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Chapitre 9 - Kieran

J'observe Aubrey passer les portes battantes de l'hôtel comme une fusée. Comme s'il voulait mettre le plus de distance possible entre lui et moi. J'observe le chauffeur, un peu décontenancé, et il hausse les épaules d'un air blasé. C'est peut-être lui qui a raison après tout, les stars sont des girouettes et je ne devrais plus m'en étonner. Ça fait un moment que je travaille dans ce milieu, je suis supposé être habitué. Mais c'est quand même étrange ce retournement de situation. Et ça me fait réfléchir. Qu'est-ce que j'ai bien pu faire de mal ? J'avais l'impression que l'attente pour aller chercher mon ordinateur n'avait pas été si longue et qu'il était plutôt cool avec ça avant. Alors je suis paumé, je dois bien l'avouer. Je soupire, récupère mes affaires dans le van et remercie Ian, le chauffeur dont j'aurais enfin appris le prénom.

Je rejoins ma chambre en traînant des pieds, je ne sais pas ce que je vais dîner, j'ai juste envie d'une douche et d'un lit moelleux. Pourtant, je sais que je ne pourrais pas dormir sans avaler quelque chose, rien de trop gros. J'abandonne mon ordinateur sur le bureau et envoie un SMS à Sage pour l'informer que je prends une douche et que je suis à elle dans vingt minutes. J'ignore la réponse ironique qui suit et j'attrape le menu du room-service. Je commande une soupe avec des morceaux de pain à l'ail et je file sous la douche. Je n'y reste pas longtemps parce que je n'ai aucune envie d'être debout et que j'ai du boulot qui m'attend. Mais ça me suffit pour tourner en boucle dans ma tête les événements de la soirée. Vraiment, je ne comprends pas ce qu'il s'est passé et ça me torture. C'est pas inhabituel chez moi, de repasser mille fois les événements autour d'un problème pour essayer de trouver ce que j'ai bien pu faire de mal. Ça me mine clairement le moral, mais j'essaie de ne pas me laisser abattre. J'enfile le jogging et le t-shirt que j'utilise en pyjama et m'installe sur le petit bureau avec mon ordinateur, le temps d'ouvrir les fichiers dont Sage m'a parlé. J'observe les informations pendant un certain temps avant que quelqu'un ne toque à la porte. Je récupère ma commande et m'installe avant d'appeler ma collègue.

— Ça y est, tu es tout propre ?
— Oh ta gueule Sage.
— Quoi, c'est toi qui m'as parlé de prendre une douche !
— Me dis pas que c'est pas la première chose que tu vas faire quand tu vas rentrer.
— Si, mais je n'ai pas besoin de l'expliquer. Bref, c'est pas le sujet.
— Ouais, dis-moi.

On a passé une bonne heure à éplucher les différents documents, vérifier les horaires de départ des invités qui repartent le dimanche, réorganiser les navettes vers les gares ou aéroports, vérifier que tout le monde avait bien sa chambre d'hôtel pour ceux qui restaient le dimanche soir. Bref, faire un point pour ne rien louper le lendemain.

— Bon accouche, c'est quoi le problème ?
— Le problème ?
— Tu soupires comme un malheureux depuis une heure.
— Je ne soupire pas.
— Si. Raconte avant que tu ne me gonfles et que je raccroche.
— Rien, c'est juste, tu sais. Tucker.
— Qu'est-ce qu'il a fait encore ?
— Je sais pas, il était presque agréable cette après-midi, il m'a proposé de dîner et tout.
— Quel gentleman.

Je pouvais presque la voir lever les yeux au ciel, un petit sourire en coin accroché au coin de ses lèvres fines..

— Et puis je suis revenu chercher mon ordi, et quand je suis rentré dans la voiture après c'était le Pôle Nord. On est arrivé, il m'a dit qu'il voulait plus dîner avec moi. Et il s'est barré comme si j'avais la peste.
— Il a peut-être été saoulé de t'attendre. Oublie pas que c'est une foutue diva.
— Je sais pas, possible. C'était bizarre.

Un silence s'installa, de quelques secondes seulement. Je m'égarai dans mes pensées, cherchant ce qui avait bien pu se passer. Je me promettais intérieurement de poser la question à Ian, notre chauffeur, pour savoir si lui-même n'avait pas capter quelques petites choses lorsque Sage reprit la parole.

