Le soleil se levait de plus en tard, et c’est ainsi que Sam retournait au lycée aux aurores. Sirius ne l’accompagnait pas, car il n’y était pas inscrit, et l’école de Charlotte commençait plus tard que lui, aujourd’hui.
Il était tellement habitué à faire les choses mécaniquement qu’il ne se rendit pas compte immédiatement que ses pas ne suivaient pas le chemin habituel. Ses pas l’avaient guidé vers le grand parc du côté de chez Terry, où il avait réussi à lui dire au revoir correctement. Ce n’était pas la nostalgie où la triste qui l’avait guidé, car ce matin, il ne pensait pas à grand-chose.
Quand il prit conscience de l’endroit où il était, la surprise l’envahit. A cette heure, les milliers de feuilles rousses et mordorées dansaient dans la brise matinale, offrant aux spectateurs privilégiés un océan de couleurs automnales qui gonflaient d’admiration le cœur de l’adolescent.
Les grands arbres autour de lui offraient un spectacle doux, qui lui rappelaient l’exercice que lui avait fait faire Mye quelques jours plus tôt. Elle avait expliqué que ses pouvoirs étaient plus puissants la nuit, et cela avait fait déborder son pouvoir. Cela signifiait donc que ses dons étaient atténués le jour. Ne serait-ce pas une bonne idée de s’exercer ici, de jour, puisqu’il n’y avait personne autour de lui ? Au pire, il ne réussirait rien et partirait. Au mieux, il arriverait à percevoir l’environnement qui l’entourait et cela suffirait.
— Il faut bien se lancer, soupira Sam qui hésitait encore à tester.
Le jeune homme ferma doucement les yeux, le visage caressé par les doux rayons du soleil qui se faufilaient au travers des feuillages mordorés au-dessus de lui. Une brise légère lui pinçait les oreilles qui rougissaient de froid. Il adorait entendre le frottement léger des branches, leur mélodie si familière à ses oreilles l’envoûtait avec douceur. Ses doigts s’écartèrent lentement, guidé par la berceuse naturelle des feuilles marcescentes qui s’égrainaient aux pieds de leurs arbres pour frôler les siens.
Les bruits de la ville avaient disparu. Il n’était même plus sûr d’être différents des végétaux qui l’entouraient. C’était agréable, et les battements de son cœur ralentissaient, provoquant un sentiment de sérénité qu’il n’avait pas connu depuis une éternité. Comme le monde était immuable. Et la Terre, éternelle.
Des canards faisaient ondoyer l’eau d’un lac, quelque part à l’autre bout du parc. Des poissons minuscules se faufilaient entre les algues et la vase. Les têtards crevaient leurs œufs pour nager dans les nénuphars pour la toute première fois. Des moustiques dansaient près des roseaux qui se cognaient les uns aux autres. Et tellement d’autres créatures vivantes qui grouillaient entres les branches, les troncs, les racines, l’eau… tellement de nature persiste au cœur de ville !
Des battements de cœur. Il y en avait tellement que ça en devenait assourdissant.
Ta-dam. Ta-dam. Ta-dam. Un cœur. Son cœur ? Le métronome de cette mélodie l’emportait sur tous les autres bruits, sur toutes les sensations.
C’était fort. C’était beau. Ce n’était pas un cœur. Mais deux. Qui battent exactement au même rythme. Les rendant plus bruyant que tout ce qu’on pouvait percevoir.
Des amoureux ?
Non, c’était très différent. Bien plus liés. Plus ancien.
Et surtout, l’un de ces deux cœurs était le sien. Il sentait un fil qui tirait vers l’autre personne. Qu’il ne connaissait pas. Qu’il connaissait depuis toujours. Qui s’approchait. Qui était-ce ?
Sam ne contrôlait plus rien : ses pieds avancèrent en suivant le fil. Quand il releva les paupières, il s’aperçut sans surprise que la peau de ses mains avaient une teinte bleuté. Ses yeux le piquaient du froid dans l’air. Mais il le voyait bien, ce fil. Il fallait qu’il sache.
