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PetitePlume
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Chapitre 7 : Tension

Point de vue de Marie

Le lendemain matin, la tension entre Virginie et Marie était à son comble. Elles s’étaient bien couchées dans le même lit, mais sans un mot, sans un regard, sans un geste tendre.
Au petit matin, comme chaque jour, Marie s’était réveillée en premier. Par réflexe, elle avait tendu la main vers l’autre côté du lit pour chercher la chaleur de Virginie… mais le drap était froid. Vide.

Elle descendit lentement les marches, le cœur lourd, ruminant leur dispute de la veille. Elle n’avait pas voulu s’énerver. Elle voulait juste lui parler, trouver un terrain d’entente. Mais ce n’était pas son cœur qui avait parlé — c’était la peur.

Dans le salon, elle la vit : Virginie, recroquevillée sur le canapé, encore endormie. Marie resta là quelques secondes, sans oser s’approcher.
Alors, en silence, elle alla dans la cuisine. Elle prépara le café comme chaque matin, comme un rituel qu’aucune dispute ne devait briser.

Elle savait que Virginie ne commençait qu’à dix heures ce jour-là. D’habitude, elles partaient ensemble au collège. Mais aujourd’hui, Marie prit ses affaires seule. Avant de partir, elle déposa un petit mot sur la table, à côté de la tasse fumante.

On pouvait y lire, écrit d’une écriture un peu tremblante :
Je suis désolée. Je t’aime. J’ai eu peur. Pardonne-moi.
Ta Marie.

La matinée fut longue. Chaque couloir du collège lui semblait pesant. Les regards ne changeaient pas vraiment, mais Marie avait l’impression que chacun d’eux portait un jugement silencieux.
Elle n’osa pas croiser celui de Virginie. Pas encore.

En fin de matinée, un mot du secrétariat lui parvint :
“Le proviseur souhaite vous voir, vous et Mme Leblanc, à la pause de midi.”
Son cœur se serra aussitôt.

Elle gravit les escaliers vers le bureau de M. Marchal avec une boule dans la gorge. Virginie était déjà là, adossée au mur, les bras croisés. Leurs regards se croisèrent brièvement. Rien de plus.

Ils entrèrent ensemble.

Julien Marchal, le proviseur, les accueillit avec son calme habituel. Mais Marie sentit tout de suite que le sujet serait grave. Il referma la porte derrière elles, leur désigna les chaises face à son bureau.

Je vais aller droit au but, dit-il. Une plainte de parents est arrivée ce matin. Rien de très concret, mais... les mots sont violents. On parle d’attitudes déplacées, d’influence néfaste, de rumeurs qui courent dans les couloirs. Vous imaginez le genre.

Marie baissa les yeux. Virginie resta droite, la mâchoire serrée.

Mais le ton de M. Marchal changea aussitôt :

Je vous connais, dit-il plus doucement. Ça fait cinq ans que vous êtes ici. Trois ans que vous êtes mariées. J’ai été l’un des premiers à être au courant de votre mariage, vous vous souvenez ?

Marie hocha doucement la tête.

Vous savez très bien qu’il n’y a jamais eu aucun problème. Vous êtes respectées, compétentes, professionnelles. Je vous soutiens.

Il marqua une pause.

Mais il va falloir être vigilantes. Ce genre de rumeurs, surtout auprès des parents, ça peut laisser des traces dans un dossier. Même si elles sont infondées.

Virginie serra les poings. Marie sentit sa gorge se nouer. Elle posa doucement sa main sur celle de Virginie.

Ce que je vous propose, reprit-il, c’est de gérer les choses maintenant, calmement. On convoque les parents concernés, ceux des élèves qui ont pu entendre ou colporter. On met les choses à plat, une bonne fois pour toutes. Comme ça, on coupe court aux rumeurs avant qu’elles ne prennent de l’ampleur. Et on montre que vous restez professionnelles, quoi qu’il arrive.

Il les regarda en silence pendant quelques secondes.

Vous n’avez rien à vous reprocher. Mais on vit dans un monde où, parfois, il faut prouver qu’on n’a rien à se reprocher.

Marie inspira profondément. Virginie détourna le regard.

Point de vue d’Agathe

Elle n’avait pas entendu leurs pas dans le couloir. Mais elle les avait vus entrer dans le bureau du proviseur. Ensemble. Sans un mot.
Elle s’était figée derrière la porte vitrée de la salle des profs, dissimulée par le battant entrouvert. Son cœur battait fort, trop fort.
Elle ne comprenait pas pourquoi elle restait là. Peut-être qu’une part d’elle espérait… entendre un mot. Un ton.

Mais rien ne filtra.

Elle retourna en classe avec l’estomac noué.

Depuis ce matin, quelque chose avait changé. Elle le sentait dans l’air, dans les silences. Marie n’avait plus le même regard lorsqu’elle faisait l’appel. Virginie ne lui avait même pas souri quand elle était passée à côté d’elle, alors que d’habitude, elle lui lançait toujours un petit clin d’œil.
Leur complicité... envolée. Comme si tout était retombé d’un coup, froidement.

Agathe sentit la panique lui monter à la gorge.

Elle avait juste… voulu détourner l’attention. Se défendre. Trouver un moyen de faire cesser les questions, les regards insistants.
Elle n’avait jamais voulu... ça.

Elle s’en voulait. Elle avait blessé les seules personnes qui s’étaient inquiétées pour elle. Celles qui avaient vu au-delà de ses silences.
Et maintenant… elle ne savait plus comment recoller les morceaux.

Le plus dur, c’était le vide.

Elles étaient toujours là, dans le même collège, dans les mêmes couloirs. Mais tout semblait plus loin. Inaccessible.

Plus tard dans la journée, en allant chercher un cahier oublié dans une salle, elle passa devant une porte entrebâillée. Celle de la salle de repos des profs.
Elle entendit leurs voix.

Je sais que t'es en colère. Mais on ne peut pas laisser ça nous diviser, pas maintenant.
C'était la voix de Marie.

Un silence. Puis un soupir.

Tu sais ce que ça m’a rappelé ? dit Virginie, plus bas. Quand j’étais gosse, quand je passais de foyer en foyer. Y avait toujours une excuse pour me rejeter. Et là… j’ai eu l’impression de revivre ça.

Agathe sentit une boule douloureuse lui nouer la gorge. Elle recula lentement, sans bruit, et s’enfuit dans les couloirs vides.

Elle se laissa glisser contre un mur, les bras entourant ses genoux, la tête baissée.

Elle aurait voulu disparaître.

Pourquoi j’ai fait ça ?

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