Assis dans le grand sofa, Markus regardait d’un air profondément désespéré l’alignement de petits pots colorés sur la table basse. Ils étaient rentrés depuis longtemps déjà, mais il n’avait pas vraiment bougé. Jasper n’osait pas le déranger et travaillait un cours à son bureau, lui jetant régulièrement un coup d’œil.
Ils avaient passé un long moment au cabinet médical. La médecin avait annulé quelques rendez-vous pour prendre le temps de s’occuper de Markus. Elle lui avait procuré toute une série de pilules, dans ces boîtes auxquelles Markus avait les yeux rivés. Toutes étaient des suppresseurs puissants. Aucun ne fonctionnerait à cent pour cent.
Cependant, le jeune homme n’émettrait plus aucune phéromone en dehors de ses périodes de chaleurs. Qui, avec un peu de chance, seraient assez réduites, grâce à l’action combinée de plusieurs médicaments que l’Oméga devait absolument toujours avoir à portée de main.
La médecin avait réussi à leur en fournir plusieurs jeux sans qu’ils aient à passer par une pharmacie. Elle semblait très sûre d’elle. Jasper découvrait avec ahurissement que Markus n’était pas le premier Oméga qu’elle aidait à camoufler son genre. Il avait empoché les assortiments de flacons médicaux et acquiescé à chaque instruction.
Dès leur retour, il avait donc soigneusement réparti les lots de médicaments comme on le lui avait indiqué : une trousse proche du lit, une dans son propre sac de cours, et une dans les affaires de Markus. Celle que ce dernier avait renversée sur la table basse pour en aligner méticuleusement le contenu en un petit arc-en-ciel terrifiant devant lui. Il n’y avait aucun nom sur les flacons, seules les couleurs permettaient de les différencier.
Jasper s’était étonné de la précision de ces consignes. La médecin s’était contentée de répondre d’un vague sourire accompagné d’une ou deux phrases laconiques :
— Tu as une famille merveilleuse Jasper, mais de nombreuses personnes n’ont pas cette chance. Surtout les Omégas.
Markus, lui, ne disait plus rien. Jasper n’était même pas certain qu’il soit vraiment capable de se concentrer sur les instructions. D’ailleurs, la docteure leur avait fourni une version papier, en recommandant bien de la laisser chez Jasper.
L’Alpha abandonna ses cours et rejoignit son camarade sur le sofa, posant deux tasses de thé fumant devant eux. Puis il ouvrit un bras, invitant l’Oméga à se rapprocher de lui.
— Tu veux un shoot de phéromones ? Ça te ferait du bien, avant de dormir.
Le jeune homme n’hésita que quelques instants avant de venir contre lui. Jasper relâcha une bouffée de molécules apaisantes et enlaça l’Oméga, qu’il sentit se détendre, bien trop brièvement. Markus se redressait déjà, raide comme un piquet.
— Mais elle ne l’a pas dit, ça !
Intrigué, Jasper se pencha vers le smartphone que son ami tenait entre ses doigts tremblants.
— Regarde ça ! « Oméga extrêmement dominant : ce que l’on sait du nouveau cas recensé aux États-Unis » C’est tellement rare qu’on en fait des gros titres dans la presse ! Mais regarde !
— Je vois, oui.
Jasper se mit à diffuser des phéromones plus intensément, et posa machinalement son menton sur l’épaule de l’Oméga, pour lire en même temps que lui sur le petit écran.
— Six cas connus en Occident, environ une quinzaine dans le monde, et à peu près autant qui se déclareraient dans la décennie à venir. En effet, c’est rarissime.
Markus frémit, se tendit, comme s’il luttait avec lui-même, et finit par lâcher platement :
— Si mon père l’apprend, je ne sortirais de chez moi que le jour de mon mariage.
— Je sais.
Jasper se laissa aller dans le sofa, entraînant Markus avec lui, que cela lui plaise ou non.
— Tu ne pourras rien faire de plus ce soir. Repose-toi.
Et il diffusa un peu plus de phéromones.
***
— Julie ? Tu crois vraiment que Markus est un Oméga ?
