Chapitre 3 : Rien ne change jamais
Serrure
Thor l’avait suivi comme un bon toutou. Serrure trouvait cela presque trop facile, mais il n’allait pas s’en plaindre. Ce divin illuminé allait lui donner l’occasion de tout changer, de repartir à zéro et d’obtenir ce qui lui revenait de droit : sa liberté.
Cachés derrière une benne à ordure, tous deux observaient la porte arrière d’un immeuble. La ruelle était lugubre et la population locale, peu recommandable. Aucun doute : ils étaient dans un quartier mal famé.
— Résumons, tu veux ? répéta Thor à voix basse. Tu fais partie d’une sorte de gang composé de gamins aux dons surnaturels, qui se font appeler « Les fils de Big Tomy », spécialisé dans l’arnaque et le petit banditisme.
— C’est ça, répondit Serrure. Tu vois que tu comprends, quand tu te concentres.
— Hum… et eux, là – il pointa du doigt les trois gorilles qui surveillaient l’entrée – ils appartiennent à un groupe rival.
— Parfaitement. J’ai mis plusieurs mois pour trouver le spot idéal. Une vraie mine d’or, mais un soir, ces salauds ont débarqué. Ils m’ont mis une raclée et m’ont volé tout ce que j’avais gagné.
— Tu n’as pas pu t’en débarrasser ?
— À cinq contre un ? Tu me surestimes.
— Tu as faibli, mon frère. Ton corps d’humain t’a fait perdre ta résistance asgardienne.
Serrure pinça les lèvres pour se retenir de lui rentrer dedans : joue le jeu pour le moment. Ne le contrarie pas et il fera ce que tu désires.
— C’est pour ça que j’ai besoin de toi, Thor. Tu veux que je te fasse confiance ? Alors dans ce cas, aide-moi à récupérer ce qu’on m’a pris.
— Tu sais, je suis un Avengers. J’ai pour habitude de sauver le monde des menaces interplanétaires, de combattre des destructeurs de monde… j’ai même arrêté des braqueurs de banque, une fois. Mais j’ai un peu de mal avec l’idée de m’en prendre à une bande de gamins, même si ce sont des voyous.
— Je ne te demande pas de les tuer. Ça devrait être un jeu d’enfant pour toi, vu ton curriculum vitae ?
— Oui, mais quand même… Ce ne sont que des mômes.
— Non, pas tous. Ce sont les cerveaux de cette triste entreprise du crime qui se cachent là-dedans. Les meneurs, ceux qui manipulent les « mômes », comme tu le dis. Ils s’enrichissent sur leur dos en leur faisant faire le sale boulot et n’hésitent pas à user de la violence pour maintenir leur autorité. Alors arrête de jouer les sensibles et au boulot. Tu m’as dit que tu étais un héros, prouve-le !
Thor se redressa pour observer la ruelle, mais ne fit rien de plus. Il hésitait, c’était évident. Serrure allait devoir le motiver un peu plus. Après avoir lâché un long soupir, le garçon glissa les mains dans les poches de son blouson vert, et fit volteface.
— Je vois… Il est beau le plus fort des Avengers. Tu m’as vraiment pris pour un crétin. Comment veux-tu que je te fasse confiance, après ça ?
— Quoi ? Non, attends…
Il s’arrêta, mais ne se retourna pas.
— C’est bon, je vais le faire. Laisse-moi une minute.
Un sourire satisfait naquit sur les lèvres de Serrure : trop facile. Il daigna revenir sur ses pas, non sans adresser au dieu un regard blasé.
— Et donc, tu comptes faire quoi ?
— Regarde et prends-en de la graine, petit ! se vanta le géant blond dans un clin d’œil.
Thor fit des moulinets avec son marteau, avant de se propulser dans les airs. En deux temps, trois mouvements, il atterrit au milieu des trois lascars qui surveillaient la porte et les mit à terre.
— Alors ? Impressionnant, non ?