— Alors, ne panique pas.
— Pourquoi ?

Ces simples mots suffirent à faire monter la panique en mois, bien évidemment.

— Sage, qu'est-ce qu'il se passe ?
— J'ai jeté un œil sur l'Instagram de Tucker pendant qu'on causait.
— Et donc ?
— Il est en boîte... ?
— Quoi ? m'écriai-je en sautant de ma chaise. Comment ça en boîte ? Il est monté dans sa chambre, je l'ai vu !
— Bah, il a dû ressortir. J'en sais rien, c'est toi le baby-sitter !
— Putain. Il a tagué le lieu ou quelque chose ?

Pendant que Sage analysait ses stories, je me rhabillais avec mes vêtements de la veille. La sensation de porter des vêtements sales était relativement désagréable, mais je n'avais pas emmené suffisamment d'affaires pour jouer les défilés de mode.

— J'ai trouvé, je t'envoie l'adresse. Tu veux que je dise à Ian de vous y rejoindre ?
— Non, laisse-le se reposer, je vais prendre des taxis. Fais chier putain. Bon merci Sage, je te tiens au courant, marmonai-je dans le téléphone en mâchant la moitié de mes mots.
— À plus !

Quelle merde. J'attrape mon téléphone pour essayer de joindre Aldo, mais je tombe directement sur sa messagerie. Je n'ai pas le téléphone d'Aubrey alors je m'engouffre dans le premier taxi que je croise et lui donne l'adresse du bar que Sage m'a transmise. Mon cœur bat à cent à l'heure, je crains le pire. Je glisse sur Instagram et me rend sur le profil de Bree. Il a l'air de s'amuser, il danse au milieu de la piste, une femme accrochée à son cou. Je regarde la story en boucle, l'ongle de mon pouce entre les dents. Je dois bien avouer que mon cœur se serre en voyant la jeune femme se frotter contre lui, mais surtout parce que j'ai foiré mon job. Vraiment, j'ai tout gâché, mais je ne sais pas pourquoi ni comment. J'espère agir suffisamment rapidement pour que Graham n'en ait pas vent, parce que si Aubrey perdra juste son cachet et aura une réputation un peu entachée, moi, je perdrais mon gagne-pain. Mon métier de rêve. Alors il est hors de question que tout ça continue.

Le taxi slalome dans les rues de Londres alors que la pluie bat le pavé, les lumières donnent une atmosphère inquiétante à travers la buée de la fenêtre et ma jambe bat la mesure. On met environ une vingtaine de minutes à rejoindre le bar un peu miteux dans lequel Bree s'est établi. J'espère du plus profond de mon cœur qu'il n'a pas changé d'endroit après que Sage l'ait trouvé, je n'avais pas suffisamment d'énergie pour jouer au détective privé dans les rues de ma ville après une journée comme celle-ci. 

— Merci, vous pouvez attendre ici ? Laissez tourner le compteur, je reviens avec quelqu'un et il faudra nous ramener jusqu'à l'hôtel.
— Pas de souci, mais vous payez cette course-là d'abords.

Un soupir quitte mes lèvres, mais je m'exécute, le paiement sans contact n'est pas très long, et je m'engouffre ensuite dans le bar. Je suis d'ailleurs content que ce soit un bar, et pas une boîte de nuit ou un truc du genre. Je n'aurais jamais pu entrer là-dedans si ça avait été le cas. Entre ma tenue négligée, ma tête de déterré qui n'a pas suffisamment dormi et le trou béant dans mon compte en banque, je serais resté à la porte. Je jette un œil circulaire autour de moi et essaie de localiser Bree au milieu de la foule. L'endroit est bondé et je suis obligé de m'avancer à l'intérieur pour essayer de le repérer. La lumière est à moitié éteinte et des spots colorés tournent à un rythme qui donnerait le tournis à n'importe quelle personne, malgré ça les dizaines de corps agglutinés sur la piste de danse ne semblent pas perturbés. Je tourne autour de la pièce, essayant d'éviter d'être englouti par la masse humaine, et je cherche. Je retiens ma respiration un moment pour éviter le mélange d'odeur de bière, de vieux bar poussiéreux, de sueur et de friture. Ça me retourne l'estomac et je prie pour qu'on sorte d'ici le plus rapidement possible.  