La jeune femme releva le nez de son cours, qu’elle était en train de surligner avec application. Juan la regardait, entortillant une courte mèche turquoise autour de son index. Le jeune homme affichait une moue à mi-chemin entre l’inquiétude et l’incrédulité.
— Vendredi soir, j’étais certaine. Aujourd’hui, je doute. Jasper l’a complètement douché de phéromones, on ne sent que ça. Et tu sais que j’ai un bon nez.
— Tu crois qu’un Alpha pourrait sentir à travers celles de Jasper ?
Julie darda sur Juan un regard aiguisé, et son ami lui répondit d’un sourire calme, avant d’ajouter :
— Évidemment que je ne me risquerais pas à demander ça à quiconque. Ça serait trop dangereux pour Markus. S’il l’est vraiment, et qu’il le cache, c’est qu’il a ses raisons. Je ne suis pas fou, tu sais ?
— J’vois qu’tu commences à avoir de bons réflexes, c’est rassurant. C’est la première fois que je sens un partenaire de Jasper autant couvert de ses phéromones. Alors soit Jasper est très amoureux, soit Markus a quelque chose à cacher et il l’aide. Je vais garder un œil sur lui, mais je ne vais pas lui parler directement pour le moment. Ça lui ferait prendre des risques. Et à nous aussi. Bosse, maintenant.
Julie tapota la table du bout de son stylo, puis s’étira avant de se replonger dans la lecture de son cours. Juan l’imita, non sans garder ses questionnements dans un coin de sa tête. D’habite, à cette heure-ci, l’Alpha était avec eux à la bibliothèque. Il se sentait toujours plus serein quand l’aura de dominance de leur ami les protégeait. Aucun Alpha n’aurait osé les déranger, avec Jasper dans les parages. Cela n’était pas seulement dû au fait que sa famille était riche, et possédait le plus gros conglomérat de médias du pays. Leur ami irradiait la confiance l’assurance. Un peu comme Markus de Dompérain, avec l’arrogance et le mordant en moins. Le fils du ministre était inaccessible. Il était toujours entouré d’une petite cour, mais on voyait bien qu’il n’était proche de personne. Personne ne semblait le connaître, et il était toujours sur la défensive. Juan n’aurait jamais osé lui parler sans la présence de Jasper à ses côtés.
Un camarade de promo les frôla et ils froncèrent le nez tous les deux. Les phéromones leur disaient très clairement qu’ils n’avaient rien à faire là. Comme souvent, à l’université. Faire des études longues et complexes était mal vu, quand on était un Oméga.
Julie releva le nez de ses notes, prête à en découdre. L’homme était déjà à plusieurs mètres, mais il se retourna et lécha sa lèvre supérieure avec la subtilité d’un phacochère en ne la quittant pas des yeux. Juan posa une main sur son poignet.
— J’ai pas l’énergie, Jul’. Tu viens à la maison ? Papa a fait une paella ce weekend, il doit en rester.
Elle murmura son assentiment, mais sans lâcher l’Alpha du regard. Juan savait qu’elle avait raison. Ils auraient dû rester, et se défendre, même simplement en refusant de cesser d’étudier dans leur coin. Mais il ne pourrait plus se concentrer, et il voulait travailler tranquillement. Ils rangèrent leurs affaires et quittèrent les lieux. Juste avant de sortir, Julie siffla bruyamment. Puis elle brandit son majeur en direction de l’Alpha qui pensait l’effrayer, et sortit.
***
— Tu as faim ?
Je secoue la tête alors que Jasper passe son bras à mon épaule et m’embrasse sur la joue.
Depuis un mois que nous feignons d’être un couple, je me suis habitué à sa présence à mes côtés. La première semaine, celle de mes premières chaleurs, a été odieuse. J’ai eu besoin de lui souvent, enfin tous les jours. Tout le temps. Sa réputation d’Alpha très dominant a éloigné les camarades qui étaient les plus proches de moi, heureusement. Ce sont les plus proches de ma famille aussi. Et si tout le monde dans notre promo est au courant de notre relation, pour le moment elle n’est pas arrivée aux oreilles de mon géniteur. Mon frère est encore à l’école militaire, il prépare ses examens. Mon père travaille. Moi je rase les murs. Je passe le plus de temps possible sur le campus, je ne rentre chez moi que pour dormir et me laver. Cela ne surprend personne, j’ai toujours beaucoup étudié. C’est la seule manière que j’aie d’exister dans ma famille.