Serrure s’avança au milieu des hommes affalés sur le goudron. L’un d’entre eux laissa passer un long gémissement plaintif.
— Pas mal.
— Pas mal ? C’est tout ? Regarde un peu.
Thor leva sa lourde botte pour frapper la porte. Celle-ci sauta de ses gonds sous la puissance de l’impact, et retomba dans un claquement sonore. Serrure frémit : quel imbécile ! Ne pouvait-il pas être encore moins discret ?
— Elle était ouverte, idiot !
— Ah. Bon, et bien elle l’est là aussi, non ?
Serrure suivie Thor dans un couloir délabré, à la peinture écaillée sur lesquels les tags s’amoncelaient. Une odeur âcre embaumait les lieux. Un mélange de fumée et de moisissure.
— Reste derrière moi, conseilla l’Avengers. Avec ta faible consistance, tu pourrais te blesser.
Serrure se retint d’ajouter quoi que ce soit. Il fit en sorte de guider Thor à travers l’immeuble. Ce qu’il recherchait se trouvait au dernier étage. Sur leur chemin, ils croisèrent quelques gorilles que le géant blond n’eut aucun mal à maitriser. La rencontre avec un groupe de jeunes mutant, en revanche, fut un problème plus complexe à résoudre.
— Écoutez, les jeunes, avait entamé Thor. Ça peut bien se passer, c’est à vous de voir. Partez maintenant et personne ne sera blessé, d’accord ?
Bien entendu, cela ne fonctionna pas. Serrure connaissait parfaitement la fierté de ces adolescents. Ils se pensaient tout puissants avec leur pouvoir, et pour eux, le dieu n’était qu’un guignol bodybuilder.
— Vous êtes déraisonnable ! râla Thor en envoyant l’un d’entre eux s’écraser contre un mur. Et puis, vraiment, traîner dans ce genre de trafic à votre âge… que penseraient vos parents ?
Serrure resta en retrait, pour que personne ne le remarque. Mais lorsqu’un des jeunes mutants tomba à ses pieds, ce dernier releva sur lui des yeux emplis d’étonnement :
— Qu… Qu’est-ce que… bégaya l’adolescent. Serrure ? Mais que…
Un frisson le balaya et Serrure balança une impulsion verte. Le jeune mutant fut assommé sur le coup. Le cœur battant, Serrure releva les yeux sur Thor. A-t-il entendu ou…
— Bon…, annonça le dieu. Ça ne me plait pas vraiment de m’en prendre à des enfants, mais le ménage est fait.
Il s’approcha pour observer l’adolescent inconscient au pied de Serrure.
— C’est toi qui l’as assommé, celui-là ?
Ouf… Il ne se doutait de rien.
— Je sais me défendre, Thor.
— Je vois ça… Où allons-nous, à présent ?
Serrure le mena jusqu’au lieu désiré : une porte à double battant et au bois massif, tout au fond d’un couloir du dernier étage. À cette heure matinale, il y avait peu de monde, et Serrure n’allait pas s’en plaindre.
— Attends ! dit-il alors que Thor s’apprêtait à défoncer l’accès.
Le jeune brigand colla son oreille contre le bois. Rien, pas un bruit. Le bureau était vide. Après un soupir de soulagement, le jeune vandale posa sa main sur la poignée. La porte s’ouvrit sans résistance.
— Tu vois, se moqua-t-il en se retournant vers le géant nordique. Ça, c’est une poignée, Thor.
— Je sais ce qu’est une poignée, Loki. Nous en avions sur Asgard.
Serrure se retint de balancer la moindre remarque désobligeante : il n’avait pas le temps pour cela. De l’autre côté, le bureau se dévoila. Quelques lampes allumées tamisaient la pièce d’une lumière chaude.
— Que cherchons-nous, exactement ? s’enquit Thor.
— Le butin, mon vieux ! De l’argent. Car l’argent, c’est le pouvoir.
