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GiadaMyla
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Chapitre 7

Chapitre 7

Les semaines passent. Et avec elles, le ballet incessant des interventions, l'adrénaline des manœuvres, les éclats de rire étouffés dans les couloirs de la caserne, les textos discrets qui ponctuent nos journées et nos nuits.

Chaque matin, mon téléphone vibre. Un message de Paco, un "bonjour" qui éclaire ma journée. Chaque soir, il me glisse un "bonne nuit", une pensée douce avant le sommeil.

Olga ne se lasse pas d’en rire, ses yeux pétillants de malice, convaincue que nous allons finir ensemble, que c'est une évidence inéluctable.

Je l’écoute sans répondre, un sourire figé sur mes lèvres. Moi-même, je ne saurais pas dire. Nous sommes complices, intimes d’une certaine manière. Il y a ces gestes qui traînent parfois, une main posée sur mon bras une fraction de seconde trop longtemps, des regards qui durent trop, des silences qui en disent trop peu, une électricité palpable entre nous.

Cécile m’a mise en garde. Ses sourcils se sont froncés, ses yeux ont trahi une inquiétude profonde. Elle a entendu des rumeurs. Paco, le charmeur, celui qui papillonne de femme en femme, brise les cœurs sans un remords.

Elle m’a dit de faire attention, de ne pas tomber dans ses filets, de me protéger.

Mais avec moi, il est différent. Il ne m’a jamais fait de sous-entendu lourd, jamais tenté une approche vulgaire. Juste une tendresse, une chaleur qui désarme. Un respect inattendu qui me touche au plus profond. Et ça me trouble, bien plus qu’un flirt assumé, c'est une vibration plus dangereuse.

Cécile, elle, vit un enfer. Son visage est marqué par la fatigue et la peur. Bernier a découvert sa relation avec Mathis, des murmures ont remonté jusqu'à ses oreilles, et il leur a interdit tout contact formel. Leur amour est devenu un fardeau, une épée de Damoclès. Ils songent à fuir, à tout quitter pour vivre leur amour ailleurs, loin de ce tyran. Elle m’a demandé de continuer son combat si elle part, de porter le flambeau de la justice dans cette caserne.

Et je le ferai, même si au fond de moi je ne veux absolument pas qu’elle parte, que je ne supporte pas l'idée de la voir sacrifier sa carrière.

Mais son bonheur compte plus que tout après tout ce qu’elle a vécu, la souffrance qu'elle a endurée.

Pour l’instant, Bernier m’ignore. Son regard, d'habitude si perçant, est ailleurs, perdu dans ses propres manigances, et c’est tant mieux.

C’est un répit fragile.

Mais dans quelques semaines, je n’aurai plus ce luxe. Je commence ma formation incendie, et il en est le responsable.

Quinze jours d’intimité imposée, d'un face-à-face inévitable avec l’homme qui me méprise, qui cherche à m’éteindre, à briser ma volonté.

Et Paco… Paco ne saura peut-être plus feindre l’indifférence, le détachement, si je craque, si cette pression devient trop forte.

***

Il est vingt-deux heures trente. La nuit est tombée, froide et humide, une fine pluie crépitant sur le toit de la caserne. Une nouvelle intervention vient de tomber, le biper a hurlé sa notification stridente dans le silence. Paco et moi, une fois de plus, sommes de garde ensemble. C’est devenu presque naturel, comme si le hasard, ou quelque chose d’autre, s’amusait à nous rapprocher, à tisser un lien indémêlable.

Cette fois, c’est un accident de la route sans gravité, un simple accrochage. Quelques contusions, un transport à l’hôpital, rien de techniquement compliqué.

Mais ce n’est pas la mission qui me trouble ce soir. C’est l’ambiance dans l’ambulance. Paco, concentré au volant, ses mains le serrant, me jette parfois des coups d’œil dans le rétroviseur.

Nos regards se croisent. Je soutiens le sien plus longtemps que d’habitude, une onde électrique parcourant mon corps.

De retour à la caserne, les phares de l'ambulance balayant le parking détrempé, alors que les autres rentrent se coucher, le silence retrouvé, il m’invite à boire un café dans la petite salle commune.

« Un dernier ? » Sa voix est basse, invitante.

Nous sommes seuls, l'écho de nos pas résonnant dans les couloirs vides. Le silence nocturne enveloppe le bâtiment, une bulle d'intimité.

Et cette fois, c’est lui qui brise la règle, qui franchit une ligne invisible. Il s’assied plus près que d’habitude. Son genou frôle le mien. Pas accidentellement. Je sens la chaleur de sa peau à travers nos pantalons.

— J’en ai marre de faire semblant, souffle-t-il, sa voix à peine un murmure, chargée d'une émotion brute.

À chaque fois que je suis avec toi, je me retiens. Je déteste qu’on doive se cacher… qu’on doive se mentir.

Je reste interdite, le souffle coupé. Ses mots me percutent, d'une force inattendue. Il n’a jamais été aussi direct, aussi vulnérable.

Mon cœur cogne contre mes côtes, un rythme effréné. Il y a ce moment suspendu, comme un précipice au bord duquel nous nous tenons. Si je parle, je tombe. Si je me tais, je recule.

