Quand je me réveille, Mia n'est plus là. La chaleur de son corps contre le mien a disparu. Je m'assois lentement sur le bord du lit, je me demande depuis quand elle est partie. Je passe un main sur mon visage, mes muscles sont encore fatigués, mon esprit embrouillé.

Je sors de la chambre et me dirige vers la cuisine, attiré par le bruit qui en émane. J'espérais y trouver Mia, mais je tombe sur son père. Il se retourne et m'observe.

- Pas de caleçon en vu, la terrasse ne te tente pas ?

- Pas vraiment non..

- Installe toi, Mia est en cours. Tu devrais aussi d'ailleurs.

Je ne peux pas lui en vouloir, il n'est pas au courant, mais sa remarque ravive la douleur dans ma poitrine. Je m'assois à table, tout est sorti comme si j'habitais là.

- Mia t'as tout préparé.

J'ai déjeuné rapidement, rester dans cette maison me fait du bien mais il faut que je retrouve vite la réalité avant que ça ne soit plus possible. J'ai encore remercié le père de Mia et me suis mit en route pour chez moi. Je n'en ai aucune envie.

Une fois planté dans l'allée de la maison je sens une angoisse montée mais il faut que je prenne sur moi.

J'ouvre lentement la porte. Rien n'a changé ici. Tout est impeccablement rangé, froid, impersonnel comme d'habitude.

- Ah, te voilà ! Mais enfin Benjamin où étais tu ? Demande ma mère

- Ça ne te regarde pas.

- Je te demande pardon ?!

Cette irrépressible colère qui gronde en moi depuis l'annonce du médecin menace d'exploser.

- Continue de t'occuper de tout sauf de tes enfants, tu n'existes plus pour moi depuis que Louis est parti par ta faute.

C'est dur mais c'est ce que je ressens. Nathalie ne s'est jamais comportée comme une mère avec moi, même Maria s'est plus impliquée qu'elle. Toujours absorbée par son travail, mon père n'était pas mieux mais lui au moins n'a pas laissé Louis mourir sous sa pseudo-surveillance. Elle, si.

Je vois le choc que provoquent mes mots sur ma mère

- Tu es injuste Benjamin ! Je n'ai jamais voulu ce qu'il s'est passé ! C'était un accident !

- Un accident qui ne serait pas arrivé si tu l'avais surveillé ! Qu'est-ce que tu faisais, hein ?! Tu étais sûrement loin de lui, absorbée par ton putain de boulot, comme toujours ! Tu faisais pareil quand j'étais gamin, les rares fois où tu t'occupais de moi !

J'explose. Toute ma haine sort et je ne suis pas certain de pouvoir la ravaler un jour.
Mon père finit par arriver dans l'entrée sûrement alerté par mes hurlements.

- Benjamin !

- Quoi ?! Tu la défends ? Louis est mort bordel ! Même ça ton cœur de pierre ne le voit pas ? C'est de sa faute !

- C'est ta colère qui parle, ne dis pas des choses pareilles à ta mère !

Un rire amer sort de ma bouche

- Ma colère ? Évidemment que c'est ma colère ! Comment ne pas l'être ?! Vous êtes sur une autre planète, persuadés d'être de bons parents, attentionnés et aimants ? Vous ne l'êtes pas ! Finalement c'est peut être mieux pour Louis d'être parti si jeune, il n'a pas eu le temps de se rendre compte comme moi, des parents pitoyables que vous êtes.

Je crache mes derniers mots et à peine ma phrase terminée, mon père me décoche une gifle phénoménale.

- Sors de cette maison !

Cette fois c'est lui qui hurle. Je le fixe le regard noir et sans un mot de plus je sors de cette maison qui n'est plus la mienne.