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1 - Préface
2 - Prologue
3 - Chapitre 1
4 - Chapitre 2
5 - Chapitre 3
6 - Chapitre 4
7 - Chapitre 5
8 - Chapitre 6
9 - Chapitre 7
10 - Chapitre 8
11 - Chapitre 9
12 - Chapitre 10
13 - Chapitre 11
14 - Chapitre 12
15 - Chapitre 13
16 - Chapitre 14
17 - Chapitre 15
18 - Chapitre 16
19 - Chapitre 17
20 - Chapitre 18
21 - Chapitre 19
22 - Chapitre 20
23 - Chapitre 21
24 - Chapitre 22
25 - Chapitre 23
26 - Chapitre 24
27 - Chapitre 25
28 - Chapitre 26
29 - Chapitre 27
30 - Chapitre 29
31 - Chapitre 29
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Chapitre 7

Jamais encore il n’avait autant fréquenté les infirmeries, encore moins pour des blessures quelconques. À croire que cela risquait de devenir une habitude…

Les coussins sous ses jambes l’aidaient à se stabiliser sur le lit médical, l’infirmier face à lui enlevait soigneusement ses bandages, révélant les différents plaies et hématomes sur sa peau. Maximilien ne détachait pourtant pas son regard de Nora, ce dernier se tenait à quelques mètres d’eux, les bras croisés. Il était venu le chercher de son propre chef plutôt que d’envoyer un serviteur, juste pour l’amener ici ? 

Un comportement étrange pour un membre de la famille royale. 

Enfin, même s’il ne les avait pas encore tous rencontrés concrètement, Kahl et Nora entraient en totale contradiction avec l’idée dont il se faisait des Morgas, ou de ce que les livres avaient dépeint d’eux : des monstres assoiffés de puissance, contre toute forme de règle morale et incapable d’éprouver la moindre preuve d’empathie. Les rares fois où ses compères à Sarcoce lui avaient autorisé à admirer le monde des humains par les orbes dédiés à cela, c’était pendant les guerres ou les conflits opposant les Lomes et les autres pays, toujours du point de vue des premiers. 

Maximilien n’était pas stupide, il savait que c’était une position foncièrement adoptée par les siens, mais il ne s’attendait pas à une différence aussi énorme entre la réalité et les livres, la théorie. Du moins, pour l’instant, rien ne correspondait aux dangereux êtres sanguinaires qui pourraient tuer pour un peu de pouvoirs. Puis plus le temps avançait, plus il se rendait compte qu’il ne connaissait que les Morgas de nom : combien d’autres familles habitaient entre ces murs ? N’y avait-il qu’eux ? Cela lui semblait totalement impossible. 

Il ne devait pas baisser sa garde, mais rien ne prouvait qu’ils étaient des tortionnaires sadiques et fous. La seule violence à laquelle il avait assisté pour l’instant, c’était la mort brutale de cet homme par Almagar, et ce n’était que de la légitime défense dans les faits. La meilleure attitude à adopter était l’innocence et la méfiance, il passerait pour un simple humain sans danger qui ne sait pas où il avait atterri et qui restait craintif. Parler, questionner, s’effacer, c’était tout ce qu’il devait faire et, avec un peu de chance, il pourrait partir de cet endroit. 

Mais dans quel but ? Sans ses pouvoirs, personne ne pouvait le retrouver et il lui était impossible de revenir à Sarcoce pour plaider sa cause, sans compter que ce serait du suicide de le faire : avec la mort de Dual, le chaos devait régner en maître chez lui, et tout le monde le pointait du doigt à tort, avec des raisons qui lui échappaient… La seule façon pour lui d’affronter cette injustice, c’était de trouver une preuve et l’orbe à sa cheville représentait un élément vital pour cela. 

Sauf qu’il ne savait pas l’utiliser. Dans ses souvenirs, aucun apprentissage n’avait mentionné le maniement d’une telle chose ou une quelconque manière de l’exploiter. Il avait beau réfléchir, quelque chose ne collait pas : l’accuser lui spécifiquement pourrait simplement être un dommage collatéral. Il n’était peut-être pas visé, mais il fallait un coupable. Vu qu’il était en formation pour devenir l’un des Piliers, Prilios, l’incarnation de l’existence et du temps, il représentait un assassin parfait, quelqu’un d’assez proche de Dual pour en vouloir à sa position. 

Mais pourquoi maintenant ? L’équilibre avait toujours été excellent, personne ne se plaignait et les pouvoirs étaient toujours distribués équitablement. Dual n’avait jamais cherché à les dominer, bien au contraire : les Piliers et les Conquérantes possédaient une autorité plus conséquente que lui. 

Maximilien restait un enfant des familles divines, en formation pour devenir un Pilier, mais il n’avait pas eu accès à toutes les informations, alors peut-être que ce minuscule orbe avait effectivement une importance capitale, c’était même certain à ce stade. S’il ne connaissait rien de cet objet, c’était parce que tout ce qui le concernait avait dû être gardé secret, donc qu’il n’était pas à la portée du premier venu. Encore plus quand il appartenait à son feu Mentor. 

