Je me laisse emporter par l'inconnu, pendant que sa main glisse le long de ma taille. Il me pousse un peu plus contre le mur froid, m'oppressant de son corps. Ses lèvres ne quittent pas les miennes, malgré mes alternatives pour le repousser de mes mains sur son torse.
Peut-être qu'il est trop bourré pour s'en rendre compte ? Ou.. peut-être qu'il est trop con pour s'en rendre compte ?
— T'es différente des autres femmes... murmure-t-il, son souffle chaud glissant sur ma peau, m'irrite plus qu'autre chose.
Je roule des yeux intérieurement.
Tous des baratineurs...
Un cri soudain me coupe de mes pensées. Sans vraiment tourner la tête, je sais immédiatement d'où il vient. Mais je suis quand même curieuse de voir son visage, alors je tourne légèrement la tête. Il est furieux.. sa posture tendue dans l'angle de la rue. Son regard noir est rivé sur nous. Il affiche un rictus en coin crispé, une veine battant sur son front, prête à exploser.
— Ely !
Sa voix résonne à nouveau, un peu plus forte cette fois. La tonalité de cette dernière est empreinte d'une colère, d'une rage que j'accepte volontiers. Puis, contre toute attente, et avant même que l'inconnu ait le temps de réagir, Deaven s'élance et porte un coup de poing brutal sur sa mâchoire. Le bruit de l'impact résonne dans l'air, à la fois sec et lourd. L'homme vacille aussitôt contre le mur en se tenant la joue.
— La touche pas ! rugit-il avec sa voix emplie de rage.
Aussi étrangement que satisfaisant, ça me rassure. Parce que, mine de rien, c'était précisément ce que j'attendais de lui. Qu'il perde son calme. L'inconnu recule d'un pas, puis deux, les yeux écarquillés sous le choc. Il secoue la tête pour reprendre certainement contenance en serrant les poings. Voyant sa détermination, je m'approche pour essayer de le retenir, mais, sans prévenir, le tatoué me prend solidement par la taille et me jette sur son épaule.
— Hé ! Qu'est-ce que tu fous ?!
Prise au dépourvu, je me débats en frappant mes poings contre son dos. Mais, ça n'a strictement aucun effet sur lui. Il se contente de me porter comme un sac à patates.
Ce connard !
Ses muscles sont tendus comme une corde prête à céder, sa mâchoire est crispée et ses traits sont sévères.
— C'est ce que tu voulais, non ? gronde-t-il sans se retourner, sa voix grondante.
— Oh, juste un petit peu, t'sais, répliqué-je avec un sourire en coin.
Je me redresse un peu sur son épaule, mais il me maintient vigoureusement de son avant-bras. Alors je finis par abandonner en sachant pertinemment que ça ne sert à rien de me débattre.
— Hé, attends ! s'écrit l'inconnu derrière nous.
Mais le tatoué, d'un geste rapide, brandit son arme métallique qui brille dans l'obscurité.
Huhu.. J'ai vraiment crée une situation de merde.. non ?
— T'approches encore d'un foutu pas et je te fous cette merde dans ta putain de gorge ! rugit-il, sa voix tranchante et sans pitié : Fous le camp d'ici avant que je t'arrache tes putains de lèvres !
L'inconnu pâlit puis recule quelques secondes avant de tourner les talons pour disparaître dans la ruelle. La queue entre les jambes. Un frisson de satisfaction traverse mes veines, et l'envie de rire me prend, mais je me retiens vivement. Il risquerait d'exploser sinon.. Après quelques pas en silence, il me saisit brutalement par la taille et me dépose sur le sol juste devant lui, ses mains fermes sur mes bras. Son regard brûle de colère, tandis qu'il me fixe avec une intensité presque insupportable. Je l'imagine déjà dans mon crâne entrain d'essayer de me déchirer l'âme avec ses dents, pour essayer de comprendre pourquoi je l'ai provoqué..
—C'est lui qui a commencé.—
C'est vrai..
