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1 - Interlude
2 - Chapitre 1.1
3 - Chapitre 1.2
4 - Chapitre 1.3
5 - Chapitre 2.1
6 - Chapitre 2.2
7 - Chapitre 2.3
8 - Interlude
9 - Chapitre 3.1
10 - Chapitre 3.2
11 - Chapitre 3.3
12 - Chapitre 3.4
13 - Chapitre 3.5
14 - Interlude
15 - Chapitre 4.1
16 - Chapitre 4.2
17 - Chapitre 4.3
18 - Chapitre 4.4
19 - Chapitre 5.1
20 - Chapitre 5.2
21 - Chapitre 5.3
22 - Interlude
23 - Chapitre 6.1
24 - Chapitre 6.2
25 - Chapitre 7.1
26 - Chapitre 7.2
27 - Chapitre 7.3
28 - Chapitre 7.4
29 - Chapitre 7.5
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31 - Chapitre 8.1
32 - Chapitre 8.2
33 - Chapitre 8.3
34 - Chapitre 8.4
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Chapitre 3.5

Et je compris. Ils se connaissaient. Forcément. Des Ebeds, dans la même région. Il devait y avoir un Cercle. Je laissais Ishmail parler, faire ses constatations et j’ajoutai un ou deux détails. L’agent de police, Elijah Duchesne comme je l’appris quand elle remplit l’encart en haut de la feuille, notait religieusement tout ce qu’il disait, hochant la tête et posant parfois quelques questions pour avoir une ou deux précisions. À côté d’elle, l’agent Griffin Richardson ne pipait mot et donnait l’impression de s’ennuyer profondément, se balançant à demi sur sa chaise, et de temps en temps ramenant ses cheveux dorés en arrière. D’accord, il était tard et il pouvait être fatigué, mais n’empêche, il aurait pu faire un effort pour paraître un peu compatissant à notre inquiétude. Ishmail n’avait pas l’air de s’en formaliser, l’ignorant. Si ça se trouve, sa pote Ebède lui en avait déjà raconté des vertes et des pas mûres sur son coéquipier.

Je patientai, jusqu’à ce qu’Ishmail ait terminé et je finis par signer derrière lui. Ce faisant, je savais que ce n’était plus qu’une question de temps avant que le Cercle du coin ne se jette à ma poursuite. Et ils avaient tout : mon nom, mon adresse… Impossible de ne pas faire la démarche, Sara était trop importante, et Sara était humaine. Elle ne méritait pas de passer derrière mes histoires d’Ebède.

Une fois la déposition terminée, Richardson prit la parole pour la première fois.

— À tous les coups, votre copine a organisé sa fuite. De toute façon, il faut attendre encore son potentiel retour quelques heures avant de partir à sa recherche. C’est peut-être juste un contretemps.

Sa voix était nonchalante au possible, et elle m’irrita profondément tandis qu’il osa même me faire un clin d’œil. Se voulait-il rassurant ? J’en eus la nausée, mais ravalai ma colère naissante, enfonçant mes ongles dans ma paume. Duchesne soupira.

— Dans les faits, l’adjoint Richardson a raison, nous ne pouvons rien faire pour le moment, mais nous vérifierons les hôpitaux des alentours, sait-on jamais.

— Maintenant que tout est dit, bonne soirée messieurs-dames.

Richardson se leva sans préambule, sa chaise émettant le plus atroce des grincements, et partit avec un signe de la main. Devant notre air scandalisé, Duchesne se racla la gorge, mettant en ordre ses papiers en les tapotant contre la surface de la table.

— Excusez-le.

Ses yeux verts me toisèrent. La méfiance qui émanait d’elle me fit froid dans le dos, la chair de poule me recouvrant entièrement. Puis, elle le détourna abruptement vers mon compagnon d’infortune.

— Nasrim, j’aimerai te parler en privé.

Ishmail souffla lourdement, comme s’attendant à cette demande, puis se tourna vers moi.

— Je ne serai pas long.

Acquiesçant, je me levai immédiatement, refermant derrière moi et me retrouvant dans le couloir, avide de quitter cette salle horrible. Je m’assis pesamment sur le banc, laissant ma tête reposer contre le mur. Je délaissai la machine à café, me rappelant à quel point le breuvage qu’elle proposait n’avait de café que le nom, même pas la couleur.

Malgré la porte épaisse, le bruissement des voix s’éleva. L’agent Duchesne savait que j’étais une Ebède à présent, et la salle d’interrogatoire étouffait bien les bruits, mais à priori, mon ouïe avait décidé d’être plus fine que d’habitude ce soir, et j’entendis leur conversation. S'en doutait-elle ? Était-ce à dessein qu’elle me faisait profiter de leur échange ? J’écoutai, attentive.

