Je me redresse brusquement, les yeux déjà ouverts. Mon cœur lui tambourine dans ma poitrine dans un rythme qui n'a rien de normal. Chaque respiration me brûle la gorge, tant l'air lui semble me manquer. À vrai dire, ce n'est pas tant le rêve qui m'étouffe, mais ce qu'il évoque dans mon esprit, dans ma chair, et dans mon cœur. Il symbolise à lui seul tout le bordel qui rode dans ma tête depuis une éternité. Et putain, je déteste ça. Parce que mine de rien, je m'étais convaincue que je pouvais enterrer ça dans un recoin de ma tête, loin, très loin. Mais c'est foutu ! C'est comme si ce foutu rêve trouvait toujours un moyen de revenir me torturer.
— Fait chier..,
Encore une journée de merde qui commence.
Je m'étire les bras en les levant vers le ciel. Puis, dans la même initiative, je me penche sur le côté avant de balancer la couverture d'un coup de pied, histoire de rapidement me lever du lit, bien que grelottante.
— Pourquoi il fait toujours aussi froid dans cet appart de malheur ? grommélé-je en traînant des pieds jusqu'à la cuisine.
Comme d'hab, mon corps avance mécaniquement, comme s'il essayait de m'encourager à bouger ce qui me sert de jambes. Une nécessité, peut-être, mais qu'est-ce que ça m'épuise. Je tends la main pour prendre un verre que je remplis, puis laisse le liquide glisser dans ma gorge. Une fois fait, je repose le verre sur le comptoir et, instinctivement, mon regard se tourne vers l'horloge du salon.
— Putain de merde... Je vais finir par être virée, c'est sûr, ricané-je nerveusement.
Je cligne plusieurs fois des yeux, espérant que l'heure indiquée soit une hallucination. Mais non.. pas d'erreur possible. Il est bien 18 h 45.
Je suis foutue,
Complètement foutue..
Mon cœur s'emballe de nouveau, comme si la pression n'était pas assez présente dans mon petit corps.
La salle de bain.. Tout de suite.. parce que si je traîne encore, ça sera vraiment la fin des haricots.
Je me dirige rapidement vers la pièce, puis tourne le regard vers le miroir.
— Il me faut un bain et un ravalement de façade à ce niveau... soupiré-je en commençant à retirer mon t-shirt avant de passer mes mains derrière mes côtes.. Sérieusement ?
D'un geste sec, je m'acharne sur l'agrafe de mon soutien-gorge, puis décide d'enlever les bretelles pour le retourner.
— J'ai pas ton temps, malotru.. Allez ! pesté-je, avant d'y arriver.
Libertad !
Un léger ricanement sarcastique s'échappe de mes lèvres alors que ma lutte contre cet accessoire diabolique touche à sa fin. Sans plus attendre, je fais glisser mes doigts vers le cordon de mon short, le défait, puis le fait tomber. Je rassemble le tout avec mon pied, emportant ma culotte dans le tas, avant de jeter négligemment la pile dans la boîte. J'ouvre rapidement le robinet, puis me glisse sous le jet d'eau encore tiède. Un long soupir m'échappe pour se perdre dans l'humidité de la pièce, tandis que la chaleur de l'eau emporte avec elle, toute la sueur qui m'a hantée cette nuit.
— T'es qu'une petite nature —
Ouai..je l'avais presque oubliée celle-là, tiens..
Cette foutue petite voix, toujours aussi tenace pour me démonter le moral, fait maintenant partie de ma vie..
Ce simple petit murmure régulier qui me rappelle au fil des jours que je suis peut-être complètement cinglée.
Ou attardée ? Ouai.. c'est la même chose.
— Je vais me faire tuer...
Je me presse de sortir de la douche, tout en prenant soin d'éviter de m'éclater le cul sur le sol. Je sors, attrape rapidement une serviette sur l'appui, puis l'enroule autour de mon corps. Arrivée prés de l'armoire en terminant de m'essuyer, je me penche puis récupère quelques vêtements aléatoires.
— Un jean et un t-shirt... rien de plus banal, mais ça fera l'affaire.
Parfait.
Maintenant..
Je fais un 360 sur moi-même, puis me penche afin d'attraper ma trousse de maquillage sur le côté. Je m'adosse face au miroir et en quelques gestes, je trace un trait d'eyeliner précis avant d'appliquer une couche rapide de Rimmel.
Je recule légèrement pour examiner le résultat dans le miroir.
— Pas mal du tout, hein ! sourié-je en me saisissant de ma brosse à cheveux pour brosser ma chevelure de Raiponce.