— Tu crois que c'est un putain de jeu, hein ?! hurle-t-il, sa voix explosant de rage. Tu veux que je pète un câble, c'est ça ?! Il s'avance, chaque pas lourd de menace, sa respiration haletante. T'es qu'une putain de folle ! Tu crois que tu peux tout foutre en l'air pour ton putain de plaisir ?!
J'hausse les épaules, un sourire insolent se dessinant sur mes lèvres.
— Je m'amuse, et puis qu'est-ce que ça peut te foutre ?
Je vois bien que ça ne fait qu'aggraver sa colère, mais je ne peux m'empêcher de le provoquer. Son regard se fait plus intense. Comme si j'avais franchi une ligne qu'il n'avait pas vue venir. Ses yeux brillent d'une rage pure, mais il y a aussi une douleur cachée, une profondeur sombre qu'il tente de masquer. Il est là, ses muscles crispés, sur le point de craquer. Et moi, je le regarde, amusée par l'effet que j'ai sur lui.
— T'es une putain de GAMINE ! gronde-t-il, sa voix pleine de menace. T'as aucune idée du bordel que tu fous, PUTAIN !
Je peux presque entendre ses poings se serrer, craquer et être prêts à éclater sous la pression. Un soupir m'échappe lorsque je me redresse un peu. Ma main effleure sa poitrine, pendant que mon regard se pose sur lui détaché, glacé.
— Tu crois vraiment que t'as l'étoffe pour jouer avec moi dans ce jeu-là ? rié-je presque pour moi-même en croisant les bras d'un air indifférent. Il s'immobilise en me fixant, ses muscles se tendent davantage, comme une bête prête à bondir : T'as vraiment besoin de prouver quoi que ce soit à toi-même, hein ? murmuré-je, un sourire satisfait se dessinant sur mes lèvres, voyant son regard se durcir, une veine pulsant sur son cou.
— Putain... gronde-t-il entre ses dents.
Je le défie du regard, mes yeux brûlant de cette envie de tout détruire. Peut-être que je suis cruelle, peut-être que je n'ai pas le droit de jouer avec lui comme ça. Mais je m'en fous. J'en ai besoin. Besoin de le pousser à bout pour oublier ce que j'ai perdu, ce qu'il représente, ce qu'il pourrait être. Ses yeux, noirs et bouillonnants de fureur et de désir, me fixent comme s'il allait me dire quelque chose.
— Tu vas me le payer, soupire-t-il lourdement d'une voix basse, mais pleine de promesses brutes.
— Tu parles beaucoup quand tu es énervé, Deav.
— Ferme ta gueule.. Juste ferme-la..
Ses lèvres se jettent sur les miennes avec une intensité surprenante, une fureur que je n'avais pas prévue. C'est sauvage et dévorant, comme s'il cherchait à annihiler tout ce qui s'est passé, à balayer l'inconnu et cette situation ridicule que j'ai engendrée. C'est brutal, presque désespéré, mais la chaleur de sa passion me brûle. Je me débats une seconde, surprise par cette intensité soudaine, mais mes jambes se dérobent et je cède.
Qu'est-ce qui m'arrive ?
C'est étrange, cette sensation de perdre le contrôle, de me laisser emporter avant qu'il ne se retire. Dans ses yeux, l'irritation disparaît, laissant place à une lueur de désir brut, dévorante. Un éclat qui brûle et me fait frissonner.
— Tu vois, moi aussi, je sais comment te faire réagir.
Il ne répond pas, mais son regard devient plus sombre, une lueur indéchiffrable qui m'électrise. Il se rapproche, sa présence devenant de plus en plus oppressante.
— Tu crois que tu peux jouer avec moi, hm ? Sa voix est basse, tel un grondement, et chaque mot fait vibrer l'air autour de nous. Il s'approche encore, et je le laisse faire, fascinée.. ou suicidaire..
— Pourquoi pas ?
Il me saisit par la taille, ses doigts s'enfonçant dans ma peau comme s'il voulait me marquer. Comme s'il craignait que je lui échappe si l'air entre nous se relâchait.
— T'as aucune idée de ce que tu viens de faire. Aucune, putain d'idée, murmure-t-il contre mon cou, son souffle chaud brûlant ma peau.
