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Chapitre 11

Quand on est petit, on ne pense pas qu’on finira à la rue. On s’imagine pompier, ou maîtresse. Non pas assis par terre avec un temps à ne pas mettre un chien dehors en guise d’horizon. 

Rêver, rêver, il ne leur restait que ça.

Rêve, rêve, mais ne t’endors pas ! Si tu t’endors, c’est fini. Si tu t’endors, le froid gagnera.

Lorsque les orages d’été éclataient, elle laissait son café ouvert toute la nuit, le temps que ça passe. Elle n’avait pas le droit. Mais elle ne pouvait se résoudre à leur fermer la porte au nez. Elle qui avait connu l'indifférence des passants devant ses robes trempées, ses yeux rougis, et ses épaules grelottantes de froid. Alors, elle les accueillait ces pauvres fous qui rêvent trop fort, tellement fort, qu’ils finissent par en avoir mal. Par solidarité, par souvenir. Elle a encore mal de cette nuit sous la grêle, où ils s’étaient allongés sous un banc pour se protéger du mieux qu’ils pouvaient. 

Puis au fond d’elle, elle savait qu’ils ne resteraient pas à la rue longtemps ses petits musiciens. S’ils n’atteignent pas la gloire avant l’hiver, ils ravaleront leurs orgueils, et iront sonner chez leurs parents. Il n’y a que ceux qui n’ont pas le choix qui passent l’hiver dehors. Eux, ils ne seront plus à la rue dès que les températures descendront en dessous des 10°c. Il faudrait être sacrément bête et têtu pour se laisser mourir de froid avant de fêter ses vingt ans. Bête et têtu, comme ils l’ont été autrefois. Comme elle regrette aujourd’hui.

Elle aimait les nuits d’orages. Ils campaient tous au café. Elle, les trois musiciens de rues, et quelques-uns de leurs amis. Elle n’avait pas à rentrer chez elle, traverser la rue pour rejoindre cette maison dont la chaleur s'échappait par tous les côtés malgré tous ses efforts.

Lorsqu’ils avaient acheté le café, ils voulaient également acheter la dépendance à côté et en faire leur chez eux. Cela aurait été bien plus pratique, leur petit cocon. A l'époque, ils n'avaient pas assez pour acheter le lot. Elle avait hérité au même moment, comme un coup de pouce du destin, de la maison de sa tante et marraine, deux rues plus loin. Ils s’y installèrent. Ça devait être temporaire. Plus tard, quand les finances iraient mieux, ils acheteraient la dépendance pour en faire leur chez eux, et vendraient la maison de la tante.

La dépendance fut achetée par une usine pour servir d’espace de stockage. L’usine n’a jamais voulu vendre. Au moins, les voisins étaient silencieux. Ça ne gênerait pas les affaires du café. Alors, ils resterent dans la maison de la tante, là où cette dernière avait passé ses derniers moments. Il fallut bien trois mois pour enlever cette odeur de corps en décomposition de la chambre où on l’avait retrouvé dix jours après son décès. Si ce n’est ce détail morbide, la maison n’était pas si mal après tout : deux chambres, une cuisine avec un espace assez grand pour installer une table et quatre chaises, un petit salon, salle de bain et toilettes séparés. Ils ne leur en fallait pas plus. Au moins, ils avaient un toit au-dessus de la tête, un café à servir, et même un petit peu de place en plus pour le jour où ils seraient trois.

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