Je démêle le tout, puis prends quelques minutes pour lisser mes mèches, que je finalise avec quelques boucles avant de jeter un dernier coup d'œil à l'horloge dans le salon.
— C'est définitif.. Je suis foutue, murmuré-je avec un léger sourire. Mieux vaut être en retard que mal préparée, non ?
— Bien sûr ! ça servirait à quoi si t'es virée ?—
Je déglutis ma salive, avant de secouer la tête, juste pour chasser cette petite voix de merde. Je me dirige ensuite vers le salon, récupère ma veste et mon sac posés sur le tabouret de la cuisine. Mon regard parcourt rapidement la pièce. Rien ne semble manquer, alors je me retourne vers la porte d'entrée, prête à affronter cette journée... ou à m'y perdre, une fois de plus. Mais, arrivée devant la porte, l'hésitation me fige un instant sur place.
— Ta rien oublié, sale cruche ?—
— Si..
Je me retourne à nouveau puis saisis mon téléphone d'un geste vif avant de revenir vers la porte. Une fois dehors, je sors la clé de mon sac, verrouille la porte, mais, comme toujours, la serrure décide de faire des siennes. Alors, je ronchonne, agacée, puis insiste en tournant la clé d'un mouvement sec de nouveau.
— Cette fois, c'est bon,
Devant moi, la ruelle s'étire sombre et menaçante. Alors, d'un geste simpliste, je remonte ma capuche et la glisse sur mes cheveux. Juste histoire de me protéger du froid... ou peut-être de cette atmosphère qui semble s'accrocher à ma peau. Une alternative plus que désespérée. Je descends rapidement les escaliers, mes pas résonnent sur le béton alors que l'obscurité m'entoure, tel un manteau trop grand. Mon regard balaie instinctivement les silhouettes floues qui se détachent dans la pénombre. À ma gauche, des toxicomanes traînent dans l'ombre de manière désordonnée et désespérée. Plus loin, des alcooliques qui vacillent ou s'engueulent, leurs voix rauques entrecoupées de rires nerveux. Et sous les lampadaires dont la lumière vacille, des prostituées qui fixent les passants. Chaque détail renforce le poids de cet endroit, mais je ne ralentis pas. Après tout, c'est devenu une habitude, presque une routine maintenant. Cette scène fréquente fait maintenant partie intégrante de ma vie quotidienne.
— Y'a pire rooh.. —
Je ferme les yeux, juste un instant, tout en poursuivant mon chemin, mes sens en éveil. Chaque bruit apparaît comme une menace potentielle, prête à bouleverser l'équilibre fragile de ma vie. Lorsque je rouvre les yeux, mon regard est captivé par les néons blafards des lampadaires qui me surplombent. Mais je ne m'y attarde pas et atteins rapidement l'embranchement familier du trottoir, sur lequel je me fige un instant. Mes doigts glissent machinalement dans la poche de mon sweat, en quête de ce qui est devenu une habitude.
Ma cigarette.
Je sors le paquet, puis en place une entre mes lèvres. La première inhalation remplit mes narines, puis mes poumons. Je garde un peu la fumée avant de la laisser s'échapper en volute. Mes yeux, eux, se perdent un instant dans le ciel sombre, lorsque le bruit strident d'un klaxon me ramène brusquement à la réalité. Je sursaute, puis pose mon regard immédiatement sur la rue animée où des phares illuminent des voitures entassées.
Cette voiture noire. J'ai l'impression de l'avoir déjà vue..
Merde, j'ai oublié où..
La voiture s'arrête au feu rouge, et je ne peux m'empêcher de détailler chaque aspect du véhicule dans l'initiative de peut-être récupérer la mémoire ou de me souvenir. Je me perds lentement dans les détails, la brillance de la peinture, les reflets, ou encore les néons qui dansent sur ses vitres teintées. Ce qui, soit dit en passant, ajoute une couche de mystère à son allure déjà fascinante. Ne trouvant rien d'autre, je détourne finalement les yeux tout en feignant une indifférence que je ne ressens pas. Mais ma curiosité beaucoup trop grande me trahit, alors, du coin de l'œil, je la regarde. La voiture marque une longue pause alors que le feu vient de passer au vert. Ce moment fugace d'immobilité, cette petite seconde d'attente, éveille en moi un frisson. Puis finalement, elle se met enfin en marche et s'éloigne.
— Trop cheum...
