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GiadaMyla
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Chapitre 17

Chapitre 17

L'ambiance à la caserne avait changé.

La mise à pied de Bernier et de ses acolytes avait libéré l'atmosphère d'un poids suffocant.

Même si la procédure était encore en cours, un certain souffle de soulagement parcourait les rangs.

Pour moi, c'était le moment de partager les bonnes nouvelles, de commencer à consolider ce futur que nous construisions, brique par brique, avec Stéphane.

Ma première confidente fut Olga.

Je l'ai invitée à la maison un soir, après que les enfants soient couchés.

L'odeur réconfortante du thé chaud flottait dans l'air, et la douce lumière des lampes enveloppait le salon. Elle a tout de suite remarqué le changement dans mes yeux, cette étincelle retrouvée, cette légèreté nouvelle.

— Il faut que je te raconte, Olga, ai-je commencé, un sourire sur les lèvres que je n'avais pas eu depuis des mois, un sourire qui montait jusqu'à mes yeux. La procédure avance bien, Bernier et ses favoris ont été mis à pied, et David s'est vu retirer ses droits de visite.

Olga a poussé un cri de joie étouffé, ses yeux pétillant d'une ferveur contagieuse.

— C'est incroyable, Sarah ! Enfin ! C'est une véritable victoire.

— Et ce n'est pas tout, ai-je poursuivi, mon cœur battant à toute vitesse, gonflé d'une excitation nouvelle. Stéphane et moi, on a pris une décision. On veut déménager. Commencer une nouvelle vie ailleurs, loin de tout ça. Un nouveau départ, tous les quatre.

Le silence a plané un instant, seulement brisé par le tic-tac discret de l'horloge. Olga m'a regardée intensément, un mélange de surprise, de tristesse et de bonheur sur son visage.

— Déménager ? Mais… c'est une grande décision, Sarah.

— Je sais,  ai-je dit, en serrant sa main, pour la rassurer et me rassurer moi-même. C'est rapide, surtout avec Stéphane. On est ensemble depuis peu, mais je le sais, Olga. Je sais que c'est le bon. Avec lui, je me sens forte, en sécurité, et libre. Il m'a montré ce qu'était le vrai soutien, le vrai amour. Il est prêt à tout laisser tomber pour construire ce cocon avec moi, pour les enfants.

Olga m'a serrée dans ses bras, les larmes aux yeux, une étreinte pleine de tendresse et d'adieu.

— Je suis si heureuse pour toi, Sarah. Tu le mérites tellement. Tu as traversé l'enfer, et maintenant, la lumière arrive. Mais tu vas tellement me manquer.

Sa voix était un murmure teinté de sincérité.

Après Olga, j'ai eu envie de partager cette nouvelle avec Cécile. Cécile, mon amie partie à cause de Bernier, pour vivre son histoire d'amour avec Mathis sereinement. Elle avait été l'une des premières victimes directes de son harcèlement, et sa décision de quitter la caserne avait été un crève-cœur pour Olga et moi.

J'ai composé son numéro, et sonnerie après sonnerie, j'imaginais déjà sa réaction.

Sa voix, au bout du fil, était joyeuse, légère, à mille lieues du stress que nous partagions autrefois.

— Cécile ! C'est Sarah.

— Sarah ! Ça fait une éternité ! Comment tu vas ? Son ton était chaleureux, rempli d'une affection que le temps n'avait pas érodée.

— Je vais… bien, Cécile. Vraiment bien. Et il y a beaucoup de choses à raconter.

Je lui ai parlé de Bernier, des procédures, de la mise à pied de ses favoris, et du retrait des droits de visite de David. J'ai senti son souffle coupé à l'autre bout du fil, une pause saisissante avant sa réaction.

— C'est incroyable, Sarah ! J'ai toujours su que tu te battrais. Je suis tellement fière de toi. Je savais que tu arriverais à faire tomber ce porc et ses acolytes.

Sa voix était empreinte d'une satisfaction profonde.

Et puis, je lui ai annoncé le plus beau.

— Et Stéphane et moi… On va déménager. On cherche une maison et une nouvelle caserne. On veut construire un nouveau départ, comme vous, un vrai cocon pour nous quatre, loin de tout ça.

Un silence. Puis Cécile a éclaté de rire, un rire franc, sonore et libérateur qui résonnait de l'autre côté du combiné.

— Mais c'est génial, Sarah ! C'est la meilleure nouvelle que tu pouvais me donner ! Tu vas enfin pouvoir souffler, vivre ta vie pleinement. Et avec Stéphane… Je savais que vous étiez faits l'un pour l'autre.