— Et tu as toujours aimé le pouvoir, hein, mon frère ?
Serrure passa derrière le bureau pour ouvrir l’un des tiroirs avec une assurance qui trahissait sa connaisse des lieux. Cela alerta Thor qui croisa les bras dans un regard emplit de soupçons :
— Pourquoi ai-je l’impression que tu connais un peu trop bien cet endroit ?
Il n’était peut-être pas si stupide que ça, finalement. Serrure allait répliquer, quand une voix plaintive s’éleva :
— Pitié… Laissez-moi sortir. Je ne vous décevrais plus. C’est promis.
Et merde ! Thor fronça les sourcils avant de rejoindre la petite pièce annexe qui s’ouvrait dans le fond. Là, entre quatre murs carrelés de blanc, on avait installé une chaise. Et, sur ladite chaise, un Grégory larmoyant était ficelé. Un hématome s’étendait sur sa pommette, tandis que sa lèvre fendue laissait s’échapper un filet sanguinolent.
— Qu’est-ce que…, commença Thor.
— Serrure ! s’enquit le jeune captif en apercevant son acolyte. Serrure, aide-moi ! Tu dois lui dire ! Tu dois dire à Tomy ce qui s’est passé. Il est persuadé que j’ai volé la recette de la soirée, mais ce n’était pas moi, tu le sais !
Serrure poussa un soupir. Manquait plus que ça…
— Loki !
Thor gronda et son expression pris des airs orageux.
— Je croyais que nous étions là pour récupérer ce que t’avait volé un gang rival.
— Un gang rival ? s’étrangla Grégory. Non… Non ! Ce sont les appartements de Big Tomy.
L’atmosphère se chargea en tension. Si près du but ! Serrure eut envie de hurler, mais tant pis. Il allait devoir faire avec.
— Détache-moi, Serrure, supplia l’enfant alors qu’il s’approchait de lui. Libère-moi, vite !
— Pourquoi ? rétorqua le petit vandale en se penchant. Tu as oublié la fois où tu m’as mis ton incompétence sur le dos, Grégory ? Là fois où tu m’as fait accuser à ta place ? J’ai été assis sur cette chaise par ta faute. Tu n’as que ce que tu mérites.
Et il quitta la petite réserve pour revenir dans le bureau. Trouver l’endroit où Tomy planquait son argent, c’était tout ce qui comptait ! Avec ça, il pourrait enfin quitter Paris et vivre sa propre vie. Sans subir, sans courber l’échine.
— Loki ! s’écria Thor après avoir libéré le jeune Grégory de sa chaise. Par la barbe d’Odin, à quoi joues-tu ?
— Je respecte le plan.
— Quel plan ? Tu t’es servie de moi !
— C’est ce qu’il fait toujours, marmonna Grégory, chancelant. Il ment et il manipule les autres.
— Oui… Oui, je suis bien au courant, appuya Thor sur le ton du reproche.
— Faites ce que vous voulez, riposta Serrure, mais moi, je prends l’argent et je disparais.
— Il faut amener ton ami à l’hôpital, riposta Thor. On n’a pas le temps de…
— Bien ! Vas-y et oublie-moi, tu veux !
— Je t’ai dit que je ne te laisserai p…
— Mais je n’ai pas besoin de toi ! explosa Serrure.
Il se retourna violemment et se saisit saisissant de la dague que le dieu lui avait remise quelques heures plus tôt.
— Je n’ai besoin de personne ! ajouta-t-il en levant le couteau devant lui. Je me suis toujours débrouillé seul, jusqu’ici ! Pour qui te prends-tu, hein ? Je me fiche de tes grandes histoires. De ton frère, de ta famille, de ton peuple ! Je ne t’ai jamais rien demandé, que je sache ! Alors, laisse-moi tranquille ! Emmène donc Grégory, si tu le veux. Lui, il n’attend que ça, qu’on vienne le sauver. Tu vas enfin pouvoir jouer au grand frère exemplaire. Tout le monde sera comptant, alors dégage maintenant !
