On me dit que j’ai une mémoire d’éléphant.
Mais toi tu sais la vérité.
Tu sais que ma plus grande peur,
C’est d’oublier.
Oublier d’acheter le pain,
Oublier la date du sacre de Napoléon,
Oublier un centime dans la poche de mon jean,
Oublier comment tu riais…
Surtout le jour de tes huit ans,
Avec ton pantalon rouge,
Et on pull jaune.
Un pull, en pleine été !
Comment oublier ?
Tu disais que c’était ton préféré,
Parce qu’il était jaune,
Et que c’était ton seul vêtement jaune,
Et que cette journée avait besoin d’un deuxième soleil.
Ça avait fini en bataille d’eau,
Et tu avais dû m’aider à enlever le farine dans mes cheveux.
Tu te souviens ?
Tu me dis que tu ne comptes plus le nombre de fois où je te pose cette question.
Tu te souviens ?
Avec une insistance sur le dernier mot.
Souviens.
Tu me dis que si je touchais un euro à chaque fois que je prononce cette phrase on serait milliardaire,
Que l’on pourrait s’acheter un train personnel, et tout le bordel.
Lâches tes souvenirs, vis l’instant, me répétais-tu.
Mais j’ai besoin de tout analyser
Répertorier
Stocker
Retenir
Souvenir
Même les détails,
Surtout les détails.
Aujourd’hui, je ne te dis pas
Souviens.
Je te dis,
Reviens.
Mais seuls les souvenirs me reviennent.
Et à la fin, le seul que je n’ai pas pu retenir,
c’est toi.