C’est alors qu’il la vit. Elle somnolait au soleil, assise sur un banc, près du lac. Toute de noir vêtue, son visage ressortait à peine, laissant apparaitre une peau aussi blanche que le lait, piquée de rouge aux joues et au nez. Avec ses traits délicats, on la confondrait pour une poupée de porcelaine. Sa bouche charnue était dissimulée à moitié dans une énorme écharpe sombre, et de longs cheveux d’argent s’échappaient de son épais bonnet. Non, pas argenté. Noir et blanc entremêlés, comme de la cendre.
Elle était fascinante. Très différente d’Andrea et de son aura solaire. Elle, c’était la Lune faite humaine. Impossible de la considérer autrement.
Une brindille craqua sous la semelle du jeune homme. La jeune fille sursauta et le dévisagea de ses grands yeux perses, une de ses mains se crispant sur le gros sac à côté d’elle.
— Euh… bonjour ?
Sam bafouillait. C’était certain qu’il devait lui paraître extrêmement bizarre, même s’ils devaient avoir approximativement le même âge. En tout cas, la réaction de peur qui marquait son visage l’incita à reculer d’un pas.
— Excusez-moi, je ne voulais pas vous effrayer, dit-il avec maladresse, je vais vous laisser tranquille.
— Attends.
Le jeune homme n’avait pas la moindre idée de ce qu’il devait faire. La seule chose qu’il savait, c’était que le cœur de la personne en face de lui s’affolait légèrement, tout comme le sien. Sans doute d’inquiétude face à cette étrange situation.
— Je… t’entends, murmura-t-elle. Pourquoi je t’entends ?
Les sourcils froncés, elle semblait complètement perdue, sans pour autant quitter le jeune homme des yeux. Elle avait une belle voix, avec un accent qu’il ne connaissait pas.
— Est-ce que vous allez bien ? Désirez-vous que vous laisse tranquille ? dit-il complètement décontenancé.
— Non. Non, non, non ! Ce n’est pas normal… Pas normal !
— Qu’est-ce qui n’est pas normal ?
— Je… je suis sourde. Je n’entends pas. Alors pourquoi, toi, je t’entends ? s’écria-t-elle en lui jetant un regard à la fois intrigué et accusateur.
Comment se sortir de ce pétrin ? Sam ne se voyait pas expliquer qu’il faisait un exercice de concentration pour apprendre ses pouvoirs, quand même ! Et encore moins expliquer qu’un lien existait, épais et fort, entre eux deux ! A moins qu’elle aussi, elle soit une de ces personnes particulières, dans ce monde que lui-même découvrait… Était-elle une Enfant de Lumière, une Chuchoteuse, ou encore autre chose qu’il ne connaissait pas ? Certainement pas une Nécromancienne, il le ressentait de tout son être.
— Quel lien ?
Cette fois, c’est lui qui était surpris. Il n’avait pas prononcé un seul mot. Lisait-elle dans les pensées ? La jeune fille en face de lui hocha la tête.
— Oui, je peux. C’est quoi, ce lien ? Qui es-tu ? Explique-moi !
Peut-être qu’elle ignorait tout, et que c’était la raison de sa panique. Alors, autant lui parler à cœur ouvert. Il s’approcha pour s’asseoir de l’autre côté du banc, et prit le temps de lui expliquer, ordonnant ses idées afin d’être le plus clair et concis possible.
— Je commence à peine à apprendre comment mon pouvoir fonctionne. Je faisais un exercice de concentration, qui permet juste de percevoir le monde différemment. Le lien est apparu, et m’a mené jusqu’à vous.
En même temps qu’il parlait, il se rendait compte qu’il ne voyait plus le lien. Il avait complètement relâché sa concentration. Impossible de savoir à quel moment sa vue était redevenue normale. D’ailleurs, ses mains n’avaient plus leur teinte bleutée.
— Pourquoi tu me vouvoies ?
— Mes parents m’ont éduqué ainsi, sourit-il. On vouvoie les personnes qu’on ne connait pas comme marque de respect.
