Alice
18 juin 2023
Un son strident me tire d’un sommeil fragile. Quelqu’un martyrise ma sonnette avec une insistance irritante. Fronçant les sourcils, je me redresse et jette un coup d’œil à mon réveil. 6 h 51. Je soupire, exaspérée, et traîne des pieds jusqu’à la porte.Une fois devant, je me hisse sur la pointe des pieds pour jeter un œil à travers le judas. La vue de la personne de l’autre côté me fait grimacer.
— Oh non… murmurai-je avec une résignation teintée de colère.
Je déverrouille la porte et la laisse entrer, sans enthousiasme.
— Tu as une mine affreuse, déclare-t-elle, le ton empreint de mépris.
— Merci, tu m’as réveillée, maman, rétorquai-je avec lassitude.
— Quoi ! Tu viens seulement de te réveiller ? Mais ça ne va pas, ma pauvre fille ! Il est déjà 7 heures et tu es encore au lit ! Et en plus, regarde-moi ce foutoir ! C’est un véritable taudis, cet appartement !
Je suis son regard et observe mon appartement. Tout est impeccable, aucun objet ne traîne. Je ne comprends pas ce qu’elle peut encore reprocher.
— Bon, puisque tu ne sembles pas décidée à m’accueillir correctement, je vais le faire moi-même, annonce-t-elle, l’air hautain.
— Oh, mais je t’en prie, fais comme chez toi, répondis-je avec un sourire hypocrite qu’elle me rendit, triomphante.
Elle se dirige sans attendre vers la cuisine, ouvrant les placards pour se faire un thé comme si elle était chez elle.
— Alors, qu’est-ce qui t’amène ? demandai-je en caressant Maurice, mon chat, qui venait quémander des câlins.
— Tu as encore cette maudite bestiole, râla-t-elle en fusillant Maurice du regard.
Elle s’installe ensuite sur mon canapé avec une grâce exagérée, comme une reine prenant place sur son trône. Je roule des yeux, agacée par son attitude.
— Qu’est-ce que…
— Je n’ai pas le droit de venir voir ma fille ? réplique-t-elle faussement outrée.
— Après ton numéro d’hier ? Non, on sait toutes les deux que tu n’es pas là pour ça.
Elle laisse échapper un soupir théâtral.
— Non, c’est vrai. Tu me fais pitié, Alice.
Mon cœur rate un battement. Je tourne la tête vers elle, stupéfaite.
— Pardon ?
— Tu me fais pitié, répète-t-elle avec calme, comme si c’était une évidence. C’est pour ça que j’ai demandé au voisin s’il pouvait m’héberger une semaine.
— Je ne vois pas le rapport…
— Je vais te remettre sur le droit chemin. Tu es une Roy, après tout, même si tu commences à me dégoûter presque autant que ces gueux. Et si je t’avais demandé de rester chez toi, tu aurais refusé.
— Je vais très bien, maman…
— Non, déjà, on va commencer par prendre rendez-vous chez un psy.
— Pourquoi faire ?
— Pour te soigner de cette… maladie, lâche-t-elle avec une hargne qui me glace.
Je lève les yeux au ciel, fatiguée de cette éternelle rengaine.
— L’homosexualité n’est pas une maladie.
— Bien sûr que si.
Je me frotte le visage, frustrée, avant de m’approcher d’elle. Je lui prends sa tasse des mains et la pose brutalement sur la table.
— Mais qu’est-ce que tu fais ? hurle-t-elle, outrée.
— Si tu es là pour continuer à essayer de me contrôler, comme quand j’étais enfant, tu peux partir ! Il me semble avoir été clair sur ce sujet hier.
Sans attendre sa réponse, je lui attrape le bras et la tire vers moi.
— Lâche-moi tout de suite ! hurle-t-elle, tentant de se libérer.
Je serre ma prise et l’entraîne jusqu’à la porte que j’ouvre à la volée. Avant qu’elle ne puisse réagir, je la pousse dehors avec force. Elle se retourne, le visage déformé par la colère, mais je claque la porte avec fracas avant qu’elle ne puisse dire quoi que ce soit.Un silence assourdissant envahit l’appartement. Je m’appuie contre la porte, les yeux fermés, essayant de calmer les battements frénétiques de mon cœur. Maurice s’approche, frottant sa tête contre mes jambes, comme pour me rassurer.
— Ça va aller, mon garçon… murmurai-je en caressant son pelage soyeux.
Je me laisse tomber sur le canapé, épuisée, mais au moins, pour l’instant, je suis en paix.
.__.