Il se redresse de nouveau, ses mains glissent le long de mes flancs, explorant ma peau à travers mon pull. Je frémis quand ses doigts descendent pour effleurer mes hanches. Chacune de ses caresses me fait perdre pied.
— Deaven, ce n'est pas... murmuré-je, protestant à peine, mais il m'interrompt brutalement en étouffant mes mots d'un nouveau baiser.
Je gémis contre ses lèvres sous le geste. Il m'étreint plus fort. Ses mains deviennent plus audacieuses, explorant ma peau sans même chercher ma permission. Mais pour ma part, je perds le contrôle, me débattant entre ce désir dévorant et une part de moi qui veut garder la maîtrise, qui lutte contre cette intensité. L'espace entre nous se fait inexistant. Mon cœur, lui, bat la chamade sous l'adrénaline qui pulse dans mes veines.
— Arrête de jouer... murmure-t-il contre mes lèvres, ses yeux vairons ancrés dans les miens.
Une pression monte dans ma poitrine, un mélange de peur et de désir, d'excitation et de tension. Ses mots, lourds de sous-entendus, laissent un goût étrangement acide, mais aussi irrésistible sur mes lèvres.
— Ne décide pas pour moi.
Il intensifie sa prise, ses gestes devenant plus fermes sur mes hanches, plus sûrs, plus dominants. Sa bouche effleure légèrement la peau de mon cou, son souffle brûlant chaque parcelle de mon être.
— Je devrais, murmure-t-il, un sourire en coin.
— Tu crois vraiment que je vais céder, alors que c'est toi qui m'as provoquée ? pesté-je, même si mes mots sont vides.
— Oh... mais tu vas céder, Ely.
Quand il relève les yeux vers moi, je constate que ces derniers brillent d'une lueur sauvage. Une lueur qui m'emprisonne entre l'envie de fuir et celle de me perdre dans la folie qu'il crée autour. Le silence qui s'installe est lourd, entrecoupé par nos respirations haletantes. Son sourire en coin ne laisse aucun doute sur l'emprise qu'il exerce sur moi. Il se joue de ma résistance, de cette fragile façade que j'essaie de maintenir. Puis lentement, sa main se pose fermement sur ma mâchoire, m'empêchant de détourner le regard.
— T'es pas à la hauteur pour jouer contre moi... souffle-t-il, d'une voix basse et menaçante.
Je soutiens son regard, sans ciller.
— Tu te prends pour qui ?
— Pour quelqu'un d'obsessionnel...
Chacun de ces mots glisse comme une caresse vicieuse sur mon corps, tandis qu'il me dévore des yeux.
Je le veux... mai—
Mes réflexions sont stoppées net lorsque ses lèvres effleurent les miennes dans un baiser ardent. Je ne résiste pas, au contraire, je me laisse porter par l'instant, en étant électrocuté par un frisson qui parcourt mon corps.
— Tu te crois vraiment... soufflé entre deux baisers, le souffle court : capable de me dominer, hein ?
Son regard s'assombrit de nouveau.
— Tu ne sais pas à quel point je le peux... murmure-t-il, sa voix glissant comme une caresse empoisonnée.
Il laisse glisser sa main dans mes cheveux avec une douceur trompeuse. Puis il les tire légèrement vers l'arrière. Juste assez pour faire naître un mélange de frisson et de perte de contrôle.
— Personne ne le peut..Ni toi...Ni personne.. murmuré-je contre ses lèvres tout de même.
Son corps lourd et imposant se presse davantage contre le mien. M'immobilisant contre le mur. La chaleur de sa présence m'étouffe, chaque centimètre de lui respire une possessivité brute faisant battre mon cœur à vive allure.
— Tu veux toujours jouer avec moi ? murmure-t-il, son sourire narquois déformant ses traits durs.
Il a déjà gagné, et il le sait. Le pire, c'est qu'il sait aussi que je le sais.
Ce jeu, je l'ai lancé, mais c'est lui qui le dirige désormais.
Je me redresse, soutenant son regard, refusant de me laisser submerger.
— C'est ce que te soufflent tes désirs, non ? provoqué-je comme une arme tissée,
— Mes désirs.. ? Nena.. tu serais déjà dans mon lit si c'était le cas.