— Cette Ebède ne s’est pas présentée devant le Collectif. Elle est en faute, Nasrim, et tu le sais !

— Calme-toi, Elijah. Je la connais cette Ebède, comme tu dis, et elle n’a rien d’un danger.

Sa voix était tranquillisante. J’étais plutôt surprise qu’il me défende. Il aurait dû être le premier à me traîner devant ce fameux « Collectif ». Le terme m’était inconnu. En quoi était-ce différent d’un Cercle ?

— Comment peux-tu le savoir ? Elle puait la proie.

Quant à elle, sa voix était hargneuse. Flic parmi les humains, et parmi les Ebeds. Heureusement que je n’étais pas allée trouver les forces de l’ordre ces dernières années. Je croisai les bras, me faisant un maigre rempart, attendant le verdict. Et Sara, dans tout ça, qui était perdue dans la nature. Elle passait clairement au second plan pour cette adjointe, sans parler de son collègue. Je contemplai le plafond, à défaut d’un joli paysage. Un vieux ventilateur tournait vaillamment afin de transporter le pauvre filet d'air chaud à travers le couloir.

— Peut-être parce que la flic devant nous aider la regarde comme un prédateur prête à lui fondre dessus ?

Je fermai les yeux. Au moins, il n’y avait pas qu’avec moi qu’Ishmail était caustique. Tout le monde en prenait pour son grade. Je l’imaginai, la main sur la hanche, se tenant bien droit et peu impressionné, tandis que Duchesne devait le foudroyer. J’ouvris de nouveau mes paupières.

— Qui te dit que ce n’est pas elle qui est à l’origine de la disparition de ta collègue ? Elle m’a tout l’air d’une Solitaire qui se cache des Cercles et des Collectifs. Zach doit être au courant.

Il y avait un miroir en face de moi. J’y contemplais le reflet de ma sœur. Ses iris dorés, sa coiffure apprêtée.

Je me levai, posant la paume sur la vitre glacée. Sa bouche formait des mots, mais aucun son ne parvenait à mes oreilles. Je scrutai ses lèvres vermeilles, détaillant les mouvements, sa main contre la mienne.

— Écoute, je me porte garant d’elle, d’accord ? Laisse-moi voir ça avec Zach.

— Tu ne sais pas dans quoi tu t’embarques, Ishmail. Je te donne quelques jours, pas plus. Quand je commencerai à partir à la recherche de ta collègue, ce sera aussi le moment où tu devras rendre des comptes pour elle.

« Fuis. Les ennuis arrivent. »

Sa voix silencieuse atteignit mon âme, en un éclat de foudre transperçant mon cœur. J’inspirai brusquement.

« Pars ! »

Les lèvres s’agitaient plus fortement devant moi. Je fis un brusque pas en arrière, me cognant contre un torse large. Une main se posa sur mon épaule.

— Ça va ? me demanda Ishmail, haussant un sourcil.

Je ne pus qu’hocher la tête.

— Allons-y, je te raccompagne chez toi.

— Ah ! Une dernière chose Nasrim ! l’interrompit l’adjointe en fermant derrière elle la porte de la salle d’interrogatoire. Tu n’aurais pas des nouvelles de Nour par hasard ?

Je vis l’Ebed hausser les deux sourcils avant de se rejoindre à la question qu’il jugeait saugrenue à priori.

— Non. Mais je n’ai jamais été spécialement proche d’elle. Tu as demandé à Gavrielle ?

— Pas encore, mais je le ferai. Merci, termina Elijah Duchesne avec un sourire auquel je n’ai jamais eu droit.

La preuve, elle tourna la tête vers moi et son expression presque amicale se transforma en une moue farouche bien trop belliqueuse pour mon bien. Elle ne daigna pas m’adresser la parole, comme si mon existence n’était pas encore digne d’être reconnue.

— Et n’oublie pas, quelques jours, pas plus, rappela-t-elle à son compagnon de Cercle.

— Ça ne risque pas, répondit d’un ton tout aussi acerbe le Grand Méchant Loup à côté de moi, Duchesne aurait pu être un petit cochon rose, il l’aurait mangée toute crue.

Puis, il posa la main sur mon épaule pour attirer mon attention.

— Allez, viens. Cette fois, nous partons pour de bon.

Toujours muette, j’acquiesçai, entraînée par son pas. Je ne pus m’empêcher de tourner la tête de nouveau vers le miroir. Noah me regardait, ses pendants d’oreille turquoises scintillant, les lèvres esquissant un sourire inquiétant.

«  Prise au piège, sœurette. »

La voix d’outre-tombe sonnait comme une malédiction.

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