Alors que ses pensées explosaient dans tous les sens, une matière froide se déposa sur ses plaies, toujours plus douloureuses. Il sortit de sa transe quand l’infirmier s’avança avec une seringue. Maximilien se redressa d’un coup, il dégagea son bras de son emprise et le toisa sans ménagement. 

– Recule, fulmina-t-il, sa mâchoire se contracta. 

L’homme face à lui lança un regard perdu à Nora, qui soupira de dépit. D’un geste, il le congédia et entreprit de lui-même d’administrer les soins ; la seringue posée loin de lui, cela le rassura. À tout moment, ils allaient tenter de lui injecter un sérum de vérité puissant et perfectionné, qui marcherait pour de bon et il serait foutu. Le nez retroussé, il mit sa main devant ses narines : le comble, c’était qu’il détestait les odeurs fortes comme les médicaments, il les trouvait répugnants et cela ne l’aidait pas à se détendre. Alors quand Nora se tourna vers lui, la seringue en main, l’air impassible, Maximilien crut exploser de colère. 

– Je refuse que tu… enfin, que vous me touchiez ! vociféra-t-il, à deux doigts de se lever et de partir. Puis pourquoi c’est vous ici et pas un autre ? Vous n’êtes pas censé être Stir ?

Il crut voir l’ombre d’un sourire fleurir sur ses lèvres, sans réellement savoir s’il l’avait imaginé ou non. L’aiguille, assez longue pour ne pas lui inspirer confiance, gouttait d’un liquide translucide : était-ce encore un moyen de le manipuler ? Nora ne bougea pas, ses yeux le sondaient, au point de le rendre mal à l’aise. Au bout d’une minute de silence, sa voix résonna : 

– Rien ne fonctionne sur toi, tu n’as donc pas à t’en faire. C’est un antidouleur assez puissant, simplement ça. Et notre médecin en chef, Kelior Feliaris, n’est pas disponible pour l’instant.

– Quoi ? s’étonna Maximilien, pas sûr de bien comprendre. Vous n’avez aucun personnel, c’est pas possible, finit-il par murmurer pour lui-même.

– La nourriture que tu as mangée dans ma chambre contenait du sérum de vérité, répondit dans un premier temps Nora. Mais tu n’as pipé mot et Almagar n’a pas réussi à fouiller dans ta mémoire. Et nous avons effectivement un léger souci de personnel, rien de bien grave.

La rage lui monta aux joues, Maximilien avait été abusé par ces menteurs imbus d’eux-mêmes ; il ne s’était pas fourvoyé quand il avait plaidé que son petit-déjeuner contenait potentiellement des produits pour le forcer à dire la vérité ! 

– Vous m’avez menti…, marmonna Maximilien, les dents serrées. 

– Oui, effectivement. 

– Ce n’était pas toi qui me disais qu’il fallait éviter tout mensonge pour ne pas créer de conflits inutiles ? Puis tu… 

– Vous, c’est vous avec moi, coupa Nora, le ton sec. 

Quelle plaisanterie de lui réclamer du respect quand il en manquait cruellement ; ce n’était pas le culot qui l’étouffait. Maximilien prit une grande inspiration, tentant de reprendre contenance. 

– Pourquoi ça n’a pas marché sur vous non plus ? Vous aviez pioché dans mon assiette. 

– Je suis immunisé depuis un bon moment, en tant que deuxième Stir, c’est le minimum, railla Nora. Mais je ne suis pas le sujet : nous parlons de toi et de tes capacités. Même si tu as clamé n’être qu’un simple petit humain sans pouvoir ni intérêt, je sais pertinemment que c’est faux. 

Le début d’une peur sourde se faufila dans son ventre, aiguisée comme une lame et lourde comme la pierre, elle se contractait encore et encore, l’odeur des médicaments accentuait la nausée qui le prenait au fur et à mesure des secondes. Il ne lâcha pas du regard Nora ; cette famille commençait sincèrement à l’agacer. 

– Je ne sais pas pourquoi ni comment cela a pu se passer, souffla-t-il, mais je n’ai vraiment aucune utilité. Vous le ressentez bien, non ? Je ne possède aucune forme de Kin. 

– Certes. Mais ce n’est pas une preuve suffisante. Tu nous reproches de cacher des choses, mais tu es le même, au fond. Tu…

– Je ne suis absolument pas pareil que vous ! hurla Maximilien, dépassé et fatigué. Ne me comparez pas à vous autres, vous achetez les gens, vous les menacez, vous les soumettez, en plus de mentir encore et encore, je n’ai rien à voir avec vous ! Je ne suis…

Alors que les mots étaient sur le point d’être crachés, ce fut autre chose qui se répercuta sur le fin gilet du Stir. Maximilien et Nora écarquillèrent les yeux en même temps quand ils se rendirent compte que c’était du sang.

Son sang. 

Cette crainte en son sein se transforma en terreur pure à la vue de ce rouge éclatant, aussi abominable qu’envoûtant ; les tremblements de son corps lancèrent une horrible douleur dans ses bras et ses côtes, cette sensation d’impuissance vint se complaire dans cette vue tragique de son sang.

– C’est… C’est…, murmura-t-il, à deux doigts de s’étrangler.