Je rentre du travail avec cette constante impression d’être observée, un sentiment qui oscille entre la peur et l’agacement. Ce poids oppressant me suit depuis plusieurs jours, et il commence à sérieusement s'éroder les nerfs.Une fois chez moi, je décide de ne pas m’attarder. J’attache mes cheveux en un chignon désordonné, laissant quelques mèches bouclées encadrer mon visage. J’enfile un collant noir décoré de roses, un jupe plisser rouge bordeau, et une chemise noir, j’ajoute une petite ceinture dorer. Pour compléter ma tenue, je chausse mes bottines en cuir à talons, qui claquent sur le sol avec un certain panache .Avant de partir, j’attrape mon sac et glisse à l’intérieur un spray au poivre. Peut-être que je deviens parano, mais mieux vaut être prudente que prise au dépourvu. Une fois la porte du hall franchie, je me précipite vers ma voiture. Mieux vaut paraître ridicule que finir dans les faits divers, me dis-je pour me rassurer. Ça serait le comble pour moi de mourir par un fan fanathique qui semble s’amuser à reproduire mes livres. Une fois garée devant le restaurant, j’envoie un message à Iris. Sa réponse arrive presque instantanément : "Je suis déjà installée à une table, je t’attends."Je sors de la voiture et jette un regard nerveux autour de moi.
— Putain… toujours ce foutu sentiment, murmurè-je en scrutant l’obscurité.
Rien d’anormal ne semble se profiler. Je souffle profondément avant d’entrer dans le restaurant. À l’intérieur, au fond de la salle, une chevelure rose clair attire mon regard. Iris est là, plongée dans le menu.
— Désolée, je t’ai fait attendre longtemps ? demandai-je en m’asseyant.
— Non, ne t'inquiète pas ! répond-elle avec un sourire.
J’attrape un menu à mon tour, mais à peine ai-je commencé à lire qu’une serveuse s’approche.
— Vous avez choisi ?
— Oui, pour moi ce sera un verre de pinot noir avec un tartare, répond Iris avec sa gentillesse habituelle.
— Des pâtes bolognaises et la même boisson pour moi, dis-je rapidement, sans intention de prolonger la soirée plus que nécessaire.
La serveuse sourit, récupère nos menus, puis disparaît. Mon regard se pose sur Iris, qui semble perdue dans ses pensées.
— Loin de moi l’idée de critiquer ta présence, mais allons droit au but : pourquoi m’as-tu invitée ? demandai-je, brisant le silence.
Elle prend une profonde inspiration avant de répondre.
— Tu me manques, Alice. Même après notre rupture, mes parents n’ont pas cessé de me harceler à cause de mon orientation. Ça n’a fait qu’empirer. Et me réveiller seule après mes cauchemars… c’est horrible. Toute ma vie est un enfer sans toi.
Elle s’interrompt, coupée par le serveur qui revient avec nos boissons.
Je profite de ce moment pour formuler ma réponse.
— Iris, je suis touchée par ce que tu ressens. Mais… je n’ai plus de sentiments pour toi. Je t’apprécie énormément, mais là, je ne peux pas t’offrir plus. Par contre, je vois que tu es au bord du gouffre. Tu as besoin de parler, c’est évident. Alors, pendant ce repas, n’hésite pas à vider ton sac.
Le reste du dîner est ponctué par ses confidences. Je l’écoute attentivement, essayant de l’aider avec des conseils. Mais au fond, je sais que le seul vrai conseil que je puisse lui donner est d’aller voir un psychologue.
Une fois le repas terminé, nous nous dirigeons vers la sortie.
— Alice…
Sa voix me stoppe. Je me retourne pour la voir, les épaules voûtées et le regard fuyant.
— Oui ?
— Je sais que ce n’est plus possible entre nous. Mais… Tu accepterais de passer une dernière nuit avec moi ?
Sa demande me prend de court, mais je secoue doucement la tête.
— Je ne préfère pas, Iris. Ça te ferait plus de mal que de bien…
Elle me sourit tristement avant de se diriger vers sa moto. Alors qu’elle s’apprête à mettre son casque, je m’approche. Doucement, je prends son visage entre mes mains et je l'embrasse. Je mordille sa lèvre inférieure, puis me retire sans un mot pour retourner à ma voiture.Je coupe le moteur et ouvre la portière. Alors que je pose un pied à terre, une violente sensation me traverse, un frisson qui semble glisser jusqu’à mon âme. Instinctivement, je sors le spray au poivre de mon sac.Je ferme la voiture et m’apprête à courir, mais une main surgit de l’ombre et me plaque violemment contre mon véhicule. Elle enserre ma gorge avec une force terrifiante. Panique. Mon souffle est coupé. Avec un réflexe désespéré, j’asperge mon agresseur de spray. Il peste de douleur et recule.
