« ...Et là, je lui dis : "Si tu veux pas finir sur ma liste noire, évite de me parler comme si t'étais mon prof d'économie." »
Lyana éclata de rire, la tasse de thé toujours à la main. Léna, adossée contre le canapé, esquissa un sourire. Ils étaient encore là, tous les trois, à discuter dans cette bulle étrange qui ressemblait presque à... une famille.
Et c'est précisément à cet instant que la porte d'entrée claqua.
« TOC TOC TOC ! La cavalerie est arrivée ! » s'écria une voix bien trop enthousiaste.
Chris entra en trombe, sac à dos jeté sur une chaise, lunettes de soleil sur le nez malgré la pluie dehors.
« Tu peux enlever tes lunettes, Chris, il pleut des cordes, » fit remarquer Elio, blasé.
« C'est pas une question de météo. C'est une question d'attitude. »
« Ah oui ? Tu comptes t'entraîner à être aveugle ou tu veux juste avoir l'air mystérieux ? »
Lisa apparut derrière lui, chewing-gum en bouche, les cheveux en bataille et un sweat deux fois trop grand.
« Hey les morts-vivants. On vous a apporté des trucs. »
« Si c'est pas des infos, c'est inutile, » lança Lyana.
Lisa ouvrit son sac.
« Des dossiers. Trois noms. Trois cas d'élèves qui ont disparu sans bruit cette année. Et vous savez quoi ? Aucun n'a eu de suivi disciplinaire avant ça. Nada. Silence radio. »
Elio se redressa. Léna aussi.
« Ils ont été effacés du système, » souffla cette dernière.
« Exactement. Et devinez qui a signé les derniers documents officiels avant leur "départ" ? M. Tissier. Encore lui, » ajouta Chris avec un clin d'œil dramatique.
« Le gars sent toujours la naphtaline ? » demanda Elio.
« Non. Maintenant il sent aussi le soufre. »
Lyana attrapa les feuilles, les yeux plissés.
« Trois de plus. Ça commence à sentir mauvais. »
« Tu veux dire pire que nos chambres ? » glissa Lisa, hilare.
« C'est une opération ou un goûter sarcastique, ici ? » demanda Léna, mi-sourire au coin des lèvres.
Chris lui lança un regard curieux.
« T'as changé, toi. Avant tu tirais la tronche dès qu'on faisait une blague. »
« Je m'adapte. »
« C'est terrifiant. Bienvenue dans le club, » dit-il en lui tendant la main comme si elle venait d'être intronisée dans une secte.
Léna la serra, sans même hésiter.
Lisa les regarda tous, appuyée contre le mur.
« Bon. On a le tableau. Maintenant, il faut lier tout ça. Créer la toile. Et peut-être... faire tomber un pion. »
Chris claqua des doigts.
« Je propose une opération. Nom de code : "Nostalgie empoisonnée". »
« Pourquoi ce nom ? » demanda Elio, sourcil levé.
« Parce que ça sonne bien. Et que j'avais que ça. »
« Bravo le stratège, » soupira Lyana.
« Oh, tu veux un nom plus classe ? "Le retour du karma". Ça te va ? »
Ils rirent tous ensemble. Même Léna.
Et dans ce chaos presque joyeux, elle sut une chose :
Elle n'était plus spectatrice.
Elle était devenue joueuse.
Et ce jeu-là... allait devenir dangereux.