Je souffle un rire léger, presque cynique, puis reprends ma route une main enfoncée dans la poche de mon sweat. Peu importe.. Je tire une autre bouffée de ma cigarette, puis observe à nouveau la fumée qui s'élève et se dissipe. En l'observant, je viens presque à penser que ce serait plus facile si je pouvais m'évaporer ainsi, comme cette fumée. Mais je ne peux pas m'y attarder. Surtout quand un frisson comme celui-ci me parcourt et dresse les poils sur mes bras. Instinctivement, mon regard se met en alerte et fixe tout ce qui bouge autour. Je les sens. Les regards furtifs, ceux des silhouettes tapies dans l'ombre, de ces figures anonymes qui peuplent les recoins de la ville. Ces yeux qui scrutent, jugent et dévorent avant de te faire courir.
Ils ne m'intimident pas, ils ne m'intimident pas... Ils ne sont rien de plus qu'une partie du décor...
Tout en essayant de me convaincre, je me redresse droite et décide de marcher la tête haute.
Ce soir, il ne gagnera pas.
J'écrase mon mégot contre le trottoir, observant la braise s'éteindre, avant de me remettre en mouvement. Mes jambes suivent automatiquement le chemin vers la boîte de nuit où je travaille. Chaque pas semble marteler une vérité que j'aimerais fuir, celle qui dit " je suis ici par nécessité, pas par choix." Les dettes s'empilent autour de moi, comme une cage invisible dont les barreaux se resserrent à chaque respiration. Il n'y a pas d'échappatoire, pas pour moi.
— S'il était mort, j'aurais pas ce foutu problème ! lâché-je en colère, avant de fermer les yeux un instant pour faire passer ce poids en moi.
Le vent qui s'infiltre dans mes poumons me brûle comme une tentative de purification que je sais inutile.
— Pathétique. —
— Ta gueule avec ce mot. marmonné-je dans un murmure haineux.
Je secoue la tête, puis trottine afin de traverser la chaussée, le bruit des talons qui claquent sur le sol fait écho à l'agitation dans ma tête. Plus je m'approche de la boîte, plus la musique se fait forte, comme une vague déchaînée qui se rapproche, mais qui me rassure. J'arrive rapidement devant la porte ornée de graffitis, avant d'empoigner la poignée de mes mains crispées sans l'ouvrir. J'ai besoin d'un peu de courage.. Mon cœur bat à tout rompre dans ma poitrine, il bat tellement vite qu'il augmente cette sensation d'oppression qui me serre et s'engouffre dans mes veines. Allez, Ely, tu peux le faire... Je prends une profonde inspiration, puis pousse la porte en grand pour rentrée. Une fois à l'intérieur, je balaie la pièce du regard, cherchant un endroit où me fondre. Puis, je m'avance, chaque pas me détachant un peu de mes pensées. Les visages autour de moi sont un mélange de bonheur et de débauche, un enchevêtrement d'âmes perdues dans l'instant présent. C'est tout ce dont j'ai besoin ! Je me faufile entre les corps, leur chaleur m'enveloppant alors que je me dirige vers le vestiaire.
— Hey, Ely ! s'écrie la voix familière de Ninia derrière moi.
Je me retourne et l'aperçois avancer toujours aussi souriante, les bras grands ouverts pour m'accueillir dans un câlin réconfortant. Son étreinte agit comme un baume apaisant qui efface les démons qui m'ont suivie jusqu'ici.
— T'es encore en retard ! me lance-t-elle, un sourire malicieux sur les lèvres, ses yeux pétillants de malice.
— Oui, je sais, marmonné-je, en frottant ma nuque : Si ça continue, je vais me faire virer.
Elle fronce les sourcils.
— Tu rigoles ?! Tu n'as vraiment pas envie de voir la tête de Tiago s'il t'entendait !
Je lève les yeux au ciel, feignant l'étonnement.
— Vraiment ? Je devrais m'en réjouir ou en pleurer ?
— Oh, crois-moi. . . tu devrais prendre un plaisir sadique à voir son petit visage en détresse ! rétorque-t-elle en riant, avant de prendre une autre expression comme si une idée lumineuse venait de la frapper. Attends, j'allais oublier !
Elle s'incline finalement vers moi, un air furtif sur le visage, comme si elle s'apprêtait à me confier un secret inavouable.
— Quoi ? demandé-je intriguée.
— J'ai vu des hommes dans la salle... Ils sont magnifiques ! lance-t-elle, les yeux brillants d'étoiles.
— Quand tu es comme ça, on dirait une perverse, retorqué-je sans m'empêcher de rire.
Nos regards s'entrelacent et instantanément nos sourires s'élargissent dans une complicité.