— Oh. C’est bizarre, murmura-t-elle en dévisageant son interlocuteur.
— Quoi donc ?
— Moi, j’ai l’impression de te connaître. Depuis très longtemps. Même si ça me parait peu probable, articula-t-elle avec un peu de difficulté. Qui es-tu ?
Le jeune homme aurait difficilement plus la contredire. La vouvoyer était presque contre nature avec ce qu’il ressentait. Alors autant faire comme elle, et la tutoyer.
— Je m’appelle Samirelius Millenium. Sam, c’est plus court, et toi ?
— Je me nomme Alice des Cendres Paloma. Alice des Cendres, c’est mon prénom. Et on ne m’a jamais appelé autrement.
— C’est aussi long et insolite que mon prénom ! Et tu n’as jamais eu de surnom ?
— J’aime mon prénom, objecta-t-elle en lui jetant un regard sévère. Et puis, pourquoi aurais-je eu un surnom que je ne pouvais pas entendre ?
Sa voix se teintait d’amertume, et Sam comprit qu’elle ne devait pas lire dans les pensées depuis toujours. Qui plus est, sourde ou non, ne pas avoir un seul surnom en disait long sur l’endroit où elle avait grandi. Il préférait éviter le sujet afin de ne pas la mettre mal à l’aise.
— Depuis combien de temps lis-tu dans les pensées ?
— Depuis le tremblement de terre de l’autre jour. Tu sais, celui qui a fait plusieurs morts avec cette histoire de rame de tramway. D’un coup, j’ai entendu leurs voix. Enfin, leurs pensées. Depuis, il n’y avait qu’une seule personne que j’arrivais à entendre directement, jusqu’à toi. Mais lui, je ne peux pas entendre ses pensées. C’est ce qui vous différencie, tous les deux. Au fait, ma voix n’est pas trop bizarre ? Je ne peux pas l’entendre directement.
— Tu as une très belle voix, la rassurait-il, tu as un accent qui laisse deviner que tu n’es pas encore habituée à prononcer des mots, mais ça disparaitra vite, je pense. Si tu ne parles que depuis le tremblement de terre, tu as déjà progressé très vite !
Malgré tous ses efforts, Sam peinait à dissimuler toute la tristesse que la simple évocation de ce terrible accident réveillait en lui. Son esprit avait occulté tous les détails, exceptées Charlotte et Winifred. Alice des Cendres capta le fil de ses pensées.
— Tu y étais.
L’adolescent acquiesça d’un signe de tête, sans ajouter un mot. Non, il ne voulait pas en parler.
Un ange passa entre les deux jeunes gens, l’un et l’autre ne sachant plus quoi dire pour continuer à discuter.
Le ventre d’Alice des Cendres gargouilla bruyamment, suivi de celui de Sam. Ils éclatèrent de rire en concert.
— Je meurs de faim ! s’exclama la jeune fille. Il doit être midi, non ?
— Non, il devait être huit heures quand je suis arrivé dans le parc…
D’un geste, il sortit son portable de sa poche afin de regarder l’heure, et manqua de s’étouffer de surprise.
— C’est pas vrai, onze heures et demie ! J’ai raté tous les cours de la matinée ! s’affola-t-il. Mais comment j’ai pu louper l’heure à ce point ?
— Ta concentration a dû demander pas mal de temps au démarrage, se moqua Alice des Cendres en sortant un sandwich de sa besace.
En la regardant faire, Sam se rendit à l’évidence : le sac de sa nouvelle connaissance n’était clairement pas un sac de cours.
— Tu fais l’école buissonnière ? osa-t-il demander.
— Non. J’ai fugué.
— Quoi ?!
Elle était à la fois franche, directe et irresponsable. Comment pouvait-elle être si calme en disant une chose pareille ? Pour l’adolescent, c’était une chose impensable ! Avec tous les torts qu’il pouvait attribuer à ses parents, il n’osait pas imaginer toute l’angoisse qu’il provoquerait s’il en venait à faire pareil ! Qu’allait-elle devenir ? Avait-elle seulement un endroit où aller, où elle pourrait se protéger ?