Un frisson s'agrippe autour de mes reins à ces mots et l'envie de répliquer, de le repousser subsiste, mais ce dernier place sa main contre ma bouche, imposant un silence immédiat. Son regard, à la fois intense et implacable, me cloue sur place.
— Mais, juste pour une fois.. susurre-t-il d'une voix plus intime avant qu'il ne se penche vers moi, sa main glissant lentement : Je veux que tu ressentes ce que c'est d'être vraiment à moi.
Ses paroles constituent à la fois une promesse et une menace. Pourtant, je reste immobile, comme sous le charme d'un sortilège étouffant. Un piège qui semble vouloir nous engloutir tous les deux. Sa main descend doucement vers ma cuisse, avec une lenteur soigneusement étudiée qui provoque une multitude de sensations inédites. Chacun de ses gestes me pousse un peu plus près de cette ligne invisible que je m'étais juré de ne jamais franchir avec quiconque. Mais à cet instant, il n'y a plus de règles, plus de barrières. Mon corps trahit ma volonté, répondant instinctivement à son appel pendant que je m'y accroche désespérément. Mais l'instant se brise, comme si le temps avait suspendu son vol pour mieux nous ramener à la réalité.
— Ely !
Le cri de Ninia me glace sur place, déchirant l'air autour de nous, de moi. Sa voix, tremblante et pleine de chocs, me sort de l'abîme où je m'étais laissée entraîner. Elle surgit de l'ombre du coin de la rue, et son regard se pose sur nous comme un couteau tranchant. Un regard qui crie plus que mille mots. Sur l'instant, je reste figée, le souffle court, noyée dans un tourbillon de honte et de panique. Mes mains, toujours accrochées aux bras de Deaven, se retirent brusquement, comme si elles portaient le poids de ma culpabilité. Je tente de m'écarter de cette étreinte, mais il ne me lâche pas. Son regard se durcit, et son visage se ferme en un masque impénétrable. Ses doigts se desserrent, mais l'intensité qu'il dégage reste là, encore plus étouffante.
— C'est une blague ? siffle-t-il d'une voix grave et acérée avec une pointe de sarcasme.
Il recule à peine, mais son ombre reste omniprésente, un rappel constant de ce que nous venons de partager. Je sens un frisson me parcourir, un mélange d'angoisse et de lucidité qui me frappe. Ninia ne doit pas comprendre.. Elle ne peut pas voir à quel point je me suis laissée emporter par cet homme qui défie toute logique.
Ma logique..
Son regard passe de lui à moi, incrédule. Mais je lis l'inquiétude, la colère et la déception se mêler dans ses yeux.
— Ely, qu'est-ce que tu fais... ? tremble sa voix.
Je suis incapable de répondre alors que ma gorge est nouée, submergée par la confusion.
Que dire ?
Que tout cela est une erreur ?
Que je ne contrôle plus rien ?
Je n'arriverais pas à lui dire..
Je détourne le regard, tentant d'échapper à son regard accusateur. De son côté, deaven demeure implacable avec son aura menaçante, semblable à un mur infranchissable. Il fixe Ninia, l'évaluant et réfléchissant à ce qu'il doit entreprendre ou dire.
— Ça suffit. Sa voix tombe comme une sentence, rauque et impérieuse : Ce n'est pas ton affaire.
— Pas mon affaire ? s'indigne-t-elle. Ely est mon amie, et toi... toi, tu es—
— Tu me fais perdre patience... La coupe-t-il.
Ses lèvres frôlent à nouveau les miennes dans un mélange de frustration et de colère contenue qui m'enserre l'estomac. Je reste figée, incapable de bouger ou de parler. Mon cœur bat à tout rompre, mais mes lèvres, encore marquées par son baiser, refusent de s'ouvrir. Ses yeux sombres et impérieux me transpercent d'une exigence qui me fait vaciller. Je me perds dans un tourbillon de sensations contradictoires qui mêle.. confusion, honte, et cette attirance viscérale qui refuse de me lâcher.