— Je sais que ça ne t'intéresse pas en ce moment. Mais un peu de distraction, ça ne fait pas de mal, non ? soupire-t-elle en secouant la tête.
La voix de Tiago surgit de derrière nous, se rapprochant un peu..
— Vous êtes vraiment des filles... commence-t-il, un mélange d'amusement et de sérieux dans la voix. Et je dois admettre que j'apprécie la vue. Mais, le travail commence bientôt et nos danseuses ne sont toujours pas prêtes.
Son regard passe de Ninia à moi, et je sens mes joues devenir rouges de honte sous son observation.
— Lui aussi pourrait servir de quatre-heures, non ? murmure-t-elle à mon oreille.
Sans réfléchir, je lui donne un coup de coude. Ce geste lui arrache un rire, alors que je détourne rapidement les yeux, presque gênée. Okai.. même si ce n'est pas mon style.. Je ne peux pas vraiment lui donner tort. Tiago n'est pas désagréable à regarder. Il est même plutôt canon, en fait. Un vrai côté bad boy. Qu'est-ce que je raconte ? Oulà. Je secoue la tête, chassant ces pensées pour me concentrer. Elle, toujours aussi espiègle, capte mon regard et me lance un sourire provocateur. Je l'ignore et me lève d'un mouvement vif, prête à partir.
— Dépêche-toi ! soupiré-je, malgré le stress qui m'étreint.
Je l'observe passer rapidement ses cheveux derrière ses épaules, dévoilant un peu plus son décolleté.
Elle est l'insouciance incarnée, hein..?
Rencontre avec Ninia, 5 ans plus tôt. 💗🤗
La nuit est tombée. Je marche sans réel but, mes pas résonnent sur le pavé humide comme un bruit ancré. Alors que tout en moi aspire à fuir, à m'échapper de cette colère, de cette douleur et de ce monde qui me dévore. Je ne souhaite rien d'autre que de disparaître, d'effacer chaque souvenir qui me hante. En relevant la tête, mes pas s'arrêtent devant un bâtiment au mur décrépit. L'enseigne, à moitié rouillée, clignote faiblement.. L'excitation mêlée à l'inquiétude me ronge alors que je pousse la porte. À l'intérieur, le bruit ambiant me frappe immédiatement comme une vague de chaleur. Je me faufile dans la salle, cherchant à me fondre dans la foule. Je contourne une table où des gens échangent des regards furtifs et des sourires complices. Ce monde est si vivant qu'il m'attire, mais en même temps me laisse un goût amer, comme une sensation d'inadéquation.
Un lieu où je n'ai pas ma place..
Mon regard parcourt la salle.. Et c'est là que je la vois. Elle se tient à l'écart, un verre à la main. Ses cheveux châtains descendent en ondulations sur ses épaules. Et ces yeux... Ces yeux marron qui rayonnent d'une lueur envoûtante se posent sur moi avec une curiosité apaisante. Je fais un pas en avant, le cœur battant à toute vitesse sous l'emprise de cette attraction silencieuse.
— Qu'est-ce qu'une fille comme toi, fait ici ? me demande-t-elle, un sourire léger et presque taquin sur les lèvres.
— Ça se voit pas ? rétorqué-je avec une touche de sarcasme : Je fuis.
Un éclat d'amusement passe dans ses yeux, tandis que son sourire s'élargit légèrement. Comme si elle venait de saisir quelque chose que je n'avais pas l'intention de lui dire, mais qu'elle avait deviner quand même.
— Fuir, c'est lâchement éphémère.
Elle a raison.. Bien sûr. Mais affronter ma colère... c'est réveiller une bête que je préfère garder endormie.
— Et toi, que fais-tu ici ? demandé-je avec un brin d'intérêt piqué par son calme.
Je la regarde s'approcher lentement. Elle dépose son verre sur la table avec délicatesse, puis plante ses yeux dans les miens. Ces yeux... sont si intenses qu'ils semblent sonder chaque recoin de mon être.
— Moi ? Je suis ici pour sauver quelques âmes perdues. murmure-t-elle avec sa voix presque intimidante : Ça te dit d'en parler autour d'un autre verre ?
Je sens une hésitation naître en moi, presque instinctive à cause de mon réflexe de défense. La méfiance est toujours là en arrière-plan, sans doute prête à me rappeler de rester sur mes gardes. Mais, je suis fatiguée de ma propre colère qui ne cesse de me submerger. Alors, sans réfléchir davantage, je lui tends la main qu'elle prend avec un sourire sincère.