— Salope ! crache-t-il.
Je ne perds pas une seconde et commence à courir, mais un autre homme surgit devant moi, une batte de baseball à la main. Il lève son arme et frappe violemment mes jambes.Je m’effondre au sol, criant de douleur.
Sasha
18 juin 2023
J’attends Mathieu devant la devanture du salon, les bras croisés, tandis qu’il verrouille la porte avec précision.
— Je ne comprends toujours pas pourquoi il faut que je t’accompagne pour cette mission, soupirai-je, un brin contrariée.
—Je dois reconnaître ressentir une certaine fatigue en cette fin de journée, avoua-t-il avec calme, tout en ajustant soigneusement ses gants. Il est fort probable que leur véhicule abrite plusieurs occupants et, cela va sans dire, tu excelles bien davantage que moi lorsqu’il s’agit d’exécuter une filature avec discrétion.
Je détourne le regard à cette remarque, gênée. Habituellement, les compliments me mettent mal à l’aise. J’ai tendance à croire qu’ils sont toujours intéressés ou mensongers. Mais Mathieu… Mathieu dit toujours ce qu’il pense, et cela me désarme.Nous montons en silence dans ma voiture. Une fois installés, je démarre le moteur et nous prenons la route vers la maison des cibles.Lorsqu’on arrive, Mathieu s’installe sans un mot, sortant une paire de jumelles d’un geste méthodique. Il observe attentivement l’une des fenêtres illuminées, son expression s’assombrissant peu à peu.
— Cela est tout simplement inadmissible, articula-t-il enfin d’une voix glaciale. Ces individus s’arrogent le droit de me surcharger impunément. Regardez-les… Ils s’apprêtent à prendre congé. Je te prie de bien vouloir démarrer le moteur.
Je tourne la clé, nous les suivons un petit moment. On se gara à une certaine distance dans le parking. Une sensation désagréable monte en moi. Ce lieu m’est familier.
— Mathieu… Ce quartier, je le connais…
Il détourne son regard des jumelles pour poser sur moi un regard interrogateur, m’invitant à poursuivre.
— Tu m’as raconté, à cette fameuse soirée… Axel est venu chercher Alice, paniqué.
Il plisse légèrement les yeux, réfléchissant un instant.
— Est-ce ici la demeure de mademoiselle Roy ?
— Oui…
Je reporte mon attention sur les silhouettes qui s’affairent près de la voiture. Et c’est alors que je la vois : Alice. Elle se tient là, non loin de son véhicule, entourée de trois hommes.
— Ils sont seulement trois, murmurai-je pour moi-même, mes yeux rivés sur la scène.
Mais avant que je ne puisse dire autre chose, je réalise que Mathieu n’est plus à mes côtés. Il est déjà sorti de la voiture et avance d’un pas assuré vers les individus.
— Bon sang, Mathieu !
Je me précipite pour le rejoindre, chargeant rapidement mon silencieux. Mes sens sont en alerte maximale, chaque muscle est tendu.
Alice
18 juin 2023
Ma vision commence à se brouiller, mes pensées se confondent dans un mélange de peur et de douleur. Soudain, un gémissement de douleur fend la nuit. Je tourne faiblement la tête juste à temps pour voir l'homme qui faisait le guet s’effondrer au sol. Mon agresseur, surpris, relâche instantanément sa prise autour de mon cou. Profitant de cet instant de répit, je me débats et me dégage de son emprise, haletante.Je rampe maladroitement en marche arrière, cherchant désespérément à mettre de la distance entre lui et moi. Chaque mouvement fait vibrer ma cheville d’une douleur insoutenable. Je ne crois pas qu’elle soit cassée, mais elle me fait si mal que me relever semble impossible.Je finis par m’adosser à ma voiture, ma respiration saccadée, les mains tremblantes. Mon regard paniqué se fixe sur deux autres silhouettes qui s’approchent à grands pas. Ils sont armés, et je suppose que ce sont eux qui ont neutralisé les autres hommes. Mais rien ne me garantit qu’ils ne sont pas encore plus dangereux.
L’un d’eux s’arrête devant moi et s’accroupit, à une distance si proche que je peux presque sentir son souffle. Mon cœur s’emballe alors que mes yeux se posent sur lui. Ses traits… je le reconnais.
— Navré, Darling, murmure-t-il d’une voix glaciale mais étrangement courtoise.
