Kiara : 00h30 / ???
Épuisée par les nombreux allers-retours que j'ai dû exécuter sous ses ordres, je pose pied à terre et secoue vigoureusement mes cheveux, posant mon casque sur la selle de ma moto. Mon œil gauche — désormais le seul à fonctionner correctement — se pose sur le bâtiment désaffecté, à une dizaine de mètres de moi. Malgré la douleur lancinante dans ma jambe droite, je marche vers le bâtiment et y entre.
— T'es là, le fils de pute ? demandai-je à haute voix en laissant la porte se refermer derrière moi.
— Bonjour à toi aussi, petite souris.
Je me tourne vers l'homme aux yeux noirs qui se tient près d'une autre entrée.
— Qu'est-ce que tu me veux ?
— Je veux juste parler avec toi.
Parler ? Cet enfoiré croit que je vais l'écouter ?
— À quel sujet ? demandai-je.
— Ton frère. Tu ne te demandes pas où il est ? Ou qui est "lui" ?
Je deviens plus intéressée par ses dires. J'avais continué à enquêter avec l'aide de Leonid, en vain. Les informations qu'il s'apprête à me donner, vraies ou fausses, pourraient nous être utiles.
— Pourquoi tu m'aiderais ?
— Je veux juste que mon tortionnaire crève.
Tortionnaire ? Peu importe. Un soupir fatigué quitte mes lèvres.
— Parle, ordonnai-je froidement.
— Des informations qui pourraient t'être utiles se trouvent dans le manoir de Mikhail Oleg, un célèbre trafiquant d'êtres humains.
Je rêve ou cet enfoiré essaie de m'envoyer aux loups ? Peu importe, une piste reste une piste.
— Bonne chance, petite souris.
Il se tourne et quitte l'entrepôt par la deuxième porte.
Encore absente, je referme la porte d'entrée et avance de quelques pas.
— Où es-tu ?
Sortant de mes pensées, je tourne la tête vers la voix de Leonid, quelque peu déconcertée d'avoir — une nouvelle fois — été prise en flagrant délit.
— Coucou, ça va ? demandai-je d'un air innocent.
— Kiara... me reprend-il.
Il croit que je suis qui pour me traiter comme si j'avais des comptes à lui rendre ? Manque de pot pour lui, je suis d'une extrême mauvaise humeur : ma jambe et mon bras me font souffrir, et mon œil droit me lance, me causant une horrible migraine. La seule chose qui m'importe à l'heure actuelle, c'est de dormir jusqu'à après-demain.
— Fiche-moi la paix, t'es pas mon père, affirmai-je sur les nerfs.
— T'as raison, je ne le suis pas, mais on a signé un contrat et tu dois le respecter, alors réponds-moi.
Il essaie de m'arnaquer ? Dommage pour lui, ma mémoire ne me fait pas défaut.
— De un, un des termes de ce même contrat m'autorise à ne pas répondre à tes questions. De deux, tu as brûlé ce contrat. Alors, je te conseillerais de trouver d'autres arguments.
— Dis-moi où tu étais, maintenant.
Face à son air déterminé, je cède, sachant pertinemment que plus vite je lui donnerai la réponse, plus vite j'irai au lit.
— Je suis partie à la rencontre de quelqu'un qui pouvait me fournir des informations sur Sasha.
— Pourquoi tu y es allée seule ? demande-t-il, les dents serrées.
— Pourquoi pas ?
— Putain, Kiara !
Je me tends.
— Tu ne connais pas ce type ! Il se serait passé quoi s'il t'avait fait du mal ? J'aurais pu te perdre !
Il... il s'inquiète ? Malgré ma fatigue, je me reprends rapidement.
— Je suis une grande fille, Leonid, je n'ai pas besoin de ton aide, affirmai-je froidement.
Il soupire avant de se reprendre à son tour.
— Quelle est cette information ? me demande-t-il, gardant difficilement son sang-froid.
— Un homme du nom de Mikhail Oleg, il se tend. Il aurait des informations sur Sasha, continuai-je.
— Le trafiquant d'êtres humains ?
J'acquiesce.
— Kiara... Son ton se fait plus sérieux, pas sévère, mais teinté d'inquiétude. Je t'interdis d'y aller. J'irai seul, m'informe-t-il.
— Leonid ! Je ne suis pas une poupée de porcelaine ! l'engueulai-je. J'irai seule s'il le faut !
— Tu sais quoi ?
En un instant, Leonid se jette sur moi, emprisonnant mes mains dans les siennes.
— Tu vas rester attachée ici.
Le parrain m'entraîne vers sa chambre. Comme une malpropre, il me jette sur le lit, m'emprisonnant sous lui. J'essaie de me libérer de sa prise, en vain.
— Lâche-moi ! réclamai-je.
Se penchant au-dessus de moi, Leonid me murmure à l'oreille un « Non » catégorique avant d'ouvrir le tiroir près de ma tête, en sortant un objet insoupçonné. Méticuleusement, Leonid m'attache avec les menottes roses. Un grognement frustré m'échappe face à son acte.
— J'y vais, moy angel. Prends soin de toi. Je reviendrai bientôt, promis.
Il embrasse mon front avant de se relever et de quitter la pièce.