Jasper s’impose de rester avec moi tous les jours. Parfois, je vais bosser chez lui, pour lui éviter l’inconfort de la bibliothèque universitaire et ses sièges antiques. Il a beau dire qu’il y est habitué, je doute qu’il y passe autant de temps d’habitude. Même pour rendre service à ses deux amis omégas, qui nous y rejoignent parfois. Je me sens mal à l’aise lorsqu’ils sont là. J’ai l’impression de leur voler leur ami. Et leur sécurité. Celui aux cheveux bleus, Juan, n’a pas caché que lorsque Jasper était présent ils n’étaient pas harcelés.
— Tu es sûr ? insiste-t-il, comme s’il s’inquiétait réellement de ma santé. Peut-être est-ce le cas, après tout. Il s’inquiète bien de celle de ses amis. Il connaît même les cycles de la femme, Julie. Est-ce qu’il connaîtra les miens aussi, s’ils deviennent réguliers ?
— Oui. Je me sens… Je suis juste fatigué, Jasper.
Si fatigué que j’ai envie de me blottir entre ses bras pour respirer les phéromones au creux de son cou. J’en suis couvert, pourtant. Tous les matins, nous nous retrouvons dans un café avant de venir en cours, et il me douche de son odeur. Je m’y suis habitué, c’est comme un parfum, avec une pointe de sucré. Je n’arrive pas à me faire, par contre, à ce besoin de lui que je ressens souvent. J’ai toujours été tout à fait seul, y compris au milieu de mes camarades. Je n’ai pas vraiment de potes, juste une petite bande qui m’entoure tout le temps, pour profiter de mon argent, de ma famille, ou plus rarement qui m’admire un peu. Je n’ai jamais noué d’amitié durable. Je ne me suis jamais autant appuyé sur quelqu’un, même pas sur ma mère. C’est très déroutant.
Il pose sa main sur mon front. Elle est fraîche, c’est agréable. Je ferme les yeux.
— Tu es brûlant. Tu…
Il se tait, parce que nous croisons des camarades de classe, et m’attire plus près de lui, comme s’il allait m’embrasser. Il m’enlace, d’ailleurs, et se penche pour chuchoter à mon oreille :
— Ça fait déjà quatre semaines, tes chaleurs peuvent survenir n’importe quand maintenant.
Il renifle mon cou. Je frissonne, puis je bâille. La fatigue est en train de me tomber dessus comme une chape de plomb, je n’ai pas l’habitude. Je suis plutôt du genre énergique. Est-ce que c’est un signe avant-coureur des chaleurs ? Ou bien un bête surmenage ?
Je n’ai pas tellement le temps de réfléchir plus avant. Jasper relâche son étreinte, mais c’est pour mieux me saisir par la main et m’entraîner dans le dédale de couloirs et d’escaliers qui nous conduira jusqu’au parking où il gare sa voiture tous les jours.
— Qu’est-ce que tu… Jasper ! Où tu m’emmènes ?
— Chez moi. Tu ne peux pas travailler dans cet état de toute façon. Si tu es malade, nous pourrons aller voir la docteure Debois. Et sinon, eh bien, nous serons au calme.
Au calme. Pour me baiser.
Il ne le dit pas, il y a trop de risques d’être écoutés dans ces corridors qui résonnent, mais c’est ce qu’il sous-entend. Si mes chaleurs se déclenchent, je dépendrais de lui pour les apaiser. Je hais ça. Cette idée que mon corps ne m’obéira pus, qu’il ne m’appartiendra plus, que je vais devoir lui faire confiance pour que ça s’arrête. Je grimace en montant en voiture, et je baisse le nez un instant avant de me reprendre et de plaquer mon masque d’indifférence habituel sur mon visage. Je ne sais pas s’il se rend compte que l’idée de devoir coucher avec lui m’est odieuse. Qu’il touche mon corps sans que j’en sois conscient me terrifie. Et je ne peux pas le lui montrer, parce que je vois bien, depuis un mois, qu’il est sincère à chaque instant. Je ne comprends pas pourquoi, mais c’est évident : n’importe quel Alpha qui aurait voulu mon corps aurait déjà pu me forcer d’une simple poussée de phéromones. Si je n’ai jamais subi cela, c’est parce que je ne suis pas, aux yeux du monde, un véritable Oméga. Et que mon père les terrorise. Je me détourne un peu, et je regarde par la fenêtre. Je n’ai pas envie de penser à ce qui m’attend. Pour la première fois de ma vie, je rêve d’une bonne grippe. Tout plutôt que des chaleurs. Tout.