Sasha
18 juin 2023
Les trois hommes gisent désormais au sol, immobiles, tandis que mon mentor s’avance calmement vers Alice.
— Navré, Darling, murmure-t-il avec une courtoisie teintée d'ironie.
Avant même qu’elle puisse réagir, il plaque un chiffon imbibé de chloroforme sur son visage. Alice se débat faiblement, mais il maintient sa prise avec une précision calculée. Lorsqu’elle sombre dans l’inconscience, il se redresse et lisse sa veste d’un geste nonchalant.
— Bien, dit-il en ajustant ses gants.
— On s’occupe d’abord des trois autres, puis on ramène Alice ? demandai-je en m’avançant.
— Parfaitement. Je dois dire que je suis agréablement surpris : il semblerait que tu commences enfin à assimiler mes enseignements.
Je détourne les yeux à son compliment, une pointe d’irritation montant malgré moi.
— Pourquoi se donner tant de mal pour elle ? lançais-je, un sourcil levé. Je ne comprend pas ta stupide obssession, elle était dejais enervante avant mais maintenant qu’elle te connait c’est pire.
Il s’arrête un instant, fixant le corps d’un des hommes abattus avant de répondre, presque distrait :
— Je ne me suis pas imposé la peine de lui porter secours pour qu’elle vienne à périr misérablement deux semaines plus tard.
— Et la vraie raison ?
— La raison véritable ? Elle est simple, cruelle dans sa limpidité : cette femme fait battre mon cœur pour autre chose que l’adrénaline, chose rare, inédite même. J’avais pleinement conscience de ce vers quoi je m’engageais. Mes nuits entières, je les ai sacrifiées à l’étude minutieuse de ses écrits, disséquant chaque phrase, chaque silence, afin de pénétrer les méandres de son esprit.
Et ce que j’y ai découvert dépasse de loin mes plus ferventes projections.
Dans ce monde sordide, l’amour est une faiblesse. Il n’a ni trône, ni droit de cité. Mais elle ? Elle est l’exception. Elle peut s’élever au rang de souveraine, non parce qu’elle le désire, mais parce que je l’ai décidé.
Ce royaume, je le bâtis dans le sang, pierre après pierre, pour le déposer à ses pieds.
Elle l’ignore encore, douce inconscience, mais elle m’appartient. Elle est façonnée pour vivre à mes côtés, pour respirer dans mon ombre. Et si elle ne le voit pas encore, je me chargerai de le lui faire comprendre, avec toute la patience d’un roi… et toute la dévotion d’un dément.
Son regard après son discours de fantique est éloquent. Il se contente de balancer l’un des corps sur son épaule d’un mouvement fluide, puis se dirige vers notre voiture, s'est pas trahissant une légère boiterie.
— Très bien, soupirai-je.
Je ne prête plus attention à ses monologues délirants sur elle, étant maintenant habitués. Je m’affaire avec lui à charger les trois hommes dans le coffre de notre véhicule, dont les vitres teintées empêchent quiconque de voir ce qu’il contient. Une fois le dernier corps installé, Mathieu fouille les poches d’Alice pour en extraire ses clés. Sans un mot, il me les lance, et je les attrape d’un geste rapide.Puis, avec une lenteur calculée, il passe un bras sous ses jambes et l’autre derrière son dos, la soulevant sans effort apparent. Pourtant, je ne peux m’empêcher de remarquer qu’il boîte davantage sous le poids de son fardeau. Son visage reste impassible, mais je sais que sa jambe doit le faire souffrir.Sans un mot de plus, il se dirige vers l’entrée de l’immeuble, me laissant surveiller les environs.
Mathieu
18 juin 2023
Je dépose délicatement Alice sur son canapé, bien que je m’avoue désireux de la garder contre moi. Elle semble frêle et vulnérable, mais une étincelle de défi brille encore dans son regard endormi.
— Mathieu… que fait-on maintenant ? Elle nous a vus, murmure Sasha en croisant les bras.
Je reste silencieux, observant la jeune femme qui commence à remuer légèrement. Alors que Sasha pousse un soupir exaspéré, je passe une main dans mes cheveux pour réfléchir, analysant chaque option.
— Rassure-moi… Tu ne songes pas à la recruter ? demande-t-il avec une pointe d'agacement.
Je ne lui réponds pas immédiatement, les yeux fixés sur Alice. Elle ouvre enfin les yeux, son expression passant rapidement de la confusion à la panique en nous voyant.
— Nous n’aurons aucunement l’intention de te causer de préjudice, Darling. Il te suffira de répondre à quelques questions, dis-je d'une voix calme, mes mots soigneusement choisis.