Peut-être..
Peut-être que ce n'est pas un simple hasard.
Peut-être que ce moment marque le début d'un nouveau chemin que je n'avais pas vu venir, mais que je veux explorer.
Ely, Retour au présent.💗
Concentre-toi.
Reste ancrée dans le présent.
Ninia m'attend déjà sur scène, et sa silhouette semble m'inviter. Cependant, une familiarité angoissante me paralyse sur place. Je m'immobilise, le cœur loupant un battement avant de s'emballer. Je sais que c'est Tiago, mais il ne prononce pas un mot, mais son regard en dit énormément... J'aspire à m'en aller, à fuir, mais mes jambes demeurent figées, comme si elles étaient ancrées dans le sol.
— On peut parler, Ely ?
Qu'est-ce qu'il me veut encore ?
— Tu sais très bien, imbécile —
Ferme la connasse!
Je jette un coup d'œil rapide vers Ninia, qui me fait un clin d'œil complice avant de reprendre sa danse.
Super, elle me laisse seule face au jury.
Une boule de stress se forme dans mon ventre, mais je m'efforce de poser un sourire sur mon visage, celui de la fille mignonne que je me force d'être, puis me retourne.
— Qu'est-ce qu'il y a ? demandé-je d'une voix légèrement plus douce que prévue.
Il me scrute avec ses yeux gris perçants, comme s'il essayait de percer mes secrets.
— Tu sais que tes retards posent problème, n'est-ce pas ?
Ugh, je déteste quand il joue les professeurs.
— Désolée, j'ai eu quelques imprévus... murmuré-je en baissant la tête.
— Des imprévus, vraiment ? dit-il en croisant les bras avec un léger sourire en coin : Tu sais qu'on a besoin de toi ?
J'avale ma salive puis hoche rapidement la tête, bien consciente de l'importance de ma présence. C'est tellement typique de ma part de fuir mes responsabilités pour des petites choses sans importance.
— Je sais. Je vais rester une heure de plus aujourd'hui pour me faire pardonner.
Est-ce que je peux vraiment le faire ?
— Je ferai de mon mieux. rétorqué-je d'un ton assuré, bien que ma tête soit en pleine rébellion.
Il me fixe un instant, son regard intense s'accrochant au mien, et je sens le poids de sa présence peser sur mes épaules. Puis, comme si rien ne s'était passé, ses traits se détendent dans un sourire à la fois énigmatique et désarmant.
— Bien, c'est ce que je veux entendre. Maintenant, vas-y et fonce.
Je lui rends un sourire timide, soulagée de ne pas être confrontée à la tempête.
— Merci. Je m'y mets tout de suite !
Je m'éloigne rapidement, bien que son regard reste toujours sur moi. Mon cœur, lui, continue de battre plus vite, mais je me force de garder mon calme tout en me précipitant vers les vestiaires. Ce n'est qu'un contretemps... Rien de plus. Je secoue la tête, tentant de chasser ces pensées, puis j'inspire profondément.
Je vais m'en sortir, comme toujours !
Après tout, je sais que, quoi qu'il arrive, je ne vais pas me laisser abattre !
— Alors, qu'est-ce qu'il t'a dit ? demande Ninia en me sortant de mes pensées, un sourire malicieux sur le visage.
— Juste qu'il faut que je me dépêche et que j'évite d'être en retard, rétorqué-je en roulant des yeux pour feindre l'indifférence.
— Tu plaisantes ?! Il doit avoir un faible pour toi, je ne vois pas autrement ! s'exclame-t-elle en éclatant de rire.
Je secoue la tête, un sourire fragile se formant là où l'embarras devrait prendre place dans une telle situation.
— Arrête, tu sais très bien que ce n'est pas vrai.
— Qui sait ? Peut-être qu'il attend juste le bon moment pour le dire !
Elle me pousse doucement, et je ne peux m'empêcher de rire. Peu importe ce qui s'est passé avant, je suis là pour danser et rien ne pourra m'en empêcher ! Je monte sur la scène déterminé à la rejoindre, nos regards se croisent alors qu'un sourire complice naît entre nous.
Aucun besoin de parler, on se sait.
La musique monte rapidement dans les basses, enveloppant la pièce de vibrations puissantes sous le rire des clients.
Ninia se rapproche, alors que mon regard s'attarde brusquement sur son petit sourire malicieux et espiègle. Inutile de poser la question. Je sais précisément qu'elle a vu quelque chose ou quelqu'un qui l'intéresse.
Car peu importe ce qu'elle dira, son regard parle grandement pour elle.