Échanger avec Cécile a renforcé ma conviction.

Nous n'étions pas seulement en train de nous battre contre un passé toxique ; nous étions en train de planter les graines d'un futur radieux. Ce nouveau départ, cette nouvelle vie que Stéphane et moi étions en train de bâtir, c'était aussi une victoire pour toutes les Cécile de ce monde, celles qui avaient dû plier sous la pression, mais qui pouvaient désormais espérer voir la justice triompher.

***

L'annonce du déménagement et le vent de changement avaient insufflé une énergie nouvelle en moi.

Une soirée entre filles avec Olga, un vendredi soir, était exactement ce dont j'avais besoin pour relâcher la pression. Nous avons choisi un petit bar animé du centre-ville, l'ambiance chaleureuse et la musique douce promettant une parenthèse loin des procédures et des cartons à venir.

Nous étions installées à une table au fond, riant déjà des anecdotes de la semaine, quand mon regard a croisé une silhouette familière près du comptoir.

Mon cœur a fait un saut avant de se calmer aussitôt. C'était Paco. Il était là, son éternel sourire charmeur plaqué sur les lèvres, mais ce n'était pas son sourire qui a attiré mon attention.

C'était la femme à ses côtés. Elle riait à ses blagues, sa main posée sur son bras avec une familiarité qui ne laissait aucun doute. Plus qu'une simple amie, c'était évident.

Une sensation de froid, puis de soulagement m'a parcourue.

Je me suis rendue compte, là, au milieu du bruit et de la fumée légère du bar, que j'avais fait le bon choix en coupant les ponts avec lui.

Il n'y avait plus de tristesse, plus de regret, juste une confirmation sereine, une certitude apaisante.

Paco était un chapitre fermé, sans amertume, sans résidu.

Stéphane avait balayé toutes les hésitations. Ma place était à ses côtés, loin de ce genre de complication.

Olga, qui avait suivi mon regard avec perspicacité, a posé une main douce et compréhensive sur mon bras. — Tout va bien ?

J'ai souri, un sourire sincère, empli d'une sérénité nouvelle.

— Oui. Tout va très bien même. »

La soirée s'est poursuivie entre rires et, inévitablement, quelques larmes.

Les larmes de soulagement, d'abord, en évoquant les victoires obtenues contre Bernier et David. Olga, les yeux brillants, me rappelait à quel point j'avais été courageuse.

Nous avons trinqué à la chute de Bernier, à la déchéance de ses favoris, et à la justice qui commençait enfin à s'installer. Chaque verre était un pas de plus vers la liberté, chaque rire une victoire sur la douleur passée.

Puis, alors que la conversation se faisait plus intime, j'ai pris une grande inspiration. J'avais une autre annonce, une proposition que je mûrissais depuis quelques jours et qui me tenait particulièrement à cœur.

— Olga, il y a quelque chose d'important que je voulais te dire,  ai-je commencé, ma voix empreinte d'une émotion nouvelle et d'une détermination profonde. Depuis que toute cette affaire a éclaté, j'ai eu de plus en plus de contacts avec d'autres femmes… des victimes de Bernier, ou du même genre de harcèlement dans d'autres casernes.

Olga m'a regardée, attentive, son visage reflétant son intérêt.

— Oui, tu m'en avais parlé.

—  J'ai réalisé à quel point on est seules quand ça arrive. À quel point il est difficile de briser le silence, de trouver du soutien. J'ai fait une pause, ma décision était prise, inébranlable.

— Alors, j'ai décidé de créer une cellule spéciale dans l’association en intégrant les autres victimes de Bernier comme consultantes, pour aider les victimes de harcèlement et d'abus dans le milieu des sapeurs-pompiers. Pour qu'elles ne se sentent plus seules, pour les accompagner dans leurs démarches, leur donner une voix. Et toutes les femmes qui ont porté plainte à mes côtés ont immédiatement accepté de relever le défi et d’aider l’association.

Olga a hoché la tête, ses yeux exprimant une profonde compréhension et une admiration silencieuse.

— C'est une idée magnifique, Sarah.

— Oui, mais… je vais déménager. Je ne pourrai plus être sur place pour la gérer. J'ai pris ses mains dans les miennes, le regard ancré dans le sien, cherchant à lui transmettre toute ma confiance.

— C'est pourquoi je veux te confier l’association, Olga. Je veux te l'offrir. Je veux que tu en sois la présidente.

Le silence est tombé sur notre petite table, brisé seulement par le brouha joyeux du bar.

Le visage d'Olga est passé par toutes les émotions : la surprise, l'incrédulité, puis une profonde émotion et une once de responsabilité.