Ses pensées n’échappèrent pas à sa camarade, qui, face à l’inquiétude sincère que Sam éprouvait envers elle, décida de se montrer un peu plus loquace.
— Ma famille m’a isolée à cause de mon handicap. J’ai été élevé par ma gouvernante aigrie, sans jamais sortir ou aller à l’école. Comme une cage dorée. Je vois ma mère environ une fois par mois, et, de ce que je sais, j’ai deux petites sœurs que je n’ai jamais vu, et deux grands frères qui ne m’ont jamais vu. Il y a quelqu’un, une personne qui se soucie vraiment de moi, que je veux retrouver. Il m’a appris à parler, tu sais. Celui que je peux entendre comme toi. Je dois le retrouver, c’est très important.
L’évidence s’imposait à Sam : elle était amoureuse de cet homme. Malgré la tristesse et la solitude qu’elle évoquait juste avant, le simple fait d’évoquer cette personne si spéciale à ses yeux adoucissait ses traits, la rendant radieuse. Il appréciait ce côté de sa personnalité. Cela lui donnait envie de l’aider.
— C’est très gentil de ta part, mais je me débrouillerai très bien toute seule, répondit-elle en écho aux pensées de son nouvel ami.
Il ressortit son téléphone pour vérifier l’heure à nouveau.
— Il va vraiment falloir que je parte en cours. Je vais me faire incendier par mes parents d’avoir séché la matinée, et j’ai un cousin qui est venu exprès pour me voir, qui va se vexer que je n’ai pas séché pour rester avec lui.
— Je comprends, rassure-toi. J’espère qu’on se reverra. T’es sympa, pour un Samirelius, le taquina-t-elle.
— Et c’est une Alice des Cendres qui parle ! répliqua-t-il en riant de bon cœur.
Il sortit rapidement un morceau de papier de son sac et un stylo, griffonnant son numéro et l’adresse des Pompes Funèbres Millenium de son père.
— Si jamais tu as besoin, tu pourras m’appeler, ou me trouver là. Je pense que je peux t’être utile, que ce soit pour tes recherches ou ta fugue. Ou simplement des nouvelles.
La jeune fille accepta la note et la glissa dans sa poche, touchée par ce geste qu’elle savait parfaitement désintéressée grâce à sa télépathie. Après quelques dernières politesses, ils se séparèrent.
Ce n’est qu’une fois en cours que Sam réfléchit à sa rencontre matinale. Alice des Cendres était une personne qui sortait de l’ordinaire. Il n’avait jamais été aussi proche de quelqu’un, aussi rapidement. Le lien qui les rattachait était ancien, solide, épais. Cela voulait certainement dire quelque chose, car il n’avait jamais vu de lien comme ça auparavant. C’était comme s’ils côtoyaient depuis bien avant leur naissance, alors qu’ils n’avaient pas croisé leurs chemin dans cette vie.
Dans tous les cas, il allait falloir scrupuleusement éviter le sujet auprès de ses parents. Il n’avait pas envie de supporter des tirades interminables au sujet de ses dons, et encore moins les moqueries de Mye. En espérant que celle-ci ne balance pas à ses parents qu’il avait séché les cours de la matinée pour parler à une donzelle…
La journée se faisait bien longue pour Sirius. Il n’avait pas tellement l’habitude de rester inactif, et il ne suivait plus le rythme scolaire depuis longtemps. Son maître ne lui avait donné que quelques jours de repos, et après avoir visité la ville, il ne savait plus trop quoi trouver pour s’occuper. En regardant l’heure, il constata que son cousin aurait bientôt fini ses cours. Il ne se trouvait pas trop loin de son lycée, pourquoi ne pas partir à sa rencontre, plutôt que de l’attendre à la maison de son oncle ?
D’un pas vif, il se faufila dans les rues, resserrant son manteau pour se réchauffer un peu. Le froid mordait en cette fin de journée. Soudain, à l’angle d’une rue, il reconnut une petite silhouette aux boucles brunes, figée comme une statue derrière un lampadaire. La mine grave, Charlotte observait quelque chose au loin.