— Ça suffit ! s'écrit-elle en me faisant sursauter. Elle avance, son regard brûlant de colère. Ely n'est pas ton putain de jeu ! crache-t-elle. Je cligne des yeux, tirée entre deux directions opposées. Mais avant que je ne puisse réagir davantage, elle s'avance et m'attrape fermement par le bras pour m'extraire de son étreinte. On rentre, maintenant !
Elle me pousse en avant et m'éloigne de lui, ses doigts fermement enroulés autour de mon bras. En avançant contre mon gré, je chancelle, incapable de résister à cette force protectrice qui semble vouloir me sauver de moi-même. Derrière, le grand tatoué ne bouge pas, même si je sens son regard sur moi.
Après quelques secondes de marche, nous pénétrons de nouveau dans le bar. Et avant même de comprendre, elle me pousse sur une chaise avec une telle détermination que je tombe lourdement, hébétée. Je reste stoïque.. tandis qu'elle s'assoit à mes côtés, tendue comme un ressort. Les bras maintenant croisés sur la poitrine, tout en obstruant la vue et surtout m'empêchant d'avoir accès au reste de la pièce. Sa respiration est irrégulière, et son regard, ancré dans le mien, est un mélange d'inquiétude et de reproches.
— T'es complètement folle ou quoi ? lâche-t-elle enfin, sa voix tremblante d'émotion.
Je baisse la tête, incapable de soutenir son regard. Les mots restent bloqués dans ma gorge, écrasée par le poids de ce qui vient de se passer.
— Qu'est-ce que tu fais.. ? Sa voix est plus douce, mais toujours remplie d'émotion : Tu réalises dans quoi tu te mets, là ?
Je déglutis difficilement, mais aucun mot ne sort. Mes pensées sont un chaos total, déchirées entre la honte, la colère contre moi-même et... autre chose. Une force que je n'arrive pas à contrôler.
— C'est Deaven ! fulmine-t-elle, comme si ça pouvait tout expliquer. Ce type est dangereux ! Qu'est-ce qui t'est passé par la tête ?
Je ferme les yeux un instant, cherchant un peu de clarté, mais au lieu de réponses, ce sont ses yeux, son étreinte, qui reviennent en force.
— Je... commencé-je, mais ma voix se meurt, étouffée par un nœud dans ma gorge.
Elle se redresse brusquement, et le bruit de sa chaise qui grince sur le sol rompt le silence.
— Tu crois que ça peut finir autrement qu'en désastre ? Il te manipule ! C'est tout ce qu'il sait faire.
Ses mots me frappent de manière tranchante, mais une part de moi ne peut s'empêcher de les trouver justes, bien qu'une autre part de moi refuse de l'entendre.
— Ce n'est pas si simple, Ninia, murmuré-je d'une voix presque inaudible.
— Pas si simple ?! Elle écarquille les yeux, incrédule. C'est pourtant clair comme de l'eau de roche. Ce mec est toxique, dangereux. Il te mettra en pièces !
Je relève lentement la tête, cherchant une défense, mais rien ne me vient. Peut-être qu'elle a raison. Peut-être que je me suis déjà trop laissée entraîner, que je suis déjà sur une pente glissante dont il n'y a pas de retour possible.
— Tu crois qu'il te protège, hein ? Qu'il tient à toi ? continue-t-elle, d'un ton sec et tranchant. C'est un piège, Ely ! C'est le genre de type qui te fait croire que tu comptes, que tu es spéciale. Mais dès qu'il aura eu ce qu'il veut, il te laissera tomber !
Ses paroles me frappent en plein cœur.
— Arrête... murmuré-je, plus pour moi-même que pour elle.
— Non, je n'arrêterai pas ! rétorque-t-elle, les poings serrés : Pas tant que tu ne comprendras pas à quel point tout ça est une erreur.
Ma colère gronde en moi, une chaleur sourde qui se fait de plus en plus forte.
— Tu ne comprends pas ! Ce n'est pas... Ce n'est pas comme ça. Il n'est pas comme ça.
Elle éclate d'un rire amer, secouant la tête avec désillusion.