Thor l’observa longuement, en silence, et Serrure lut comme un élan de déception dans ses yeux clairs.
— Bien sûr… finit par murmurer le géant blond. J’aurais dû m’en douter.
Il attrapa Grégory qui peinait à se maintenir debout, et alla ouvrir une fenêtre.
— Même maintenant… Même en ayant une chance de repartir à zéro, tu continues à ne penser qu’à toi, Loki. Quel égoïste tu fais.
Serrure laissa passer un rire amer.
— Arrête ! Tu ne me connais pas ! Tu ne sais pas qui je suis, ni ce que j’ai vécu.
— C’est vrai…
Thor commença à mouliner son marteau pour prendre de l’élan.
— Mais les actes parlent pour toi, mon frère.
— Je ne suis pas ton frère !
Thor n’ajouta rien. Il lança son bras et décolla par l’ouverture pour filer dans le ciel nocturne de Paris. En moins d’une seconde, il avait disparu.
Serrure resta un temps là, seul, debout au milieu de la pièce. Puis, après un reniflement de mépris, il reprit ses recherches. Bon débarras ! Cet idiot avait rempli sa mission : lui ouvrir les portes du bureau de Tomy. Maintenant, ne restait plus qu’à finir ce qu’il avait commencé, et débuter sa nouvelle vie. Grâce à la clef trouvée dans le tiroir, Serrure put ouvrir un coffre, dissimulé dans l’âtre d’une cheminée hors d’usage. Clic clac : c’était ouvert. Des liasses de billets défilèrent entre ses mains et la satisfaction étira ses lèvres en un large sourire : parfait ! Il commença à s’en remplir les poches, en s’imaginant déjà comment il allait dépenser tout cet argent. D’abord, je prendrais un train à gare de Lyon. Puis je rejoindrais Marseille… L’Italie, c’est un bon plan. Là-bas, personne ne me connaît et je…
— J’aurais dû m’en douter.
Serrure sursauta si violemment que son crâne percuta le linteau de la cheminée. La respiration coupée, il se retourna pour découvrir Tomy et trois de ses acolytes, debouts juste derrière lui.
— Quelle déception, soupira le chef de gang. Vraiment… Tu avais tant de potentiel.
Réagis ! Vite ! Il était en danger. Il devait attaquer le premier. Alors, sans plus réfléchir, Serrure balança sa dague, mais l’homme à la gauche de Tomy n’eut qu’à lever la main : le couteau se figea dans les airs avant de retomber dans le sol en rebondissant.
— Tu m’as habituée à mieux que ça, petit.
Ensuite, tout alla trop vite. Bien trop vite. Avant qu’il ne puisse faire quoi que ce soit, une onde de choc invisible le balaya. Serrure s’écrasa lourdement contre la cheminée. En moins d’une seconde, il perdit connaissance.
***
La réalité lui revint, et avec elle, la douleur. Son crâne semblait sur le point de se fendre en deux, comme la coquille d’un œuf. Il grimaça, alors que le décor se dessinait peu à peu sous ses yeux.
— Tu étais mon préféré, Serrure.
Cette voix… Prise de conscience ! Le jeune garçon releva prestement la tête. On l’avait attaché à une chaise. Celle qui, quelques minutes plus tôt, retenait encore Grégory prisonnier. Un gémissement de détresse lui échappa : Non… Pas ça.
Debout, face à lui, Tomy l’observait en fronçant les sourcils.
— J’avais fondé tellement d’espoir sur toi ! Vraiment ! Tu dépassais les autres sur tous les points : par ton intelligence, par tes pouvoirs, dans l’art de la duperie… Mais peut-être étais-tu trop bon, au final ? Je ne peux que m’en vouloir : je ne t’ai pas assez maté. C’est de ma faute, je le reconnais. J’aurais dû être plus dur avec toi, j’aurais dû te montrer qui était le patron ici.