***
Jasper conduisit en silence. Il était manifeste que Markus était mal à l’aise. Il se tenait droit, la tête haute et le visage indifférent, mais il était évident qu’il était envahi par ses pensées. Pourtant l’Alpha faisait tout son possible depuis un mois pour que l’Oméga ne se sente pas oppressé, ni trop redevable. La situation était complexe et le jeune homme avait beau réexaminer le problème sous tous les angles régulièrement, il ne parvenait pas à trouver d’autre solution que ça. Cette fausse relation. Ils passaient un temps infini ensemble. Markus ne lâchait que très peu d’informations sur lui-même ou sa famille. Il était évident qu’il ne les connaissait pas tant que cela, et il faisait tout son possible pour ne pas croiser son père chez eux. Tous les jours, Jasper craignait que leur combine ne soit révélée. Et il ne cessait de se demander ce qui arriverait, si elle l’était vraiment. Ce qu’il faudrait faire. Ce qui allait arriver à Markus. Mais il avait beau chercher, il ne trouvait pas d’autre idée pour le protéger. Du moins tant que Markus n’aurait pas rencontré quelqu’un avec qui il souhaiterait se lier. Il retint une grimace. Au fond de lui, il était content que l’Oméga ne soit pas pressé de trouver un compagnon de lien. Depuis, il ne se faisait plus héler dans les couloirs de la fac par des gens qu’il ne connaissait pas, mais qui, eux, savaient son nom. Celui de sa famille, surtout. Il était las d’être aguiché trois fois par jour.
Il se gara enfin et décrocha sa ceinture de sécurité, avant de se pencher pour attraper ses affaires à l’arrière. Markus n’avait pas bougé. Il tremblait. Il tremblait et semblait faire de gros efforts pour se contenir. Jasper jura entre ses dents et sortit de la voiture pour en faire le tour, leurs deux sacs sur l’épaule. Il aida Markus à s’extirper du véhicule et toucha à nouveau son front. Il était toujours chaud. Brûlant, même. L’étudiant prit sur lui pour ne pas paniquer et foncer chez sa médecin. Sans rendez-vous, ils croiseraient du monde dans la salle d’attente. Ils ne pouvaient pas se le permettre. Markus expira lentement et tendit le bras vers son sac. Il le repoussa délicatement et lui sourit avant de tenter de l’attirer vers lui.
— Viens. Je vais te porter si tu veux.
— Non ça… va. Ça va, Jasper.
L’Alpha n’insista pas, mais glissa une main sous le coude de l’Oméga, pour le soutenir. Bien lui en prit, car dès la première volée de marches, Markus trébucha. Sans lui laisser le temps de protester, Jasper l’enleva entre ses bras, comme il aurait porté un enfant. Markus s’accrocha au cou de son ami et y enfouit son visage. Jasper relâcha discrètement des phéromones, dans l’espoir de l’apaiser, au moins un peu. Markus paniquait dès que l’on mentionnait les molécules odorantes. Il ne pouvait pas l’en blâmer, l’Oméga n’avait manifestement pu expérimenter que leur domination. Jamais personne ne lui avait appris à communiquer avec. Jasper se concentra donc pour que celles qu’il émettait à destination de son camarade soient les plus douces possibles. Il grimpa lentement les escaliers jusqu’au loft du troisième étage, où il claqua la porte d’un coup de talon pour atteindre plus vite le sofa. Markus tremblait toujours de tous ses membres, et son front était de plus en plus chaud.
L’Alpha diffusa plus de molécules douces et odorantes, un peu perplexe.