– Ton poumon avait été perforé. Allonge-toi, pesta Nora. 

Mais il n’en fit rien. Le choc ne passait pas et cela eut don d’intriguer plus que d’agacer son interlocuteur. 

– Tu m’entends ? Qu’est-ce qu’il se passe ? 

– Mon sang…, suffoqua Maximilien. 

– Oui, c’est ton sang. Pourquoi ? On dirait que tu viens de te rendre compte que tu pouvais saigner. 

Quand il croisa ses yeux verdoyants, il sut. 

Techniquement, ce n’était pas la première fois qu’il saignait depuis sa chute sur terre.

Mais maintenant que tous les tumultes étaient passés, que le calme était partiellement revenu, voir ce liquide rougeâtre maintenant…

Lui qui avait été habitué à ses pouvoirs de guérison avancée, jamais il n’avait eu à subir ses propres blessures depuis sa naissance. Mais cracher du sang ainsi, ressentir cette douleur beaucoup trop humaine, au point d’en devenir insupportable au fur et à mesure des jours…

C’en était trop. 

Il prit sa tête entre ses mains, désemparé et quelques gouttes de ce rouge bordeaux coulèrent sur ses doigts, comme si elles se moquaient de lui. 

– Ça fait mal…, paniqua Maximilien. C’est mon sang… 

Nora, toujours face à lui, posa la seringue sur la table à côté d’eux et il s’empara d’un mouchoir pour le mettre sur ses lèvres. D’un geste prudent, il tâta ses côtes et le força à s’allonger. Maximilien tenta de se défaire de son emprise, mais une chaleur étrange électrisa sa peau et son esprit. Alors qu’il pensait succomber à son angoisse, ses membres se détendirent étrangement, jusqu’à l’apaiser totalement. 

– Endors-toi. 

Sa voix profonde résonna entre ses oreilles, un ordre qu’il ne put refuser. Ses yeux se fermèrent petit à petit alors que Nora appelait quelqu’un qu’il ne put distinguer. La douleur restait, la vision du sang persistait, et il se sentait défaillir dans le monde des rêves, sans pouvoir s’en échapper. 

⋅•⋅⊰∙∘☽༓☾∘∙⊱⋅•⋅

– Maximilien. 

L’écho le fit sursauter, cette voix se confondit avec les murs qui les entouraient jusqu’à se répercuter sur les statues présentes. Il se retourna vers la source, un sourire aux lèvres, les cheveux au vent : Dual le regardait, calme et l’air paisible. 

– Maître ! s’anima Maximilien. Pourquoi m’avez-vous fait appeler ? 

– Viens par ici, mon garçon. 

Sa main se tendit vers lui, une incitation à s’approcher vers sa grande stature, aussi impressionnante que rassurante. Sans hésiter une seule seconde, il s’avança et se mit à genoux, la tête légèrement baissée pour le saluer. Dual lui rendit et posa sa main sur ses cheveux. 

– Tu as tellement grandi, je t’ai connu dès ta naissance. Cela me fait toujours étrange de voir les miens évoluer ainsi. 

Cette parole réchauffa son cœur, attendri par l’aura paternelle que dégageait Dual. Après un temps d’attente où les mots se permettaient de garder le silence, son maître finit par prendre Maximilien par les épaules et l’inciter à plonger son regard dans le sien. Un peu pris au dépourvu, il acquiesça à sa demande. 

– Quelque chose ne va pas ? s’enquit-il, surpris par l’attitude presque mélancolique de son Dieu.

– Je vais te faire don de mon bien le plus précieux, Maximilien de Sarte. C’est pour ça que tu es ici, aujourd’hui. 

La stature de Dual s’agrandit sous ses yeux au point de frotter contre le plafond et sa poitrine s’illumina d’une lueur si blanche qu’elle faillit le rendre aveugle. Elle se métamorphosa petit à petit en un orbe géant, puis il rapetissa après s’être totalement défait du corps du Dieu. Les secondes passèrent et ce qu’il pensait être un globe énorme devint comme une minuscule pierre qui pouvait tenir dans sa paume. Maximilien se sentit si petit et si fragile par rapport à son maître, c’en était quasiment oppressant. Mais quand la petite bille se retrouva dans sa main, éclatante, un sentiment d’incompréhension fit vibrer son sein. 

– Qu’est-ce que c’est ? Pourquoi… 

– Quand le moment viendra, coupa-t-il, tu le sauras. Il est inutile que tu le saches maintenant, je t’expliquerai tout en temps et en heure. Je t’ordonne juste une chose, mon garçon… 

Un ordre ? Il ne retint point son étonnement, peu habitué à être commandé ou soumis à n’importe qui, même à son maître qui ne cessait de proclamer ne pas être au-dessus de telle ou telle personne. Plus encore, le caractère dur qu’il retrouvait dans ses traits et ses yeux ne lui était pas coutume. Quelque chose n’allait pas. Alors quand Dual se pencha vers lui et murmura ces quelques mots, un frisson d’appréhension le glaça : 

– Garde-le précieusement et ne fais confiance à personne. Pas même à tes propres compagnons.

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