponds, presque dans un souffle :

— Je crois que je le reconnaîtrais.

Ma voix est basse, à peine audible. Presque un secret.
Noah ne dit rien. Il me regarde. Et c’est peut-être la première fois qu’il me regarde sans chercher à comprendre, sans rire, sans détour. Juste… avec une forme de tendresse qu’il ne montre pas souvent.

Je n’ajoute rien. Parce que je n’ai pas besoin.

Quelque chose vient de se réveiller en moi. Ce n’est pas un souvenir clair. Pas encore.
Mais c’est réel. Et je sais… que ce n’est que le début.

Le silence s’étire un peu, mais pour une fois, il ne me pèse pas.
Noah tapote distraitement le bord de la table avec ses doigts, comme pour relancer la conversation, puis abandonne. Il a compris. Il sent que c’est différent.

Moi, je me lève doucement, tasse à la main, comme si bouger m’aidait à respirer. Je jette un regard par la fenêtre. Le ciel est gris, mais ce n’est pas ça qui me trouble.

C’est cette impression que quelque chose approche.

— Tu vas où ? me demande Noah sans se lever.

— Juste... dans ma chambre. J’ai besoin de réfléchir. D’écrire peut-être.

Il ne pose pas plus de questions. Il sait que quand je dis “écrire”, c’est souvent pour recoller les morceaux.

Je referme la porte derrière moi. Je m’assois sur le lit, le carnet toujours à la main. Mais cette fois, je n’ouvre pas une nouvelle page. Je feuillette les anciennes, celles griffonnées à la va-vite, dans la panique ou le flou.

Et puis je tombe sur un mot. Un seul.
Écrit à moitié dans un coin. Presque effacé.

"A."

Je fronce les sourcils.
C’est mon écriture. Mais je ne me souviens pas l’avoir noté.
Mon cœur rate un battement.

Azriel.

C’est idiot. Trop rapide. Trop évident. Mais mon cerveau le chuchote avant même que je puisse me retenir. Comme si ce prénom avait toujours été là, juste sous la surface.
Je ferme les yeux.

Et cette fois, je le vois plus clairement.
Il marche dans un couloir. Des murs gris, des lumières trop blanches. Un hôpital ? Une autre époque ?
Il ne dit rien. Mais il s’arrête.
Se retourne.
Me regarde.

Ses yeux sont d’une intensité presque douloureuse.

Je sursaute.

Quelqu’un frappe à la porte.

Une fois.

Puis deux.

Pas trois.

Juste deux. Un rythme irrégulier. Inconnu.

Je reste figée. Mon cœur cogne comme un fou dans ma poitrine.

— Sera ?
La voix de Noah. Derrière la porte.
Je souffle, un peu tremblante.

— Quoi ?

— J’ai oublié de te dire… y’a un type qui est passé tout à l’heure. Il a demandé s’il y avait une “Seraphina Ravenscroft” ici.
Je me fige.

— Il est reparti ?
— Je crois ouais. J’ai pas capté son nom. Mais il avait un regard bizarre. Du genre… tu sais, intense. Genre vampire mélancolique en 4K.
— Tu te fous de moi, là ?
— Pas du tout. C’est flippant. Et un peu sexy. Mais flippant.

Je n’entends plus vraiment la fin de sa phrase.
Mon cœur s’est arrêté une seconde.
Un prénom pulse dans ma tête.

Azriel.

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