Taylor

Je pose mon sac sur la moquette de la chambre de Davis. Madeleine est déjà installée sur le lit de son meilleur ami. Lisa est à côté d'elle. Toutes deux sont penchées sur l'ordinateur.

—Tu as son code ? demandé-je à Lynn.

—Non mais je pense savoir comment l'obtenir, dit-elle les yeux fixés sur l'écran de son ordinateur.

Davis interroge Lisa :

—Et d'ailleurs, il n'a rien remarqué quand tu le lui as pris ?

—Je l'ai attrapé dans sa poche juste avant que le bus ne s'arrête, il doit penser qu'il est tombé pendant le trajet, répond-elle en haussant les épaules.

Davis hoche la tête. Je m'installe à mon tour sur le lit, à côté de Lynn. Elle épluche soigneusement un article sur la réinitialisation d'un code de téléphone.

—Théoriquement si tu réinitialises le téléphone, tu vas perdre les données non ? dis-je.

Madeleine ferme la fenêtre et l'ordinateur.

—Alors on a plus qu'à essayer de deviner, soupire-t-elle.

Lisa attrape le téléphone, soigneusement déposé sur un oreiller.

—J'ai peut-être une idée. Il me semble que c'est un code à six chiffres et les deux derniers sont zéro et six.

—Il a pas une sœur ? demande Madelynn.

Davis arrache le portable des mains de Lisa et se précipite pour taper une combinaison.

—Non, ce n'est pas sa date de naissance !

Tout le monde pousse un soupir. Je vais sur mon téléphone pour regarder l'Instagram de Noah, dans l'espoir d'avoir un éclair de génie.

Lynn pose sa tête sur mon épaule pour me regarder faire défiler les publications.

—Attends ! s'exclame-t-elle. Remonte.

Lisa tente à son tour une combinaison sans succès, tandis que je remonte à un selfie de Noah et son père.

—Plus qu'une tentative avant qu'il ne se bloque pendant une minute, nous avertit le roux.

—Laissez-moi essayer quelque chose, dit Lynn en attrapant l'appareil. Elle plisse les yeux et saisit la date à laquelle la photo a été postée.

Bloqué

Elle pousse un grognement.

—Attendez, déclare-t-elle.

Nous patientons une minute en nous creusant les méninges. Lisa propose des codes que nous réfutons à tour de rôle. Madelynn tape une combinaison une fois que le blocage automatique s'est enlevé. La tension monte tandis que ses doigts glissent sur l'écran. Elle mord sa lèvre inférieure comme elle a l'habitude de le faire lorsqu'elle est anxieuse.

L'air devient étouffant la demi-seconde où le téléphone charge. Il se déverrouille.

—C'était inversé dans le mois et le jour, explique Madelynn, fière.

Davis la décoiffe en la félicitant. Il se prend une petite gifle juste après.

—Arrêtez de vous battre vous deux ! les réprimande Lisa en ouvrant la galerie photo.

Elle branche le téléphone à l'ordinateur et sélectionne la vidéo qui semble être celle de la soirée. Une fois qu'elle est totalement exportée, elle la lance pour s'assurer que c'est la bonne. Je sens Madelynn se tendre. Je passe un bras autour de sa taille. L'audio se lance, la voix de Madelynn résonne. Elle crie à l'aide avant qu'on ne voit Will la plaquer contre l'arbre. Madelynn tourne la tête mais je reste fixé sur ces images : on y voit distinctement Madelynn se débattre et Will la forcer.

Noah est un très bon cadreur visiblement.

Lisa ferme la vidéo puis déconnecte le téléphone. Elle se balade dans les conversations.

—Je crois avoir vu qu'il a un groupe avec Will et d'autres mecs, je vais chercher ça. On a les preuves maintenant, il ne reste plus qu'à préparer notre plan pour que tout se déroule au mieux.

—Je crois que Charlotte sera sur scène avec ton père, dit Davis, comme c'est la présidente du club des élèves. Je peux lui demander de nous aider.

—Seulement si tu es sûr qu'elle ne dira rien à personne, dit Madelynn.

Davis secoue la tête avant d'ajouter :

—Si tu veux mon avis, elle doit aussi avoir des comptes à rendre à Will.

Madelynn hausse les épaules, visiblement ailleurs.

—Tout va bien se passer, je lui murmure.

—Ok, et donc il nous faudra aussi un accès au vidéo projecteur, relance Lisa.

—Mon père compte l'utiliser pour sa présentation je crois, soupire Madelynn avant de se frotter les yeux. C'est sûrement un élève du club vidéo qui s'occupera de la régie.

—On aura juste à le contraindre à lancer la vidéo dit Davis.

—Sans violence, ajoute Lisa.

—On s'occupera de ça avec George, dit Davis. Taylor tu feras en sorte que le père de Madelynn ne l'interrompt pas.

—On n'en aura même pas besoin : il y a une sorte de vidéo de présentation des portes ouvertes chaque année, donc il sera assis dans les rangs normalement, déclare Madelynn. Il faudra juste que Charlotte nous fournisse le micro.

Davis acquiesce.

—Vous pensez qu'on risque quelque chose ? demande Lisa en balançant le téléphone de Noah sur les draps.

—Il pensera sûrement à nous exclure ou nous punir sous le coup de la colère, répond Malynn en se recoiffant.

—Pour dénoncer un crime ? Il aurait du mal à nous condamner ! Surtout que les examens arrivent à grands pas donc il n'aurait aucun intérêt à sévir, dis-je.

Même si je ne suis pas concerné par leurs examens, j'ai bien conscience qu'il va falloir que je mette vraiment à travailler quand je serai rentré. Mais comme le programme d'ici m'a semblé assez semblable à celui de mon pays d'origine je n'ai pas vraiment de soucis à me faire. Sauf peut-être pour les cours d'Histoire.

Je chasse ces pensées de mon esprit et me concentre sur l'instant présent. Il nous faut encore peaufiner quelques détails de notre plan mais dans l'ensemble, tout se clôture assez bien. Madelynn est restée assez distante durant toute la soirée. J'essaye de l'accompagner afin de la soutenir au mieux même si je sais bien que son instinct doit la pousser à vouloir se débrouiller seule.

Nous finissons par commander des pizzas pour le dîner et mangeons avec la famille de Davis avant de regarder un film d'action. Bien sûr, comme nous avons cours demain, nous rentrons chez nous tout en gardant contact. Nous mettons au courant George ainsi que le reste de nos amis et évidemment, leur soutien ne se fait pas attendre. Madelynn m'embrasse quand même avant de rentrer chez elle. Je sens qu'elle fait des efforts pour s'appuyer sur moi. Nous restons un long moment au téléphone cette nuit. Elle me parle de son appréhension et de ses craintes mais j'arrive à trouver les mots pour la rassurer. Elle me confie aussi qu'elle se doute que son père ne va pas bien prendre notre petite intervention. Mais comme à chaque fois que le doute s'installe, une affirmation se balaie : c'est le seul moyen pour lequel il n'aura pas l'occasion de se défiler. Nous discutons encore de longues minutes au sujet des cours, des sorties à venir et de ce qui nous attend une fois les examens passés. Je serai rentré en Irlande, mais Madelynn m'assure que nous trouverons un moyen de communiquer malgré la distance et le décalage horaire. Vers minuit, nous partons dormir.

Il ne reste plus qu'à patienter jusqu'à vendredi matin. Enfin, la vérité sera dévoilée.