Épisode 2 : Sale gosse
PROLOGUE
Ancienne base N°14 du Shield – localisation : secrète
La salle de surveillance de la base N°14 était immense. Sans doute l’une des plus grandes que le SHIELD eut un jour possédé. Des centaines d’écrans s’enchevêtraient dans une atmosphère aseptisée, reliés entre eux par des câbles, et formant une toile interconnectée, que l’ensemble des satellites de la Terre venait alimenter. Tout gouvernement se serait damné pour obtenir un tel équipement. Voilà pourquoi Fury avait fait en sorte de tenir son existence secrète après le démantèlement de l’Agence.
Une main sur le menton, l’ancien directeur observa les moniteurs, avant de demander l’agrandissement d’une image. C’était un cliché pris par la vidéo surveillance d’une boutique, située à Horten, en Norvège. Et Horten avait la particularité de se trouver à moins d’une demi-heure de Tønsberg. Tonberg : une petite ville sans histoire, à ceci près qu’elle se faisait désormais appeler La Nouvelle Asgarde. Un lieu de refuge pour tous les Asgardiens ayant survécu au Ragnarök. Voilà quelques années, la ville avait obtenu son indépendance, devenant une cité état, une enclave au sein de la Norvège. Tout ce qui restait d’Asgard se trouvait là-bas, et le peuple avait à cœur de garder ses secrets et son intimité. Impossible de récupérer des vidéos ou des enregistrements du nouveau territoire asgardien sans risquer de déclencher un conflit géopolitique.
— C’est lui ? demanda une voix féminine.
Une silhouette se dégagea de la pénombre. Une silhouette féminine, aux courts cheveux bruns. Elle serrait entre ses mains une tasse de café encore fumant. Quake… Fury ne s’y fera jamais. Pour lui, elle resterait toujours Daisy Johnson.
— Oui, confirma l’ancien directeur en zoomant sur l’image. En personne.
La photo était un peu pixelisée, mais on y reconnaissait sans mal un jeune garçon, sortant d’un fast-food, un milkshake à la main. Il portait un blouson matelassé vert, avec une capuche cerclée de fausse-fourrure. Un visage plutôt rond, mais de grands yeux perçants d’un vert saisissant, et une crinière corbeau. Pas de doute : il y avait une sacrée ressemblance.
— On dirait un gosse tout ce qu’il y a de plus banal, releva Quake.
— Oui. C’est vrai, répondit Fury. Mais vous êtes bien placée pour savoir qu’une apparence peut être trompeuse. Notamment en ce qui concerne les enfants.
La jeune femme retint un ricanement : il parlait de d’Alex, bien entendu. Aka : Phobos. Le fils d’Ares était la preuve à lui seul qu’il fallait se méfier des divinités hautes comme trois pommes.
— Vous n’avez pas lancé de traque contre Phobos, pourtant ?
— Non. Mais Phobos n’a pas tenté de raser New York, ou de conquérir la Terre pour une question d’égo mal placé.
— Hum… pas encore.
Fury ne trouva pas la blague à son goût, ce qui n’empêcha pas Quake de lui tapoter l’épaule d’un geste amical :
— Détendez-vous, Fury. Il a quoi, ce gamin ? Dix ans ? On devrait pouvoir l’arrêter sans problème, demi-dieu ou non.
— Ce n’est pas lui le problème. C’est son frère…
— Thor ?
— Oui.
Quake prit le temps de boire une gorgée de sa boisson chaude avant de questionner :
— Pourquoi Thor protégerait-il un être aussi vil ?
— J’adore Thor, répondit Fury. Mais il s’est toujours montré trop sentimental, manipulable et fier. Déjà par le passé, cela nous a causé bien des ennuis. Lorsque Loki a lancé l’armée des Shitauris sur New York, sa première réaction fut de nous reprocher d’avoir arrêté son frère. Comment osions-nous nous en prendre à un prince d’Asgard ?
— Mais il a fini par vous aider, releva Quake. Il a rejoint les Avengers, que je sache.
— Oui. Il ne pouvait plus nier les crimes de son cadet... Mais cela ne l’a pas empêché d’exiger l’extradition de Loki, afin qu’il soit jugé sur Asgard. Papa et maman ont dû lui mettre une vilaine tape sur la main pour le punir…
— Vous exagérez ! ricana l’espionne.
— Si peu… En attendant, nous aurions dû refuser de rendre Loki à Asgard. C’est la Terre qui a été attaquée. Ce sont des hommes, des femmes et des enfants terriens qui sont morts. Et puisque ce maudit dieu de la malice a osé revenir fouler notre planète, il est peut-être temps de rendre la justice, comme il se doit.
Un silence s’étira. Seul raisonnait le raclement de la cuillère que Quake faisait tourner contre les bords en porcelaine de sa tasse.
— Il ne lui ressemble pas, finit-elle par ajouter, le ton plus grave. J’ai vu des images du Loki qui a attaqué New York et…
— Loki est un métamorphe, la coupa Fury. Un maitre dans l’art de la manipulation. Et j’imagine que c’est par ce stratagème qu’il s’assure la protection de son frère. Ne tombez pas, vous aussi, dans le panneau.
— Que comptez-vous faire, alors ?
— Tant que Loki reste à la Nouvelle Asgard, nous sommes pieds et poings liés. C’est une cité souveraine. Envoyer un groupe armé là-bas reviendrait à déclencher une guerre.
Quake pointa un écran du doigt. Sur la vidéo qui y défilait, on pouvait apercevoir le jeune dieu de la malice longeant une zone portuaire au petit jour.
— Il n’est plus dans la Nouvelle Asgard, là ? On est d’accord.
— Non en effet.
— Alors, pourquoi ne pas tenter de le capturer ?
— J’ignore ce que Loki a en tête, mais je le soupçonne de mijoter un sale coup. Sinon pourquoi quitter seul la Nouvelle Asgard ? Si on veut éviter d’entrer en conflit avec les asgardiens, mieux vaut ne pas agir dans la précipitation. C’est pourquoi que je vous envoie là-bas, vous et les autres, afin de garder ce satané dieu à l’œil.
L’espionne se retourna vers lui, la mine déconfite.
— Vous voulez nous envoyer en Norvège ? Vous êtes sérieux ?
— Très sérieux ! appuya Fury sans quitter les écrans des yeux. Rassemblez l’équipe. Vous partez dans moins d’une heure. Rassemblez les autres.
— Mais…. Tout le monde ? Même Phobos ?
— Surtout Phobos.
Est-ce que je dois me renseigner un peu avant de continuer ou les informations seront suffisantes ?