— Vraiment ? Ouvre les yeux ! Tu crois quoi ? Que tu peux le changer ? Que tu es différente de toutes les autres ? Ce type ne changera pas ! Et il t'entraînera dans sa chute, comme il l'a fait pour toutes les autres !
Le silence qui suit ses paroles est glacial. Je sens mes yeux se remplir de larmes, pas parce qu'elle a tort, mais parce qu'au fond, je sais qu'elle pourrait avoir raison. Mais avant même que je ne puisse répondre, la porte du bar s'ouvre en fracas. Une bouffée d'air frais pénètre dans la pièce, mais ça ne me soulage pas.. au contraire. Mon cœur se resserre instantanément. Ses pas résonnent dans le bar, chaque son me frappant comme un coup de marteau tandis que je garde les yeux fixés sur la table. Je la vois se tendre immédiatement, son dos droit et son regard planté sur lui.
— Tu n'as rien à faire ici. lance-t-elle d'une voix glacée, aussi tranchante qu'une lame.
Deaven s'arrête à quelques pas d'elle, son regard impassible fixé sur elle, comme s'il évaluait une menace.
Il est furieux.
— Éloigne-toi.
— Non. rétorque-t-elle sans bouger d'un pouce, campée sur ses positions : Ely ne veut pas te voir. Laisse-la tranquille.
Son regard quitte Ninia pour se poser sur moi, et l'intensité de ce contact me coupe le souffle. Il n'a même pas besoin de parler pour me faire comprendre qu'il n'est pas venu ici pour être repoussé.
— Ely, viens.
Je reste figée, incapable de bouger ou de répondre. Une part de moi veut se lever, obéir, mais une autre... une autre sait que je suis à un point de rupture, que tout ça commence à me dépasser.
— Tu rêves si tu crois qu'elle va te suivre comme un petit chien, ricane-t-elle amèrement.
Mais le tatoué ne rigole pas.. Il fait un pas en avant, si proche d'elle que la confrontation entre eux devient presque électrique.
— Tu crois pouvoir me barrer la route ? gronde sa voix si basse qu'elle en devient terrifiante.
— Essaye moi donc pour voir, réplique-t-elle sans ciller.
Je me lève avant le drame, mes jambes tremblantes.
— Arrêtez, tous les deux !
Les deux se tournent vers moi simultanément, deux regards opposés mais tout aussi intenses.
— Ely, tu n'as pas à... commence-t-elle, mais je l'interromps.
— Je vais parler avec lui.
— Quoi ?!
— Juste... laisse-moi. Je pose une main sur son bras, cherchant à calmer la tempête dans ses yeux : Ça ira..
Elle me dévisage comme si je venais de lui planter un couteau dans le dos. Puis finit par reculer d'un pas en secouant la tête, son visage marqué par une incompréhension douloureuse.
— Tu fais une énorme erreur, murmure-t-elle avant de se détourner pour attraper son sac avant de se diriger vers les autres.
Je la regarde s'éloigner, sa silhouette disparaissant peu à peu, et avec elle, le poids de sa colère et de sa déception s'abat sur moi. Lentement, presque mécaniquement, je tourne mes yeux vers Deaven.
— Qu'est-ce que tu veux ? lui demandé-je, ma voix plus froide que je ne l'aurais cru possible.
Il ne répond pas immédiatement. Son regard me sonde, comme s'il cherchait à lire mes pensées, à capter des réponses qui m'échappent.
— Toi.
Mon cœur rate un battement, mais je reste immobile, me forçant à ne pas céder à cette déclaration brute.
— Tu ne peux pas juste... me prendre. Je ne suis pas à toi.
Un sourire presque imperceptible se dessine sur ses lèvres, un mélange de défi et de quelque chose d'encore plus sombre.
— Pas encore.
Son assurance me désarme, mais je ne recule pas. Cette fois, je dois être forte. Pour moi, pour Ninia, pour ce qui reste de mon contrôle.
— Alors tu ferais mieux d'abandonner maintenant, soufflé-je, bien que ma voix manque de conviction.
Il avance d'un pas, réduisant encore la distance entre nous.