—  Moi ? Présidente ? Sarah, c'est… c'est énorme.

— Tu es la personne la plus juste, la plus intègre que je connaisse, Olga, ai-je insisté, sentant les larmes monter à mes propres yeux, témoin de l'importance de ce moment. Tu as toujours été là pour moi, tu as une force incroyable, et tu comprends ce que j'ai traversé. Tu es la meilleure personne pour porter ce projet, pour défendre ces femmes. Je serai là pour t'aider à démarrer, bien sûr, à distance, mais la présidence, le cœur de l'association, ce serait toi.

Olga a essuyé une larme qui roulait sur sa joue. Elle a pris un moment, son regard perdu dans le vide, puis elle m'a regardée avec une détermination nouvelle et un sourire chargé de promesses.

— Je… je ne sais pas quoi dire. Mais oui, Sarah. Oui ! Je le ferai. Pour toi, pour toutes ces femmes.

Nous nous sommes serrées dans les bras, au milieu du bar, le rire et les larmes se mêlant dans une étreinte pleine de promesses et d'espoir. Cette soirée, qui avait commencé par une simple envie de décompresser, s'achevait sur la naissance d'un projet porteur de sens. Une nouvelle page se tournait, non seulement pour moi, mais aussi pour celles qui avaient subi et pour Olga, qui allait désormais porter un combat juste et essentiel.

***

Les semaines qui ont précédé avaient été un tourbillon.

La confrontation avec Bernier, les interrogatoires de la déontologie et de la brigade de recherches, la libération de David de ma vie, et la joie de confier l'association à Olga...

C'était une avalanche d'événements, tous intenses et épuisants. Quand le rythme a ralenti, le contrecoup m'a frappée de plein fouet.

Un épuisement profond s'est installé, s'accrochant à mes os.

Je me sentais faible, une fatigue persistante me plombait, même après une nuit complète de sommeil. Je n’avais plus d’appétit, tout m’écœurait, même le café que j’aimais tant. Mon corps, qui avait tenu bon pendant des mois sous la pression constante, semblait relâcher toute la tension accumulée, le stress et l'adrénaline qui retombaient.

Ce corps qui s’était tant battu réclamait son dû après une telle bataille.

Malgré cette fatigue persistante, l'élan pour l'association restait intact.

C'était un projet trop important pour être mis de côté. Avec Olga, nous avons passé une après-midi entière à préparer les papiers de cession.

Elle était investie, posant des questions pertinentes, apportant déjà ses propres idées pour structurer l'aide aux victimes avec un professionnalisme impressionnant.

Assise en face d'elle, je l'ai regardée prendre les rênes, la détermination brillant dans ses yeux.

J'ai signé les documents qui officialisaient son rôle de présidente, sentant une immense fierté et un grand soulagement.

Je savais que l'association était entre de bonnes mains, des mains sûres et bienveillantes. C'était une étape essentielle pour moi, la certitude de laisser derrière moi une part positive de mon expérience, un héritage pour les autres femmes.

Et puis, la bonne nouvelle tant attendue est arrivée, concrétisant enfin notre rêve.

Après des semaines de recherches acharnées, Stéphane et moi avons trouvé notre cocon de bien-être en Bretagne.

Une charmante maison de quatre chambres avec un grand jardin, parfait pour Nina et Elio.

Elle était située dans une petite ville à taille humaine, non loin d'une caserne prometteuse pour nous deux. Nina pourra même y reprendre les cours de Jeunes Sapeurs Pompiers, une activité qu'elle adorait.

Quand nous avons emmené les enfants la visiter, leurs yeux se sont illuminés. Nina a tout de suite repéré l'endroit idéal pour son futur chien, et Elio a couru explorer chaque recoin du jardin, ses petits pieds résonnant sur le gravier. Leurs rires résonnaient dans les pièces vides, remplissant la maison d'une joie anticipée, d'une vie future.

Nous pourrons déménager dans un peu moins de trois mois.

Ce délai nous laissait le temps de tout organiser, de préparer nos mutations et de faire nos cartons.

Maintenant que la procédure pénale était lancée contre Bernier, et qu'il était suspendu, je n'avais plus besoin de rester dans l'Est de la France.

Je pourrai revenir uniquement pour les audiences au tribunal, et pour toute autre démarche judiciaire nécessaire.

La perspective de cette nouvelle vie, de cet horizon dégagé, me donnait la force de faire face à l'épuisement et aux dernières étapes de cette bataille. Nous allions enfin pouvoir tourner la page et construire le foyer paisible que nous méritions, un véritable havre de paix pour notre famille.

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