— Tu as besoin de quelque chose, Markus ? Tu veux un verre d’eau ? Tes médicaments ?
— Non… Ça va passer.
Jasper haussa un sourcil, pas vraiment convaincu, mais Markus ayant de plus en plus de mal à articuler, il ne le poussa pas à parler encore. Il se contenta d’être là et de le tenir contre lui, en produisant en continu une faible quantité de phéromones. Il laissa du temps s’écouler. Markus tremblait de moins en moins. Jasper diffusait des phéromones en continu, mais faiblement. Il ne voulait pas brusquer son camarade, surtout pas maintenant. L’Oméga respirait dans son cou, cramponné à son col, et se concentrait pour prendre de profondes inspirations.
La porte s’ouvrit brusquement.
— Jasper, tu viens din…
— MAMAN PUTAIN ! Frappe avant d’entrer !
La femme s’arrêta à mi-hauteur des marches et jeta à son fils un air interrogateur par-dessus la rambarde d’acier où s’adossait le sofa.
— Tu as un invité. Tout va bien ?
— Non, justement !
Markus s’était comme pétrifié, les deux poings serrés sur la poitrine de Jasper, le visage farouchement caché contre son torse. Il tremblait à nouveau de tous ses membres. L’Alpha referma ses bras sur lui, comme pour le dissimuler un peu plus. La respiration du jeune homme se faisait de plus en plus brusque, saccadée. Il marmottait quelque chose, mais Jasper n’arrivait pas à en saisir le sens et dut le lui faire répéter plusieurs fois.
— Mal. J’ai mal. J’ai mal. Jasper. J’ai mal.
— Où as-tu mal ?
Des bruits de pas indiquèrent que la femme finissait de monter l’escalier. L’Oméga dégageait une aura de puissance autant que de douceur. Ses cheveux poivre et sel étaient tirés en une simple queue de cheval et elle portait un jogging de coton et une chemise qui était manifestement celle de son mari, tant elle semblait flotter dedans. La question posée par son fils au mystérieux invité avait activé ses réflexes maternels et elle s’approchait du grand canapé d’angle où les jeunes hommes étaient blottis.
— Poitrine. Tête. J’arrive pas à. Respirer.
La voix de Markus était rauque, et paniquée. Il s’était replié en position fœtale contre lui, sans lever son visage de son torse. Jasper aurait voulu le forcer à se dérouler. Masser chaque muscle pour le forcer à se détendre. Ses réactions étaient instinctives, guidées par l’odeur aigre des phéromones de son ami, et il luttait de toutes ses forces pour ne pas laisser les siennes déferler dans l’appartement, saturer l’air comme l’Oméga aurait-du le vouloir, comme il en avait besoin. Il s’épuisait à se contenir, pour ne pas effrayer encore plus Markus, qui peinait à prendre la moindre inspiration.
— Ça ressemble à une grosse crise d’angoisse. As-tu besoin d’aide, Jasper ? l’interrogea sa mère.
— Non, laisse-nous. Si ! Appelle Debois s’il te plaît. Elle l’a déjà vu. Demande-lui de venir. Vite. Et laisse-nous. S’il te plaît. Et ne dis à personne que j’avais un invité.
— Comme tu veux. Préviens-nous si tu as besoin d’aide tant que la médecin n’est pas passée, d’accord ?
Elle sourit à son fils et lui tendit un plaid moelleux, dont il recrouvrit le corps crispé contre le sien. Puis elle ajouta : « nous sortons après le dîner. Ton père mettra votre repas au frigo, tu iras le chercher si vous avez faim. Oh, et si c’est ton Oméga, diffuse donc un peu plus de phéromones. Ça lui permettrait peut-être de retrouver un peu de calme en attendant la doc.
— Merci, Maman.
La femme ébouriffa les cheveux châtains de son fils et les abandonna, descendant la volée de marches d’acier jusqu’à l’étage inférieur d’un pas léger. Elle avait déjà son téléphone portable collé à l’oreille, et Jasper l’entendit s’annoncer au secrétariat médical alors que la porte du loft se refermait sur elle.
Quelques minutes plus tard, la docteure Debois arrivait.