— Quelque chose ne va pas, Charlotte ? l’interrogea-t-il une fois qu’il l’avait rejoint.
L’enfant lui fit un signe de tête, sans quitter du regard son Maître, qui riait avec un inconnu. Quand le regard du jeune homme se posa sur Sam et son interlocuteur, une vague d’émotions féroces l’emporta. Sirius ne comprenait pas ce qu’il lui arrivait : la haine et la révulsion qu’il éprouvait pour l’inconnu était telles qu’il aurait pu le tuer sur champ.
Pourtant, il ne pouvait rien faire du tout. Ni s’approcher, ni l’atteindre. Quelque chose l’empêchait de faire un pas de plus. De plus, il fallait aussi se l’avouer : Sam n’avait pas l’air en danger : il plaisantait avec l’inconnu qui ne montrait aucun signe d’hostilité. Il força son esprit à apaiser ses pulsions meurtrières, avant de se rappeler que la petite servante de son cousin était sans doute dans le même cas que lui.
— C’est parce que tu as envie de tuer l’inconnu qui est avec ton Maître que tu n’approches pas, toi non plus ?
— Non, répondit l’enfant tout bas. C’est parce qu’il me ferait disparaître.
Sirius écarquilla les yeux en entendant la réponse de Charlotte. Son regard se posa sur elle avec un peu plus d’attention : sous son visage parfaitement neutre, cachée derrière les grandes lunettes dont on l’avait affublée, il décela tout le flot d’émotions qui la parcourait : la tristesse, l’inquiétude, et l’affection pour son Maître.
Pourquoi ne s’en était-t-il pas rendu compte avant ? C’était tellement évident ! Elle avait beau être revenue de son repos éternel pour servir Sam, elle n’en avait pas vraiment l’attitude : elle n’était pas la créature d’un Nécromancien. Son réveil était bien trop long, et ses émotions n’avaient rien à voir avec la dévotion d’un serviteur à son maître. C’était tout le panel complexe de l’humanité qu’il y avait en elle. Comme si elle était vraiment vivante.
Quelle était ce pouvoir qui avait ramené à la vie cette enfant ?
Sentant le regard insistant de Sirius, celle-ci finit par tourner la tête vers lui.
— Mon Maître est serein. Il n’y a pas à s’inquiéter de cette personne. Nous pouvons rentrer.
— Tu ne veux pas rester pour veiller sur lui ? lui demanda-t-il, intrigué.
— Il n’apprécierait guère cette initiative de ma part, affirma-t-elle. Je dois rentrer et faire mes devoirs. Mon Maître m’a appris à lire et à écrire, je veux lui montrer que je suis une bonne élève à la hauteur de ses espérances.
— C’est ce qu’il t’a ordonné ?
— Non, c’est le souhait que j’ai exprimé et qu’il exauce. Je vous déconseille de rester aussi, Monsieur Sirius, ajouta-t-elle en reprenant la route pour rentrer. Mon Maître vous apprécie beaucoup, et je souhaiterais qu’il ne se fâche pas contre vous. Sinon, il ne restera que cet étranger pour l’écouter.
Le jeune homme était mouché de la perspicacité et des déductions de Charlotte. Elle savait se faire discrète, mais elle avait une conscience très aigüe des choses, quand on prenait le temps de s’intéresser à elle.
— Tu es très mature pour une enfant, lui confia-t-il en lui emboitant le pas.
— Cela n’a pas toujours été le cas. Mais ce que je suis aujourd’hui me convient.
— Et comment étais-tu, avant ? hésita Sirius.
— Avant ? répéta-t-elle en cessant d’avancer, surprise.
— Avant ta mort, compléta l’adolescent.
La petite fille releva les yeux vers lui, plongeant son regard pénétrant dans celui du Nécromancien qui avait osé lui poser une pareille question.
Puis, sans un mot de plus, elle s’en alla.