Il approche sa main, lentement, hésitante, puis la retire en un sursaut, comme s'il s'était brûlé.

— Pardon. Je sais que je ne devrais pas dire ça. Je suis désolé.

Je pose ma main sur la sienne, un geste simple, instinctif, mais chargé d'une signification immense. Un écho physique à cette tension qui nous tord depuis des semaines, à ce désir mutuel que nous nions.

— Moi aussi, j’en ai marre, je murmure, ma voix à peine audible. Mais on ne peut pas… pas ici. Pas maintenant. Tu sais pourquoi.

Un bruit de pas dans le couloir, lourd et reconnaissable, nous fait sursauter. La poignée tourne, un cliquetis sec, et la porte s’ouvre en grinçant.

Bernier.

Il nous regarde. Un regard trop long. Trop froid. Trop perçant. Ses yeux d’acier balayent la pièce, s’attardant sur nos mains à peine séparées, sur nos visages trop proches. Son expression est un masque de jugement.

— Quelle coïncidence. Encore ensemble, tous les deux, à une heure aussi tardive ? Vous faites souvent des réunions café à deux, après les interventions ? Sa voix est glaciale, chaque mot un coup de fouet, empreint d'une ironie mordante. Mon estomac se contracte, une boule de glace se forme en moi.

— On vient juste de rentrer, je tente d’un ton neutre, ma voix plus ferme que je ne l'aurais cru. On décompresse, comme tout le monde. C’est le rôle du foyer, non ?

Il ne répond pas tout de suite. Il fait deux pas dans la pièce, lentement, comme un prédateur. Il nous scrute, ses yeux dardant de suspicion.

— Sarah, un mot dans mon bureau. Maintenant ! Sa voix est un ordre, sans appel.

Je jette un dernier regard à Paco. Il ne dit rien, mais son visage a pâli, une ligne dure se dessinant autour de sa mâchoire.

Il sait ce que ça signifie. Je me lève, droite, digne, même si mes jambes tremblent et que mes mains sont moites.

***

Le bureau de Bernier est un frigo, l'air y est sec et glacial. L’ambiance, encore plus. Il s’assied lentement derrière son bureau, un trône de pouvoir, puis me fixe de ses yeux froids, son regard me transperçant.

— Je vais être clair, Sarah. Je n’aime pas ce que je vois.

— Et qu’est-ce que vous croyez voir, exactement, mon Lieutenant ? Ma voix est calme, mais à l'intérieur, je bouillonne.

— Ce n’est pas une question de croyance. C’est une question de discipline, d’autant plus quand on est une femme dans cette profession. De réputation. Les liens trop… proches entre collègues ne sont pas tolérés ici. Surtout quand ils mettent en péril la cohésion de l’équipe. Sa voix est un murmure dangereux.

Je reste droite, immobile, le visage impassible. Je le laisse parler, laisser ses mots se consumer. Mais à l’intérieur, je bouillonne, une lave en fusion.

— Vous m’accusez de quoi, exactement ? D’avoir bu un café avec un collègue après une intervention ? Est-ce cela l’indiscipline ?

Son ton a changé. Plus insidieux. Il m’enfonce, doucement, mais sûrement, comme un couteau tordu dans la plaie. Il cherche la faille, le point faible où frapper.

— Je vous accuse de fragilité. D’être influençable. Paco est un garçon instable, il joue, il séduit. Et vous, vous êtes nouvelle. Trop sensible. Trop exposée. Vous êtes sa nouvelle proie, et vous ne le voyez même pas.

Son rire est sec, moqueur.

— Je vous ai à l’œil, Sarah. Et je vous préviens : la moindre incartade, la moindre familiarité déplacée, et vous comprendrez ce que “mettre un frein à une carrière” signifie vraiment.

Vous ne ferez plus un pas ici.

Il se lève, un geste final, concluant l'entretien.

Je comprends que ma présence n'est plus requise.

Je tourne les talons sans répondre, sans lui offrir la satisfaction d’un mot de trop, d'une larme, d'une faiblesse. J’ai la gorge serrée, une boule de colère retenue, mais mon corps reste tendu, digne.

Dehors, dans le couloir, Paco m’attend.

Sa silhouette est une ombre dans la pénombre. Il voit mon visage, il comprend sans que je n'aie besoin de dire un mot.

Je m’approche. Je prends une inspiration, l'air frais brûle mes poumons. Puis, très bas, ma voix à peine un souffle :

— On va devoir être encore plus prudents. Il nous surveille. Il est partout.

Il hoche la tête, une compréhension silencieuse. Mais dans ses yeux, il y a une flamme, une lueur nouvelle. Une détermination farouche qui répond à la mienne.

— Ça ne m’arrêtera pas, Sarah. Je t’ai dit que je voulais qu’on reste proches. Ce n’est pas un tyran qui m’en empêchera. Jamais.

Je baisse les yeux. Un sourire se glisse sur mes lèvres, un sourire de défi, de complicité retrouvée.

— Alors on jouera selon nos règles. En silence. Mais

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