Serrure serra les mâchoires. Il devait sortir et vite, ou sa courte existence se finirait dans un sac mortuaire. Il observa ses poignets : noués aux accoudoirs, tout comme ses chevilles aux pieds de la chaise. La partie s’engageait mal.
— Tu es un ingrat, Serrure, poursuivit Tomy en s’approchant dangereusement de lui. As-tu oublié que, si tu en es arrivé là, c’est grâce à moi ? Lorsque je t’ai ramassé à moitié mort dans les rues de Paris, tu n’étais qu’un déchet balancé sur le pavé. Un petit clébard qui dormait entre les poubelles et crevait la dalle.
Il sortit une cigarette de son paquet et l’alluma tranquillement, avant de se pencher au-dessus de l’enfant. Lorsque son visage fut tout près du sien, Tomy recracha sa fumée immonde dans les yeux de Serrure.
— Tu me dois tout, sale mioche.
— Non ! riposta-t-il en serrant les dents. Non ! Je ne te dois rien ! Tu es comme les autres ! Tu es comme mon oncle ! Un sale enfoiré profiteur qui…
Il ne finit pas sa phrase. Tomy venait de poser le bout incandescent de sa cigarette sur son cou. La surprise et la douleur lui arrachèrent un cri, et des larmes ne tardèrent pas à affluer à ses yeux.
— Tu sais ce que je fais au sale petit bâtard désobéissant comme toi, hum ? Oui, tu sais, hein…
Tomy se redressa enfin, mais la brûlure dévorait encore la peau de Serrure. Cette douleur, il ne la connaissait que trop bien. Il y avait trop goûté.
— Maintenant, mon garçon, je vais te poser une question très simple. À toi de voir comment tu veux que cela se finisse. Alors, dis-moi : qui est l’homme qui t’a aidé à rentrer jusqu’ici ?
— Je ne vois pas de quoi tu parles, haleta Serrure en essayant de refouler ses larmes.
Il devait garder son calme. Il ne devait pas céder à la panique ou à la peur. S’il le faisait, alors il était cuit. Ses doigts remuèrent lentement, des gestes si furtifs qu’ils en étaient indétectables. Sa magie se déversa dans ses veines et bientôt, les liens commencèrent à se desserrer autour de ses chevilles.
— N’aggrave pas ton cas, morveux ! Je sais qu’il y avait quelqu’un avec toi.
— Non. J’ai agi seul.
— C’est faux !
Une autre personne entra dans la pièce. Il s’agissait d’un adolescent. Et pas n’importe lequel : c’était celui que Serrure avait assommé, un peu plus tôt. Un gémissement de dépit lui échappa. Cette fois-ci, il était cuit…
— Il y avait un grand type qui l’accompagnait, poursuivit le jeune mutant. Du genre hyper balèze, avec une barbe et de longs cheveux blonds. Il avait un marteau dans la main et avec, c’était comme… Comme s’il produisait des éclairs. Il a envoyé une décharge à Sylvain. Depuis, il est dans le coltar grave !
— Un grand type blond avec un marteau ? intervint alors l’un des hommes de main de Tomy.
Ce dernier se saisit de son téléphone et commença à taper quelque chose dessus, avant de tendre l’appareil à l’adolescent.
— Ce serait pas ce type-là, par hasard ?
— Si, acquiesça le garçon. Si, c’est lui !
— Tomy ! s’affola l’homme de main en saisissant son patron par la manche. C’est Thor, ça ! C’est un Avengers.
D’abord, Tomy ouvrit de grands yeux surpris, puis il commença à glousser, comme si on venait de lui balancer une bonne blague. Il soupira, longuement, pour finalement faire face à l’enfant ligoté.
— Serrure… tu n’as quand même pas invité un Avengers chez moi, hum ?
