Un lourd claquement de porte me fait sursauter et fait voler en éclats cette bulle dans laquelle nous étions. Je recule ma tête et regarde Benjamin avec de gros yeux quand une voix grave retentit dans la maison.

- Benjamin !!

- Merde. Dit-il en se relevant de son lit. Ne bouge pas d'ici d'accord ?

J'acquiesce en un hochement de tête, paniqué de lui causer des problèmes. Il se dirige vers la porte de sa chambre et la referme derrière lui.

- Explique-moi très vite pourquoi le lycée m'a appelé pour me prévenir que tu n'étais pas en cours ?! Hurle l'homme en bas.

J'entends les craquements de l'escalier indiquant que Benjamin descend affronter ce que je suppose être son père, son père très en colère... Je me rapproche de la porte pour écouter sa réponse.

- Je ne me sentais pas bien, alors je suis rentré m'allonger, tu pourras demander à Maria, elle était là quand je suis revenu.

- Écoute-moi bien, je te laisse le bénéfice du doute, mais c'est la première et dernière fois que tu loupes les cours sans autorisations cette année. Si tu te sens mal, tu nous appelles et on avise. J'ai été assez clair, il me semble l'année passé, finit les conneries, tu files droit si tu ne veux pas que je devienne un plus gros problème. Et réponds à ton putain de portable quand je te contacte !
L'homme hurle moins fort, mais toujours assez pour que je l'entende parfaitement.

- C'est noté.

- Tu n'as pas l'air à l'article de la mort donc tu retournes en cours cette après-midi, à moins que je doive t'emmener aux urgences ?

- Non papa, ça ira.

- C'est bien ce que je pensais. La prochaine fois que je dois me déplacer et m'absenter du travail pour tes conneries, crois-moi bien que ça se passera très mal pour toi.

J'entends la porte claquer à nouveau et des pas dans l'escalier. La porte s'ouvre et je manque de tomber.

- Tu as tout entendu ?

- Difficile de ne pas entendre...

-Désolé, il peut avoir des réactions un peu démesurées parfois.

- Je suis désolé de t'avoir créé des problèmes...

- Tu n'a rien fait du tout Mia, c'est moi qui t'ai proposé et je ne regrette pas. Son petit sourire en coin plein de sous-entendu

- Tu as eu des problèmes l'année dernière ?

- Quelques-uns. Rien de grave, mais mes parents sont assez stricts avec moi surtout pour les cours.

- C'est pour ça que tu viens d'arriver au lycée ?

- Oui mon père m'a dit que je devais changer de fréquentations, il est plutôt radical comme tu vois. Tu retournes en cours avec moi ou je te raccompagne chez toi ?

- Je préfère rentrer, j'ai besoin de me reposer et de digérer ce qu'il s'est passé ce matin.

- Je comprends, en route alors.

Nous nous mettons en route silencieusement vers chez moi, ignorant qu'il y a quelques minutes nos lèvres étaient sur le point de se rencontrer.
Je ne sais pas ce que je fais, mais une chose est sûre, j'apprécie énormément Benjamin. Je le connais peu, mais il est plus attentionné que la personne qui partageait ma vie depuis quatre ans. Mais je ne peux pas non plus le faire espérer quelque chose alors que mon cœur n'est pas disponible. Je ne veux pas l'utiliser comme un pansement, il ne le mérite pas. Il va falloir que je prenne un peu de distance.

Arriver devant chez moi, je le remercie d'avoir pris soin de moi ce matin, comme souvent dernièrement et lui souhaite une bonne après midi avant de lui faire un bisou sur la joue et de rentrer chez moi.

Je décide d'enfin regarder mon téléphone que j'avais complètement délaissé et je vois beaucoup de messages des filles qui me demandent comment je vais et de mon père qui me demande où je suis... Je réponds à mon père que je suis à la maison et aux filles que ça va aller.

Vers 18 h, mon père rentre à la maison et je remarque son visage plus fermé que d'habitude...
C'est partit...

- Salut papa...

- Je peux savoir où tu étais aujourd'hui ? Il ne crie pas comme le père de Benjamin, mais je sens l'agacement dans sa voix.

- Je suis rentrée à la maison, ça n'allait pas trop...

- Tu ne pouvais pas me prévenir avant que le lycée ne m'apprenne que tu n'étais pas en cours ?

- Je n'y ai pas pensé...

- Pourquoi tu as mis autant de temps à me répondre ? Tu n'as pas non plus pensé que j'aurais pu m'inquiéter ?

Je sens mon nez me picoter et mes larmes monter.
Non papa, je n'y ai pas du tout pensé...

Mon père est de nature plutôt calme, il est compréhensif et a toujours préféré que je lui parle de mes bêtises plutôt que de l'apprendre par quelqu'un d'autre. Sentir qu'il est déçu me fait de la peine.
Les yeux baissés les premières larmes s'évadent en silence et mon père me prend dans ses bras.

- Aller, raconte moi trésor.

Je décide qu'il est temps de lui expliquer ma relation avec Valentin, oubliant délibérément les passages de violence, je ne veux pas qu'il finisse en prison pour meurtre...
Mon père ne semble pas très surpris, mais quand même en colère.

- Pourquoi tu ne m'as jamais rien dit Mia ?

- Je savais que le jour où je t'en parlerais ça voudrait dire que c'est vraiment fini, pas de retour arrière possible...

- C'est ta vie ma fille... Bien sûr que je veux le meilleur pour toi, que ton cœur ne souffre jamais, mais je sais aussi que je ne peux pas te protéger de tout, tu dois faire tes propres expériences, vivre tes propres chagrins pour grandir et te forger. J'aurais pu te conseiller, je ne suis pas ta mère, mais je pense pouvoir être de bon conseils. Ne me cache plus rien, d'accord ?

- Merci papa...

Je ne m'attendais pas à moins venant de lui, cet homme est vraiment incroyable. C'est le premier homme de ma vie, il prend toujours soin de moi, même quand il est en colère, il essaie de ne pas être trop dur. Ma maman me manque chaque jour, mais je sais que si mon père n'était pas comme il l'est, l'absence aurait été beaucoup plus pesante. Il a pris son rôle, malgré son chagrin et il n'a jamais failli.