Ses yeux brillaient d’un éclat presque incandescent, une lueur ardente qui témoignait de son engagement total dans ce qu’elle partageait. Sa voix, claire et nette, résonnait avec une telle force qu’elle capturait toute notre attention, emportant tout sur son passage. Lorsqu’elle évoquait les mystères du Lac Noir, ses paroles s’alourdissaient d’une gravité indéniable. Il n’était plus question de simples légendes ; chaque mot était tissé d’une vérité qui frappait l’esprit. Elle parlait avec une telle certitude que toute tentative de rester indifférent était futile.

Je pouvais presque ressentir l’énergie qu’elle dégageait, une sorte de tension électrique dans l’air, chaque détail, chaque anecdote qu’elle distillait vibrante d’une force propre. Ces histoires prenaient vie sous ses lèvres, suspendues dans l’air du café comme des fragments d’un autre monde. À mesure qu’elle parlait, une curiosité nouvelle germait en moi, me poussant à vouloir en savoir plus, à découvrir cette facette du mystère que Megan connaissait si bien. Mon scepticisme s'effritait doucement, remplacé par une soif insatiable de comprendre ce que cette nouvelle alliée pouvait réellement apporter à notre quête. Un frisson me parcourut l’échine alors que l’étendue de l’aventure qui nous attendait commençait à prendre forme, aussi fascinante que troublante.

— Vous avez entendu parler de l’Ombre du Lac, non ?

Je la fixai, surpris par son assurance.

— L’Ombre du Lac ? C’est quoi encore cette histoire ?

Megan sourit, comme si elle attendait cette question depuis toujours.

— C’est une vieille légende, bien avant que Silver Pines ne devienne une ville. Les Amérindiens parlaient d’un esprit malveillant qui vivait dans les profondeurs du Lac Noir. Ils disaient qu’il prenait la forme d’une créature, un monstre ancestral qui attirait les âmes perdues et les dévorait.

Je secouai la tête.

— Ça ressemble à une vieille histoire pour effrayer les gamins. Tu ne peux pas être sérieuse ?

Elle me fixa droit dans les yeux, son expression grave.

— Les légendes ont souvent une part de vérité, Ben. Ce n’est pas un hasard si tant de gens ont disparu près du lac.

Sarah, à côté de moi, buvait ses paroles. Elle était déjà convaincue, je le voyais bien.

— Tom... Murmura-t-elle. Il a été pris par cette créature, j’en suis sûre.

— Sarah, tu ne peux pas vraiment croire à ces histoires de monstres, tentai-je, mais elle secoua la tête avec obstination.

— C’est plus qu’une légende. Ethan a découvert des archives chez son père. Des meurtres, des disparitions, tout est lié au lac.

Je me tus, réalisant peu à peu que, moi aussi, je me laissais happer par cette spirale de mystère dont j’avais d’abord voulu m’éloigner. Les pièces du puzzle, jusqu’alors éparses et confuses, commençaient à se rassembler, lentement, presque imperceptiblement, jusqu’à former une image aussi troublante qu’envoûtante. Des lumières énigmatiques scintillaient sous la surface noire du lac, des légendes anciennes murmuraient l’existence de créatures étranges tapies dans les ombres, des disparitions mystérieuses s’égrenaient, et maintenant, il y avait ce vieux journal, dont les pages tissaient un lien invisible entre tous ces événements énigmatiques.

Megan, imperturbable, reprit la parole, sa voix douce mais assurée s’élevant au-dessus du silence pesant. Elle apporta une sérénité inattendue dans l’air, apaisant la tension qui nous entourait. Chaque mot qu’elle prononçait résonnait en moi, comme une mélodie envoûtante, emplie d’une sagesse étrange et d’une certitude qui me traversaient de part en part. J’étais pris dans le flot de ses paroles, chaque révélation s’imprimant profondément dans ma mémoire, m’enroulant dans un fil invisible de fascination. Sa passion, palpable dans chaque intonation, était contagieuse ; je pouvais presque la toucher, l’entendre vibrer dans l’air autour de nous.

À chaque nouvel élément qu’elle dévoilait, mon cœur battait un peu plus vite. Une curiosité insatiable grandissait en moi, une force qui me poussait à m’avancer dans cette quête sans retour. Je me laissais emporter par l’excitation, la sensation de m’enfoncer dans quelque chose de plus vaste que tout ce que j’avais imaginé. Le lac, avec tous ses secrets enfouis, n’avait pas fini de nous dévoiler son mystère. Et moi, je me tenais là, prêt à plonger plus profondément dans l’inconnu, prêt à découvrir ce que cet endroit pouvait encore nous révéler.

— Il existe un moyen de savoir si tout ça est vrai. Il y a un endroit près du lac, un ancien campement amérindien, abandonné depuis des siècles. Les légendes disent que les anciens y pratiquaient des rituels pour apaiser l’esprit du lac. Peut-être que c’est là-bas qu’on trouvera des réponses.

— Tu veux qu’on aille là-bas ? Demandai-je, la voix plus nerveuse que je ne l’aurais voulu.

— Si vous voulez savoir ce qui est arrivé à Tom, il n’y a pas d’autre solution, répondit-elle avec une certitude implacable.

Je tournai lentement mon regard vers Sarah, et ce que j’y découvris me frappa de plein fouet. Dans ses yeux, une détermination ardente brillait, aussi intense qu'une flamme se battant contre l’obscurité. Ce n’était pas simplement une étincelle de volonté, mais une force inébranlable, comme si elle avait déjà franchi un seuil, prête à plonger dans l’inconnu sans retour. Elle hocha la tête, une affirmation silencieuse, mais d'une puissance qui me transperça. C’était un pacte silencieux, implicite : que je le veuille ou non, j’étais désormais entraîné dans cette quête, un voyage dont l’ampleur et la profondeur m’échappaient encore. Un frisson étrange, à la fois excitant et lourd de menace, parcourut mon échine, une excitation palpable qui électrisait l'air autour de nous, comme si l’atmosphère elle-même se préparait à nous englober dans une étreinte dangereuse.

Pour la première fois depuis longtemps, l’idée de retourner près du Lac Noir m’envahit d’une angoisse glacée. Le lac, avec ses eaux sombres et insondables, n’était plus un simple corps d’eau, mais un lieu chargé de mystères, d’histoires non dites et de souvenirs lourds d’inquiétude. Chaque vague, chaque mouvement de l’eau murmurait des secrets oubliés, des échos d’âmes perdues que le temps avait tentées de dissimuler. L’idée de m’en approcher à nouveau éveillait en moi une terreur sourde, celle des ombres que j’avais préféré ignorer, des vérités enfouies qu’il aurait été plus sage de laisser endormies. Le poids de l’inconnu pesait sur mes épaules, m’écrasant sous le fardeau de l’incertitude. Je savais que ce que nous allions découvrir pourrait bouleverser notre perception de tout, de la ville, de ses habitants, et même de nous-mêmes. La tension dans l’air était palpable, une sorte d’électricité qui précipitait chaque seconde, chaque souffle. C’était comme si un orage se préparait à éclater, une tempête prête à déchirer le voile de tranquillité qui nous entourait. Je me demandais, avec une inquiétude grandissante, si j’étais vraiment prêt à me laisser entraîner dans ces eaux troubles, à faire face à des vérités que nous n’avions jamais voulu connaître.