Es-tu familière avec les individus que nous avons éliminés ?
Son regard erre dans l’appartement, cherchant désespérément une issue ou une arme. Enfin, elle finit par me répondre, d’une voix tremblante :
— Pas vraiment… Mais je pense qu’ils faisaient partie d’un cartel de drogue, dit-elle en scrutant frénétiquement les alentours.
— C’est en effet exact. J’en déduis qu’Axel a pris le risque de jouer avec les mauvaises personnes, répliquai-je d’une voix posée, laissant transparaître une calme certitude.
Elle fronce les sourcils, visiblement troublée.
— Oui… Il m’avait prévenu qu’ils l’avaient retrouvé. Axel n’est pas exactement discret, vous savez.
— Tu comprends donc que ta sécurité est désormais gravement compromise, ajoutai-je en inclinant légèrement la tête, un regard pénétrant fixé sur elle.
Entre un cartel résolu à te faire payer pour Axel et une mafia qui désire ta mort pour des raisons qui m’échappent encore, ta situation s’avère des plus précaires.
Sasha, qui jusque-là était resté en retrait, intervient :
— Alice… Tu ne sembles pas particulièrement choquée par ce qu’il vient de se passer. Pourquoi ?
Elle détourne les yeux un instant avant de répondre :
— Ce n’est pas la première fois que je vois un cadavre.
Sasha arque un sourcil, sceptique :
— Voir un cadavre et assister à un meurtre, ce n’est pas la même chose.
Alice hésite, mordillant sa lèvre inférieure avant de murmurer :
— Ce n’est pas la première fois non plus que j’assiste à un meurtre.
Un silence tendu s’installe, que Sasha rompt sèchement :
— Cela explique sans doute pourquoi la mafia te cible, ajoutai-je d’un ton posé, l’observant attentivement comme pour peser chaque mot.
— Attendez… Comment savez-vous qu’une mafia veut ma mort ? demande-t-elle, incrédule.
Je prends une inspiration, prêt à clarifier :
— Darling…
— Mathieu est un tueur à gages, intervient Sasha avant que je ne continue. Une mafia lui a demandé de te tuer. Il a refusé, prétendant que le travail était fait. Mais si jamais ils découvrent le subterfuge, vous serez tous les deux dans une situation désastreuse. Avec le cartel qui te traque également, tu es en danger constant.
Il marque une pause avant de conclure :
— C’est pourquoi nous sommes ici. Nous te proposons un pacte : protection en échange de coopération. Et, soit dit en passant, Mathieu aime beaucoup tes livres, ce qui, apparemment, lui donne des scrupules. Pour ma part, je suis contre cette idée et pense que ce serait plus simple de te tuer.
Je lui jette un regard réprobateur pour tout son discours.
Alice reste immobile, ses sourcils froncés, luttant pour assimiler toutes ces révélations.
— Pour résumer, Darling, dis-je en m’approchant lentement, tu n’es guère en sécurité. Cependant, sache que je te tiens en haute estime, et je suis disposé à t’offrir ma protection, comme j’ai fait pour Sasha. Cela dit, Sasha… la tuer nous exposerait aux autorités, car il serait facile de nous lier à elle par notre connexion commune avec Axel.
Je m’agenouille devant elle, posant une main légère sur sa cuisse pour capter toute son attention.
— Si tu acceptes, je m’engage à te protéger et à t’initier aux subtilités de l’art du combat et, si cela s’avère nécessaire, à celui du meurtre.
Tu viendras vivre sous notre toit, mais tu conserveras ta liberté de travailler et de sortir, à condition de ne jamais t’aventurer seule tant que je ne jugerai pas que tu sois en mesure de te défendre convenablement.
Elle me fixe, hésitante.
— Et si je refuse ?
Avant que je ne puisse répondre, Sasha intervient, visiblement agacé :
— Alors nous partons. Nous te laissons tranquille, mais sache que ta chance ne durera pas. Aujourd’hui, Mathieu devait déjà éliminer ces types pour un cartel rival. Mais la prochaine fois, personne ne viendra à ton secours.
Alice déglutit, sa voix presque inaudible lorsqu’elle répond :
— D’accord… J’accepte. Mais là, je suis épuisée. Puis-je aller me coucher ?
Je me relève, incline légèrement la tête.
—Évidemment, Darling. Demain, Sasha se chargera de t’aider à préparer tes affaires. Sur ce, je te souhaite une excellente nuit.
Je m’incline légèrement, un geste empreint d’une politesse rare, avant de me diriger vers la porte, laissant Alice avec ses pensées.