J'étends plus ou moins la conversation de Mia avec son père mais je n'aime pas écouter aux portes alors je dirige mon attention vers mon téléphone
Papa: T'es passé où ? Rentre à la maison. Maintenant.
Je me raidis, ma mâchoire se contracte aussitôt. Je tape une réponse sèche:
Non
Quelques secondes plus tard, une autre notification s'affiche
Papa: T'as intérêt à être là demain matin.
Je verrouille mon téléphone et serre le poings. Au même moment Mia fait son apparition dans la chambre.
- Ça va ?
Je ferme les yeux un instant, ma respiration plus lourde.
- Il s'en foutait quand j'étais à l'hôpital et maintenant, il donne des ordres.
Je n'ai pas besoin de lui donner plus de détails, elle comprend que je parle de mon père. Je ne veux pas en parler d'avantage alors je continue
- Ton père est en colère ?
- Non ça va, il a compris
- Il veux que je m'en aille ?
- Non, il veux que tu viennes manger.
L'étonnement doit se lire sur mon visage puisqu'elle rit légèrement
- Aller viens
Je la suis jusqu'à la cuisine ou une bonne odeur vient me chatouiller les narines, mon estomac se met doucement à gargouiller quand je réalise que je n'ai pas mangé depuis que mon père est venu me chercher au lycée.
L'homme qui s'affaire en cuisine se retourne et me fixe
- Bonsoir Monsieur
- Benjamin c'est ça ?
- Oui c'est ça. Je voulais déjà m'excuser pour les ennuis que j'ai causé à Mia et vous remerciez de m'accueillir.
- J'apprécie que tu t'en rende compte, mais que ça ne se reproduise pas. Aller à table, le dîner est prêt.
Je prends place et apprécie le repas, j'avais vraiment faim. L'ambiance est détendue, presque comme si ce repas était prévu et que j'avais réellement été invité. Son père à fini par se détendre un peu plus mais je le sentais encore sur la réserve. C'est normal, il ne me connaît pas et je débarque comme ça, ça fille sèche à cause de moi et il doit en plus me nourrir et me loger. Si j'avais une fille, je ne suis pas certain que j'aurais aussi bien réagi.
Je vois bien que leur relation est particulière, rien à voir avec celle que j'ai avec mes parents. Son père la protège tout en lui faisant vraiment confiance.
Je ne réalise que maintenant que Mia ne m'a jamais parlé de sa mère et qu'elle n'est pas présente. Ces derniers mois on été rythmé par les drama avec Valentin, et finalement nous n'avons pas prit le temps de réellement discuter de beaucoup d'autre chose.
Une fois le dîner terminé j'aide à débarrasser et ranger avant que Mia n'interpelle son père
- On va monter
Son père se crispe et nous regarde mais reste silencieux alors Mia se met en marche et me tire par la manche pour que je la suive rapidement, sûrement de peur que son père change d'avis et me mette à la porte.
Une fois en lieux sûrs Mia referme la porte derrière nous et expire de soulagement
- Bon, finalement ça c'est bien passé
- Tu en doutais ?
- J'en aurais pas mis ma main à couper
- Il était comme ça aussi quand Valentin venait dormir ?
- Il n'a jamais dormis ici...
- Dîner ?
- Non plus... Mon père ne l'a jamais vraiment vu, encore moins à la maison.
Je comprends mieux les réactions de son père. Et je ressens presque de la satisfaction à savoir que je suis le seul à être venu ici.
D'un coup la porte de Mia s'ouvre sur son père, des affaires dans les mains.
- Mia qu'est-ce que j'ai dit sur cette porte
- Désolé c'est un réflexe
- Benjamin, cette porte va rester ouverte. Grande ouverte. Toute la nuit.
- Oui monsieur
- Si je passe encore une fois devant une porte close tu dors sur la terrasse, compris ?
- Oui monsieur...
- Tiens une serviette et des affaires pour dormir. Si je te croise dans cette maison, ou sortir de cette chambre en caleçon c'est sous la terrasse que tu finis.
- C'est bon papa, on a compris. Porte ouverte, pyjama d'hiver et barrière d'oreillers entre nous.
Son père lui lance un regard foudroyant, il n'a pas vraiment envie de rire. Il dépose les affaires sur le bureau et prend bien soin de laisser la porte grande ouverte avant de partir.
- Va prendre une douche si tu veux, la salle de bain est en face.
- Merci
Je prends les affaires déposer par le père de Mia et me dirige vers la salle de bain.
L'eau brûlante coule sur moi, l'odeur du gel douche à la noix de coco me fait prendre conscience que je puais l'hôpital. Tout repasse en boucle dans ma tête et les larmes coulent sans que je ne m'en rende compte. Comment on se remet de ça ? Je n'ai jamais perdu quelqu'un, pas dont je me souviens, j'étais vraiment petit quand mes grands-parents sont décédés, il ne reste que Georgette.
Quand je sors de la salle de bain, le choc de température me saisit, j'ai vraiment mit l'eau très chaude. Je rejoins Mia dans sa chambre, elle est assise en tailleur sur son lit et zappe les chaînes a la télé. Elle porte son attention sur moi quand je pose mes affaires sur son bureau.
- Ça va ?
- Hum
C'est tout ce que j'arrive à sortir, les yeux encore endoloris par les pleurs.
- Installe-toi, je vais me doucher, j'arrive.
Elle me tend la télécommande et rejoins la salle de bain à son tour.
Quand elle revient au bout d'un moment, je me suis déjà installé sous la couette, adossé contre la tête de lit et je regarde une émission débile sans vraiment y faire attention. En rentrant elle pousse un peu la porte
- Mia j'ai pas envie de finir sous votre terrasse, laisse cette porte tranquille.
Elle rit doucement et la remet en place avant de me rejoindre dans le lit. J'avais un peu froid et sa présence réchauffe instantanément la pièce, elle sent bon, un mélange de noix de coco et de framboise.