Mon regard scrute chaque visage jusqu'à ce que je le voie enfin. Seul sur la piste, la main en l'air, le corps ondulant sur la musique. Mon cœur loupa un battement, il avait changé de fringues et la lumière des projecteurs accentuait les traits de son visage, ce qui le rendait franchement magnifique. Je laissai passer quelques secondes à le détailler. On peut clairement dire que je me rinçais l'œil, même si je déteste cette expression. Mais je ne peux pas nier trouver Bree très beau. Il est de ces beautés masculines aux traits secs, où les angles sont pointus tout en ayant une certaine douceur qui s'émane d'eux. Et je n'ai jamais pu résister à ce type de profil, mon ex avait cette morphologie aussi. Je fini par m'ébrouer un peu pour revenir à ma mission principale avant de m'approcher de lui, prenant un air sévère. Je posai une main sur son épaule pour qu'il se tourne vers moi, ce qu'il fit sans mal. 

— Monsieur Tucker.

Ses yeux s'ouvrirent et m'observèrent un instant. Son regard était voilé par l'alcool, ses pupilles étaient dilatées et j'ai cru un instant qu'il n'allait pas me reconnaître. Ce fut une erreur car il prit quelques secondes à peine pour remettre un visage sur la situation et ses pupilles s'assombrirent immédiatement.  

— Kieran.

Sa voix était glaciale et mon prénom entre ses lèvres me donna la chair de poule. Si j'avais besoin d'une confirmation qu'il m'en voulait à moi personnellement, il venait juste de me la donner.

— Je vous avais dit que je devais venir avec vous si vous sortiez.
— Et tu t'es pas dit que si j'étais parti sans toi, c'était parce que je ne voulais pas voir ta tête ?
— Ce n'est pas une raison, déglutissai-je. Je vais vous demander de me suivre, on va devoir rentrer.
— Je n'en ai pas envie.

Il me tourna le dos et recommença à se mouvoir en rythme avec la musique. Je laissais passer quelques secondes, rassemblant mes arguments et mon courage, avant de me passer une main sur la nuque. Je détestais ce que j'allais faire, parce que je sentais qu'il avait besoin d'être ici. Mais c'était loin d'être bon pour lui.

— Vous n'avez pas le choix, Tucker, sifflai-je. Si mon patron à vent de vos exploits de ce soir, vous allez perdre votre cachet.

Je le vis cesser de danser à nouveau et ses épaules se tendirent. Je sais à cet instant précis que j'ai réussi à le convaincre, mais que je vais le payer cher. Je suis un peu déçu qu'il soit guidé par l'argent à ce point, mais je ne suis même pas surpris. Je l'observe alors qu'il se tourne à nouveau vers moi, la mâchoire serrée et le regard encore plus sombre que précédemment. J'ai toujours admiré ces pupilles vairons, mais je dois avouer que ce soir elles me donnent froid dans le dos.

— Alors allons-y.

Je le laisse passer devant. J'aurais dû me sentir plus calme, rassuré. Sauf qu'il n'en était rien, vraiment. Mon cœur était toujours serré, mon esprit carburait à mille à l'heure et je serrais les poings dans le fond des poches de mon jean pour qu'on ne voit pas qu'elles tremblaient. Pendant que nous traversions la foule en quête de la sortie, une femme se jetta au cou de Bree. Je reconnu, non sans mal, la jeune femme présente dans sa story tout à l'heure. Surtout grâce à sa robe, une robe à sequins argentés très courte et très décolleté. Elle tenta d'embrasser notre acteur de génie, mais celui-ci la repoussa gracieusement en déposant deux doigts sur ses lèvres, un sourire enjôleur sur les siennes. J'étais trop loin pour comprendre ce qu'il lui a glissé à l'oreille mais, ça eus le mérite de la faire rougir et s'éloigner, une moue déçue sur le visage. 