Impossible de répondre. Sa bouche s’assécha et sa gorge se noua. Là, c’était sûr : il était cuit de chez cuit ! Adieu ses rêves d’évasion. Adieu l’Italie… Serrure se mit à trembler, puis Tomy explosa. Il balança sa cigarette au visage du jeune garçon, avant de s’élancer vers lui.
— Ca, tu vas le regretter, sale chiard ! Tu vas me le…
Plus de temps pour la furtivité : Serrure laissa sa magie jaillir et un halo vert réduisit ses liens en poussière. Il se leva et envoya son poing dans le visage du mafieux. Sous la surprise, ce dernier tomba à la renverse. Serrure profita de l’effet de surprise pour décamper.
— Rattraper moi cette petite enflure !
Le cœur au bord des lèvres, Serrure courut. Quelque chose passa en sifflant au-dessus de son épaule, et le mur devant lui explosa. Une onde de choc ! Des débris de briques et de crépis volèrent en tous sens. Serrure parvint néanmoins à se saisir de la dague, abandonnée sur le parquet, avant de quitter le bureau à grandes foulées.
— Je vais te butter, Serrure ! Tu m’entends !
Les menaces de Tomy sonnèrent comme une promesse sordide. L’enfant fila dans le couloir, tandis que derrière lui résonnait déjà les pas de ses poursuivants.
— Il est là !
Un nouveau sifflement, une nouvelle détonation, et le sol se brisa sous ses pieds. Serrure chuta. Il roula sur les débris, s’écorcha les mains et le visage, avant de se stabiliser enfin, face contre terre. L’esprit brumeux, le corps endolori, il ne se releva pas assez vite. Des mains le saisir par les cheveux pour l’obliger à se redresser.
— Je vais prendre plaisir à te faire souffrir, mon garçon ! Crois-moi !
Serrure hurla, mais un coup à la mâchoire abrégea son cri. On le frappa : à l’estomac, dans le dos, à la joue… et il se recroquevilla en position fœtale pour se protéger. Quand les coups cessèrent, Tomy le saisit par le cou, pour le plaquer violemment au mur. Tomy écumait de rage. Son teint était devenu plus rouge que celui d’une écrevisse trop cuite. Serrure tenta d’user à nouveau de ses pouvoirs, mais le mafieux le frappa à la tempe, et les forces de l’enfant le quittèrent.
— Tu vois, il y a quelques minutes, j’étais encore prêt à t’épargner. Je t’aurais vendu à un réseau pédophile ; au moins, tu m’aurais rapporté de l’argent. Mais là, tu as juste mérité que je t’écrase comme l’insecte que tu es, Serrure. Je vais te tuer. Te massacrer.
Tomy le souleva et l’enfant se retrouva à patiner dans le vide. Ses pieds ne touchaient plus le sol et les doigts du chef de gang se resserrèrent si fort autour de son cou, qu’il lui sembla entendre ses cervicales craquer. Ses poumons étaient en feu. Une vague de chaleur lui monta à la tête, tandis que ses yeux baignés de larmes commençaient à lui renvoyait des images floues. Il suffoquait. Sa bouche grande ouverte essayait de capter de l’air, mais en vain. Serrure s’asphyxiait…
— Alors ? Tu fais moins le fier, hein, sale petit enfoiré de…
Tomy ne finit pas sa phrase. Il fut happé. Littéralement. Balayé sur le côté par une masse grise. Au bord de l’inconscience, Serrure entendit à peine le chaos qui éclata tout autour de lui.
ANECDOTES
Pour le coup, la vie de Serrure, ses malheurs et tout ce qui entoure Big Tomy est purement inventé. Un roman étant différent d’une BD, il me fallait ajouter des éléments pour optimiser la tension narrative. Cependant, et pour pouvoir découper l’histoire en format court, j’ai pensé les aventures de Thor et de Loki comme un format de série. Ainsi, le texte est découpé en plusieurs épisodes, eux même découpés en chapitre. Nous attaquons après ce petit apparté le 4ème et dernier chapitre de ce premier épisode.