Taylor
Lisa rompt le contact et nous sortons de sa voiture.
Le week-end est arrivé à toute vitesse. Madelynn a séché plusieurs heures et ne m'a pas adressé un regard depuis le cours de sport de mardi. Elle ne m'a pas envoyé de messages, rien d'étonnant au fond mais ça m'a quand même un peu blessé. Je ne peux pas lui en vouloir, j'ai dû la vexer la dernière fois.
J'en connais une qui me taperait sur les doigts pour m'être mêler de ce qui ne me regarde pas, encore une fois.
J'ai réussi à appeler mes parents hier soir, ce qui a d'ailleurs laissé de jolies traces sous mes yeux : mes parents et ma sœur avaient beaucoup de choses à me dire.
Entre le bulletin de notes que ma soeur m'a lu en détails, le nouvel article du magazine préféré de ma mère et le long monologue de mon père au sujet de la nouvelle cargaison de livres arrivée à la boutique, je n'ai pas eu le temps de parler. Je leur ai donné de brèves nouvelles, omettant certains détails. Je leur ai parlé de Lisa, ce qui a d'ailleurs enchanté ma mère. Elle qui avait peur que je 'me renferme dans ma grotte comme un ours en hiver'. Elle a été surprise d'apprendre que j'avais intégré un groupe et que nous avions une sortie de prévu ce week-end.
Lisa et moi rejoignons les autres à l'entrée du musée. La façade arbore une banderole 'entre écran et réalité'. George trépigne d'impatience en nous voyant arriver.
—Dépêchez-vous ! Apparemment il y a des casques de réalité virtuelle à disposition pour des immersions dans les plus beaux monuments du monde !
—Oui ! Oui ! répond Lisa avec un sourire. Ne t'en fais pas, les casques d'aujourd'hui ne peuvent pas s'envoler.
George la décoiffe et s'élance avec elle vers l'entrée.
—Il y a quelque chose que tu aimerais voir ? me demande Anyka.
Ses cheveux noirs sont tressés et plaqués en arrière. Sa robe bleue ressort vraiment bien avec ton teint métissé.
—Non, je n'ai pas encore étudié le programme, et toi ?
—J'aimerais bien voir les animaux marins modélisés.
—On fera ça alors, dis-je avec un sourire.
Elle me le rend sans tarder et m'entraîne avec Chloé vers l'entrée.
Nous entrons et nous fondons dans la foule. George nous amène aux casques et se met dans la queue pour en essayer un, Chloé et Lisa partent vers les stands exposants des schémas de ventes des nouvelles technologies.
Anyka et moi nous retrouvons seuls. Elle attrape ma main et me mène alors vers la partie modélisation. Je remarque qu'elle garde ma main dans la sienne un peu trop longtemps pour que cela soit involontaire.
Cette exposition est très intéressante, entre jeux-vidéos, commerces et créations graphiques. Il y en a pour tous les goûts.
Nous passons la matinée dans le musée avant d'aller dans un fast-food pour nous ravitailler. George commande beaucoup trop de nourriture pour lui seul, tandis que les autres et moi-même nous contentons d'un menu simple. Nous sommes attablés en attendant notre repas. Lisa explique à Anyka ce qu'elle a compris des expositions commerciales au sujet du futur de la technologie. Quant à George, il tente de décrire la sensation qu'il avait en étant dans la modélisation de la ville de Rome.
—Dites, ça vous gêne que mon ami se joigne à nous ? Il sort de son cours de boxe avec une pote, nous demande Chloé, occupée jusque-là à pianoter sur son téléphone.
Tout le monde répond à la négative. Nous parlons encore pendant quelques minutes avant que Chloé ne se lève.
Elle rejoint un homme, visiblement d'origine asiatique et derrière lui je vois Madelynn. Elle est en tenue de sport. Son expression m'indique qu'elle ne s'attendait pas à me voir ici. Ils s'approchent tous deux de notre table mais Lynn reste en arrière.