On reprend notre route vers l'extérieur et j'indique à Bree le taxi qui nous attend toujours, à mon grand soulagement. Nous finissons par nous installer à l'arrière, côte à côte. L'ambiance est aussi glaciale que dans le van cette après-midi, et je ne sais toujours pas pourquoi. Je pourrais lui demander ce que j'ai fait de mal ou essayer de m'intéresser à lui, mais je n'ai aucune envie de ramper devant Bree Tucker. Je suis en colère parce qu'il ne risque pas seulement sa réputation dans cette histoire, et qu'il s'en fiche royalement. Il veut jouer les Elsa inaccessibles ? Très bien. Moi aussi je sais jouer les bonhommes de neige. Je donne l'adresse de l'hôtel au chauffeur et tente quelques exercices rapides de respiration pour me détendre. Je fini par tendre la vers à Bree, lui demandant de me donner son téléphone.

— Pardon ?
— Votre téléphone.
— Pourquoi faire ?
— Vous n'avez pas envie de perdre votre cachet, alors on va supprimer vos petites stories. J'espère que vos fans ne seront pas trop casse-bonbons.
— Ouais, je vais les supprimer moi-même.

Je n'ai pas envie de me battre, alors je le laisse faire. J'espère qu'il n'est pas du genre à ce que les paparazzis scrutent ses réseaux sociaux parce que sinon, on est morts. Bree remet sa casquette sur sa tête et me signifie ainsi qu'il n'a pas envie de parler. Je reporte mon attention sur l'extérieur et observe le paysage défiler sous mes yeux. J'ai envie de lui poser la question, j'ai envie de lui demander si c'est une chose que j'ai faite qui l'a poussé à sortir comme ça, mais je n'en ai pas le droit, parce qu'une part de moi se dit que je me donne trop d'importance, trop d'impact sur sa personne. Je ne suis personne pour lui, il n'y a aucune raison que je sois la cause de cette sortie impromptue. Je suis passé de la colère à la déception de moi-même en si peu de temps que je me désespère. Je sais que, lorsque j'en parlerai à Cat, elle va s'énerver pour moi. Je l'entends déjà me dire que j'ai plus d'importance que lui et que je vaux tout l'or du monde alors que ce petit enfant de Satan n'a pas à me traiter de la sorte. Et me taper les doigts parce que je me déprécie, encore. Une vieille habitude.

Une fois arrivés à l'hôtel, comme cette après-midi, Bree s'est éjecté de la voiture avec une rapidité que je ne lui connaissais pas. Or, l'alcool aidant, il n'a pas été très loin. Il titube jusqu'à la porte tournante. J'ai un peu peur qu'il se coupe quelque chose là-dedans alors je m'avance pour l'aider et supporter sa carcasse imbibée jusqu'à sa chambre. À peine eus-je posé ma main sur son épaule qu'il eut un mouvement de recul qui manqua de le faire tomber et qui me surprit. Je déglutis face à la colère présente dans son regard, ma main restant suspendue en l'air. C'est à moi d'être en colère, pas à lui ! Alors pourquoi est-ce que je me sens minable ? 

— Ne me touche pas.
— Je voulais juste vous aider.
— J'ai pas besoin de ton aide, cracha-t-il avec véhémence.

Il se retourna pour passer la porte et je me lançais derrière lui. Hors de question que je ne vérifie pas qu'il se soit enfermé dans sa chambre, cette fois. Le trajet en ascenseur fut encore plus pesant que celui en voiture, un vrai calvaire. Je me sentis respirer lorsque la porte de sa chambre se referma derrière lui.

Je descendis à nouveau à l'accueil pour leur demander de m'appeler si jamais ils voyaient Bree sortir. Que c'était important que je sois prévenu, impératif même. L'hôtel n'accepta que lorsque je leur prouvais que j'étais l'initiateur des réservations. On ne peut pas leur reprocher de sécuriser le séjour de leurs clients, surtout à notre niveau quand il s'agit de célébrité pour lesquelles des fans seraient prêts et prêtes à tout pour les approcher.

Ce fût seulement après avoir eu confirmation que je serais prévenu que je m'autorisai à me calmer et à dormir. M'écrouler sur le lit, enroulé dans la couette tel un burritos, fut la meilleure expérience de ma journée. Je m'endormi en quelques minutes seulement, grappillant quelques heures de sommeil pour affronter le plus sereinement possible la journée du lendemain. 

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