— Ely, murmure-t-il, sa voix douce mais chargée d'un danger latent. Tu peux prétendre le contraire autant que tu veux. Mais tu sais aussi bien que moi que c'est déjà trop tard.
— C'est pour ça qu'on doit arrêter...
— Arrêter quoi ? De t'embrasser ? De te donner ces sensations que tu refuses de nommer ? Ou d'être celui que tu essaies de fuir ? rétorque-t-il dans un rire sans joie.
Je prends une profonde inspiration pour tenter de calmer le tumulte qui fait rage en moi. Ma poitrine se soulève lentement, mais mes mains tremblantes trahissent encore mes émotions malgré moi.
— C'était une erreur..
Ses yeux s'assombrissent immédiatement, et je vois l'impact de mes mots quand il se fige. Ses traits deviennent plus durs et impénétrables. Il se redresse légèrement, ses épaules tendues comme un arc.
— Une erreur ? Sa voix est froide, presque dénuée d'émotion, mais ses yeux... Ses yeux brûlent d'une intensité qui me cloue sur place. Alors dis-moi, Ely, qu'est-ce qui était une erreur exactement ? Que je sois entré dans ta vie ? Que tu m'aies laissé te toucher ? Ou que tu ressentes quelque chose que tu n'es pas prête d'affronter ?
Je me mords l'intérieur de la joue pour me retenir de trembler sous son regard perçant. Une partie de moi veut hurler qu'il a raison, que tout ça m'effraie au point de me donner envie de fuir. Mais l'autre... L'autre refuse de lui donner cette victoire.
— Tout, murmuré-je finalement, le mot glissant hors de ma bouche comme un souffle empoisonné. Tout ça était une erreur. Toi, moi. Ça n'aurait jamais dû arriver.
Il plisse légèrement les yeux, comme si mes paroles l'atteignaient malgré son masque d'indifférence. Mais au lieu de reculer, il fait un pas en avant, réduisant à nouveau la distance entre nous.
— Tu es douée pour mentir, je te l'accorde, murmure-t-il d'une voix grave. Mais pas à moi. Pas sur ça. Je recule instinctivement, mon dos heurtant le bord de la table derrière moi. Il est si proche maintenant que je peux sentir la chaleur de son souffle contre ma peau. Regarde-moi dans les yeux, Ely. Regarde-moi et dis-moi que tu n'as rien ressenti. Que tout ça ne compte pas. Dis-le.
Sa main s'élève, puis effleure ma joue avec une douceur, presque cruelle dans ce contexte. Ses doigts glissent jusqu'à mon menton, qu'il attrape fermement, mais sans brutalité. Puis m'oblige à lever les yeux vers lui. Mon cœur tambourine dans ma poitrine, et je sens mes défenses vaciller dangereusement.
— Je...soupiré-je, mais ma voix se brise, incapable de porter le poids du mensonge qu'il exige.
Son regard s'adoucit, mais ce n'est pas de la compassion. C'est un triomphe silencieux, une victoire qu'il savait inévitable. Il relâche son emprise sur mon menton, mais continue de caresser la ligne de ma mâchoire.
— C'est ce que je pensais, murmure-t-il, son ton lourd de gravité. Alors arrête de prétendre que tu peux te débarrasser de moi. Parce que ça, c'est une illusion. Une erreur que tu ne feras pas deux fois.
Je détourne les yeux, la gorge nouée par un mélange de colère, de frustration et... de quelque chose d'autre..
— Ça n'a pas d'importance, rétorqué-je finalement, ma voix tremblante mais déterminée. Même si c'était réel, ça ne change rien. C'était une erreur. Nous sommes une erreur !
Cette fois, je le vois vaciller, si brièvement que je me demande si je l'ai vraiment vu. Mais il recule d'un pas, retirant sa main.
— Très bien. Si c'est ce que tu veux croire. Son rire est court, amer, mais il n'atteint pas ses yeux. Il se redresse, son expression se refermant. Mais souviens-toi d'une chose, continue-t-il, sa voix redevenue impassible.
— Les erreurs ont des conséquences.
Et sur ces mots, il tourne les talons et s'éloigne pour disparaître dehors.
Je reste figée, le souffle court et le cœur en miettes.