—Salut les jeunes ! Je suis Léo, l'ami de Chloé.
—On se connaît depuis toujours ! précise cette dernière.
—Yep ! J'ai pratiquement changé ses couches !
Elle lui tape l'épaule et il rit. Nous nous serrons sur les banquettes. Madelynn se retrouve en face de moi, et pourtant elle ne m'adresse pas un regard. Lisa se retient de râler.
—Je vais aller commander, comme d'habitude Made ? demande Léo en attrapant sa carte bleue.
Elle hoche la tête et le remercie.
Les conversations reprennent, George reprend son monologue et Anyka décide de s'adresser à Madelynn :
—Tu fais de la boxe ?
—Oui, depuis 3 ans.
—Ça explique tes esquives devant Will, dis-je avec un air détaché.
Elle ne répond pas et un silence s'installe. Anyka ne se laisse pas abattre et reprend :
—Et tu connais Léo depuis longtemps ?
—C'est mon coach sportif, donc oui depuis quelques mois.
—Il est coach ? demande Anyka à Chloé.
—Oui. Il a sauté une classe et a fini ses études tôt. J'espère qu'il n'est pas trop dur d'ailleurs, dit-elle en s'adressant à Lynn.
Elle secoue la tête avec un sourire.
—Disons qu'il ne me ménage pas.
—S'il est mauvais tu peux me le dire, insiste Chloé avec un sourire en coin. Je lui donnerai quelques gifles pour le mettre en place.
Seule Lisa décide de ne pas adresser la parole à Lynn. Les autres semblent plutôt bien l'accepter.
—Qui va se prendre des gifles ? intervient Léo en revenant.
Il s'assied à côté de Chloé qui rit et lui donne une excuse bidon. Nos commandes arrivent peu après et nous dégustons ce festin en discutant de tout et de rien. Chloé raconte qu'elle n'a pas présenté Léo plus tôt car elle avait envie qu'il rencontre tous ses amis d'un coup. Léo parle de sa vie étudiante et de son retour dans cette ville il y a quelques mois après la fin de ses études.
Malgré toutes mes tentatives pour attirer son attention, Madelynn ne me jette même pas un regard.
Je finis par lui donner un coup de pied sous la table. Elle fronce les sourcils et me regarde avec des yeux assassins. Son téléphone vibre et nous coupe dans ce qui est notre premier contact visuel depuis une semaine.
—Bon, je vais devoir vous laisser, le devoir m'appelle, dit-elle en se levant.
—Ton père ? demande Anyka avec un peu de tristesse.
—Pire. Le directeur du lycée.
Anyka glousse et la salue gentiment. Cette fille est gentille avec tout le monde, c'est assez impressionnant. Elle a une aura si tendre et rafraîchissante. Même Madelynn succombe à son charme.
Cette dernière rassemble ses affaires et s'apprête à partir lorsque mon amie la retient :
—Tu es libre cet après-midi ? l'interroge-t-elle soudainement.
—Oui je crois, pourquoi ?
Elle se tourne vers le groupe et demande à la cantonade :
—Ça vous dit de venir vous baigner chez moi ? Mon père a ouvert la piscine hier.
Tout le monde s'exclame affirmativement. La chaleur de l'été arrive depuis quelques jours et le vent s'apaise. Il fait tout juste assez beau pour pouvoir commencer à se baigner.
—Et si tu veux nous rejoindre un peu plus tard, n'hésite pas, dit-elle à Madelynn qui replace son sac sur son dos.
—Je ne dis jamais non à une baignade, répond-elle avec un sourire.
—Tu as mon numéro ?
—Non, mais elle a le mien.
Je regrette immédiatement d'être intervenu. Tout le monde me regarde bizarrement. Un ange passe.
—Je dois vraiment y aller, peut-être à cet après-midi ! lance Madelynn en s'enfuyant.
Je me retrouve alors devant toute une bande de personnes me fixant, les regards pleins de sous-entendus.
Dans quelle merde je me suis encore mis...